Tous les cantons passent au système fiscal postnumerando annuel: l’impôt sera désormais calculé sur la base des revenus de l’année en cours, et non plus sur ceux de l’année précédente (ou des deux années précédentes pour les cantons à taxation bisannuelle). Cette estimation «en direct» permet de tenir compte immédiatement des modifications de salaire ou de situation personnelle. Mais le changement de système implique aussi que pendant un an (ou deux), les revenus et les charges ordinaires échapperont à la taxation: c’est le fameux «trou fiscal».
Tout le monde continue néanmoins à payer ses impôts! Genevois, Jurassiens, Neuchâtelois et Fribourgeois le savent, puisqu’ils ont déjà connu la brèche (en 2000, ou 1999-2000 pour Fribourg). Vaudois et Valaisans s’en aperçoivent également, alors qu’ils se trouvent en pleine période de mutation («trou fiscal» en 2001 et 2002).
Or, dans les cantons qui connaissent une brèche de deux ans, les conséquences de l’harmonisation fiscale sont évidemment plus lourdes que pour les autres. En effet, leurs contribuables devront parfois attendre deux ans pour qu’une baisse de revenu soit prise en compte! La Confédération et les cantons ont cependant défini les «charges extraordinaires» qui seront quand même prises en compte durant la période de transition. Ils ont aussi déterminé les «reve-nus extraordinaires» qui n’échapperont en aucun cas à la taxation. Les grandes lignes sont les mêmes dans toute la Suisse romande.
• Les revenus extraordinaires:
Une augmentation de salaire, même importante, reste un revenu ordinaire, pour autant qu’elle soit durable. Sont considérés, en revanche, comme extraordinaires: les paiements retardés de salaire ou d’heures supplémentaires, les bonifications ou des dividendes exceptionnels, les gains de loterie, les prestations en capital (par exemple du 2e ou 3e pilier) etc. Pour un indépendant, le principe est le même: il échappera à la taxation extraordinaire s’il fait simplement de meilleures affaires pendant la brèche, mais pas s’il modifie ses méthodes comptables en omettant par exemple des provisions ou des amortissements.
• Les charges extraordinaires:
Elles sont plutôt limitées: les frais d’entretien d’immeuble qui dépassent le montant forfaitaire, les frais de maladie, d’accident et d’invalidité, les frais de perfectionnement et de reconversion professionnelle, les cotisations versées à des institutions de prévoyance professionnelle pour le rachat d’années de cotisation.
• Versements au 3e pilier A:
Ils ne sont pas considérés comme une charge extraordinaire. Les cotisations versées pendant la brèche ne seront jamais déductibles. Il peut donc valoir la peine de suspendre ses cotisations pendant cette période: ce raisonnement ne vaut toutefois que sur le plan fiscal.
Cependant, lors du versement du troisième pilier à l’échéance, Vaud et Valais ont prévu que la prestation sera imposée sous déduction des primes versées pendant la brèche.
• La taxation intermédiaire:
Elle n’est évidemment plus d’actualité pour les cantons qui ont achevé leur harmonisation: les impôts 2002 seront payés en fonction de la situation réelle en 2002.
Quant à Vaud et Valais, ils l’admettent pour 2001 et 2002 à des conditions très différentes. Vaud opère par exemple une taxation intermédiaire pour le début ou la cessation d’une activité lucrative pour une période de deux ans, mais pas pour une diminution du temps de travail. Le Valais tient compte d’une réduction de l’activité d’un tiers, pour autant que la réduction du salaire atteigne aussi un tiers.
Pour la période 2001 et 2002, le canton de Vaud a tout de même prévu une taxation intermédiaire en cas d’arrêt de travail d’une durée d’un an au minimum.
Même mesure en Valais, mais dès six mois d’interruption. Et dans les deux cantons, les règles habituelles sur la taxation intermédiaire restent applicables jusqu’à la fin de l’année (par exemple lors d’un divorce ou d’un veuvage).
Suzanne Pasquier
en pleine brèche
Les acomptes sont parfois à la hausse
Même pendant la brèche, il a fallu (et il faudra pour les Vaudois et Valaisans) remplir une déclaration d’impôt un peu «bidon», appelée notamment «bis» ou «a». Ceci afin de repérer les éventuels revenus ou charges extraordinaires donnant lieu à une taxation spéciale. Elle permet aussi aux autorités fiscales de rembourser l’impôt anticipé.
Certains contribuables n’ayant annoncé aucun gain extraordinaire ont néanmoins été surpris de voir leurs acomptes augmenter en pleine période de transition. Pour comprendre, il faut rentrer dans la logique du fisc, qui a modifié les acomptes en fonction de la déclaration «bidon» pour éviter une hausse trop brusque l’année d’après. Mais cette opération ne préjuge en rien de la taxation... A Neuchâtel et Genève, par exemple, la déclaration remplie au début de l’année en cours sera l’unique référence pour la taxation de l’année 2001.
Toutefois, avec l’harmonisation, il est désormais possible de demander une modification des acomptes en cas d’important changement d’activité.