Dans trois et quatre ans, Pierre et Marie* partiront à la retraite, après avoir mis de côté une épargne très appréciable. Avec, entre autres, plus de 1,6 million de francs accumulés dans leurs caisses de pension et près de 200 000 fr. abrités dans divers 3e piliers liés (3a), les futurs pensionnés ne s’inquiètent évidemment pas pour le financement de leurs vieux jours.
En revanche, ce couple de lecteurs se demande comment planifier le retrait de ses divers avoirs, afin de payer le moins d’impôts possible. Cette question, tout le monde devrait d’ailleurs se la poser à l’approche de la soixantaine, car même une épargne vieillesse plus modeste peut faire l’objet d’une optimisation fiscale intéressante.
Eviter le coup de massue
Lors du déblocage des capitaux à la retraite, le fisc impose, en effet, les avoirs de prévoyance. Ils sont taxés séparément du revenu et de la fortune, à un taux préférentiel, certes, mais néanmoins progressif.
«Pour le calcul de cet impôt prélevé sur l’épargne des 2e et 3e piliers, les administrations fiscales additionnent tous les retraits intervenus dans l’année, y compris ceux du conjoint, avertit Roland Bron, directeur en Suisse romande de VZ VermögensZentrum. Or, plus les retraits effectués au cours d’une même année sont importants, plus le pourcentage de la charge fiscale est élevé. Il est donc judicieux de les échelonner sur plusieurs périodes fiscales, afin d’éviter le cumul.»
La mise en place d’un tel échelonnement est assez simple, car le système laisse une certaine marge de manœuvre pour faire ses retraits.
- Les avoirs du 3e pilier a peuvent être retirés jusqu’à cinq ans avant l’âge réglementaire de la retraite AVS (65 ans pour les hommes et 64 ans pour les femmes), mais également cinq ans après ces âges, si on continue à travailler (donc jusqu’à 70 ans pour un homme).
- Les comptes et les polices de libre passage peuvent être débloqués cinq ans avant l’âge de la retraite AVS. Et, dans la mesure où le règlement de la fondation de libre passage le permet, les retraits peuvent aussi être ajournés jusqu’à cinq ans après l’âge légal de la retraite, même si on ne travaille plus.
- Le capital du 2e pilier, en revanche, se perçoit toujours lors du départ à la retraite. A moins, bien sûr, de choisir l’option rente qui, elle, sera imposée, chaque année, comme un revenu.
Seule contrainte: le compte 3a et le libre passage se soldent, chacun, en totalité. Il est impossible de retirer l’argent petit à petit. Pendant la vie active, il faut donc veiller à répartir ses versements sur au moins deux comptes 3a différents.
Cette répartition est d’ailleurs presque outrancière chez Pierre et Marie, puisque nos lecteurs possèdent six comptes 3a (voir tableau), alors que trois à quatre suffisent amplement. Sachant qu’il ne leur reste plus que trois et quatre ans avant la retraite et qu’ils n’ont pas du tout envie de la repousser, il sera donc impossible de ne débloquer qu’un compte par année fiscale. De plus, Pierre envisage de percevoir 50% de sa caisse de pension en capital (681 000 fr.) et Marie 25% (74 000 fr.).«Dans cette situation, ils seront obligés de grouper certains retraits, échelonnés entre cette année et 2014», explique Roland Bron, qui a calculé l’impact fiscal des diverses variantes.
A titre de comparaison, la partie supérieure du tableau indique la charge fiscale d’un retrait massif de tous les avoirs lors de l’année du départ à la retraite, soit en 2013 pour Pierre et en 2014 pour Marie. En procédant de la sorte, ce couple, domicilié dans une commune vaudoise avec un coefficient de 66%, aurait à payer un total de quelque 107 000 fr. d’impôts.
En revanche, s’ils soldent un 3a en 2010, un autre en 2011, deux en 2012 et les deux derniers l’année de leur départ à la retraite, puis repoussent à 2018 le retrait de leur libre passage, la facture fiscale s’élève à moins de 95 000 fr., ce qui représente une économie notable de près de 12 000 fr.!
«En 2013 et 2014, vos lecteurs cumuleront, toutefois, à deux reprises l’imposition du retrait d’un 2e pilier et d’un 3e pilier, relève Roland Bron. Ce n’est pas idéal, mais tout de même plus avantageux que de retirer ces 3e piliers en même temps que d’autres épargnes 3a, car, ainsi, le couple pourra déduire 6566 fr. (montant maximum 2010) de cotisation au 3e pilier deux années supplémentaires. L’année du départ à la retraite, il est, en effet, possible de cotiser une dernière fois au 3a.»
Le libre passage de Pierre pourra, quant à lui, être retiré au dernier moment, soit cinq ans après son départ à la retraite, et générer ainsi encore quelques intérêts.
*Noms connus de la rédaction.