C’est bien connu, la grisaille hivernale engendre souvent mal-être et frustrations. Et certaines maisons de vente par correspondance en profitent pour submerger le consommateur de feuillets publicitaires séducteurs et bien ciblés.
Remèdes miracle, cadeaux, bijoux magiques ou gains mirobolants: tout est bon pour convaincre le client crédule de débourser. Florilège des publicités reçues courant décembre 2003 par nos lecteurs.
• Le Lottery Awards Office se présente comme un «agent indépendant de toute agence du gouvernement» établi en Australie, qui inscrit le client aux loteries australiennes de son choix. Un spécimen de lettre de félicitations, portant le nom du destinataire de la publicité, fait miroiter un enrichissement utopique. En sus d’une taxe de 10 fr., il faut signer une «autorisation officielle de virement de fonds». Attention à cette énorme arnaque qui met entre les mains de cette société toutes vos coordonnées personnelles et bancaires, en plus de votre signature!
• G.S.V., à Vienne, «offre» généreusement des cadeaux: voiture, cuisine équipée, 7500 fr. ou un voyage à Rome. Mais pour profiter de cette «dernière chance» qui lui est offerte, le destinataire doit s’acquitter d’une «taxe facultative» de 100 fr. Par le biais du feuillet de réponse, il autorise en outre l’entreprise à publier ses nom, adresse et photo à des fins publicitaires, et à transmettre ces coordonnées à d’autres sociétés de publicité directe…
• Angélique de Succès, vous connaissez? Non? Pourtant, cette inconnue se présente comme «la plus grande voyante», interviewée dans… CI Paris. Suivent huit pages de promesses et de mises en garde, et une offre pour un «collier de perles habité de légendes aux cinq pouvoirs magiques de la reine de Saba»! Le bijou est «gratuit, mais il faut tout de même débourser 67 fr. en guise de «frais d’administration, d’assurance et traitement du dossier en priorité».
• Diamant Versand tient absolument à vous offrir 25 000 fr. et un appareil
audio-vidéo. Mais pour cela, il faut être le gagnant du concours et, surtout, commander «à l’essai sans obligation» pour un montant minimum de 30 fr. Au choix: la crèche «son et lumière», l’étoile de Noël en plastique, etc.
• Bottega Verde vous garantit être «sans aucun doute le gagnant définitif des 30 000 fr.» mis en jeu, bien que les «conditions de remise» précisent, en petites lettres, qu’il s’agit d’un tirage au sort. Jointe à ce courrier, une publicité pour un produit «miracle», un mélange de calcium et de magnésium vendu à prix fort.
• Belafit joue dans le même registre et promet un gain annoncé en grosses lettres, alors qu’il s’agit, évidemment, d’un tirage au sort. Cette société réclame une réponse dans les sept jours. Sachant que le coupon de participation fait également office de bulletin de commande, le trouble est habilement semé. Les produits proposés? Amincissant miracle, somnifère 100% naturel, produit antivarices et autre appareil de gymnastique…
• Damart ne se contente pas d’un simple catalogue pour vendre ses habits et sous-vêtements protégeant du froid. Une «enquête de perte ou vol» a pour but d’inquiéter le destinataire de cette publicité. Qui est invité à renvoyer immédiatement le coupon de participation «égaré» et à réclamer son cadeau gratuit, si possible en passant simultanément une commande.
Comment réagir
Confronté presque quotidiennement à ces messages, qui vont de la publicité agressive à la véritable arnaque, le consommateur a souvent de la peine à résister. Et pour cause: comme l’explique Guido Sutter, suppléant du chef du service juridique de l’Office fédéral de la justice, «c’est un public ciblé qui reçoit ce genre de correspondance». S’adresser à la personne par son nom et glisser quelques injonctions et avertissements («si vous ne répondez pas dans les 10 jours, votre gain sera perdu») accentue la pression psychologique exercée sur le destinataire.
Ce genre de manipulation ne mérite qu’une chose: la poubelle! Le consommateur peut aussi renvoyer l’enveloppe sans l’ouvrir, en exigeant d’être rayé du fichier d’adresses. Mais s’il a déjà payé la taxe «d’inscription» et s’estime lésé, il peut encore réagir. Le mieux est de s’adresser à la Commission suisse pour la loyauté (Kappelergasse 14, 8022 Zurich, tél. 01 211 79 22). La démarche est gratuite et simple, puisqu’il suffit de remplir un formulaire à cet effet et de joindre la publicité litigieuse, ainsi que la correspondance échangée.
La Commission examinera le cas soumis et décidera s’il y a lieu de poursuivre la démarche, en dénonçant le publicitaire indélicat auprès de la justice.
A noter que le consommateur peut agir par lui-même et déposer une plainte pénale. Cependant, même si une telle démarche ne coûte normalement rien au plaignant, il existe un risque de répercussions financières si la plainte est déclarée abusive.
Jacqueline Favez
Véronique Kipfer