C’est nickel! Une expression courante pour qualifier quelque chose d’impeccablement exécuté, de pur et propre. Pourtant, tout ce qui est nickel n’est pas forcément inoffensif: ce métal provoque des allergies de contact plus ou moins sévères.
Valérie Zorzie d’Essertines (VD) en a fait l’expérience: «Cela s’est déclaré il y a une dizaine d’années. J’ai toujours été un peu sensible aux oreilles depuis que je les ai faites percer. Mais un jour, je n’ai plus pu porter de colliers sans que cela provoque des démangeaisons, des plaques rouges, puis des petits boutons.»
Pas un mal inné
Or, même les articles signalés comme non allergènes provoquent désormais de telles réactions chez cette jeune femme. «Je me souviens très bien d’un beau collier fantaisie d’une grande marque que j’avais acheté pour un mariage. Je l’ai essayé la veille. A peine trois quarts d’heure après l’avoir mis, j’ai commencé à avoir des plaques rouges. Le lendemain, je suis allée faire la fête avec un foulard à la place du collier... Et depuis un an, je suis également allergique aux boutons de jeans, si bien que je dois coller un sparadrap à l’endroit où ils sont en contact avec ma peau.»
Cette allergie n’est donc pas innée. Elle survient lors d’un contact prolongé avec des objets ou des substances contenant du nickel, notamment en cas de blessures, de frottement répété et de transpiration. Des particules du métal pénètrent dans la peau. Elles activent le système immunitaire, qui déclenche le processus de sensibilisation. Progressivement, ce processus se propage dans tout l’organisme par le sang et les ganglions lymphatiques. Le tout accompagné de symptômes commençant par des démangeaisons et pouvant aller
jusqu’à un douloureux eczéma.
Une fois que le mal est fait, plus moyen d’y échapper: on est sensible au nickel à vie. Seul moyen de prévenir les réactions cutanées: limiter le contact avec ce métal (voir encadré) quasi incontournable. Il est en effet présent non seulement dans les bijoux, les bijoux fantaisies et les montures de lunettes, mais également dans la monnaie, les services de table, les poignées de porte, etc. Toutefois, de brefs contacts avec ces objets ne peuvent pas déclencher d’allergie, à moins d’être très fortement sensible au nickel.Aujourd’hui, le nickel est la première cause d’allergies de contact en Suisse. Elle touche 10% de la population. Les jeunes filles et femmes entre 15 et 30 ans sont les principales victimes: 20% d’entre elles font une réaction cutanée à ce métal, comme le rappelle le Forum des consommatrices alémaniques. Ce dernier élabore actuellement un projet de campagne de prévention de cette allergie, trop souvent méconnue. Objectif: informer le grand public, les fabricants et les commerçants suisses.
Pendant longtemps, cette allergie n’a touché que des professionnels en contact avec ce métal. Mais la commercialisation de bijoux bon marché, et contenant des couches très minces de métal précieux sur des sous-couches de nickel, a progressivment répandu le mal dans le grand public.
Ordonnance fédérale
Face à cette évolution, l’Union européenne a édicté des directives en 1994, pour limiter la quantité de nickel dans les objets d’emploi courant (pas encore en vigueur). La Suisse, elle, a édicté une ordonnance fédérale en 1995. Elle fixe une valeur limite (dégagement de 0,5 microgramme par cm2/semaine) à la quantité de nickel que peut dégager un objet en contact direct et prolongé avec la peau. Entrée en vigueur cet été, l’ordonnance interdit aussi tout usage de nickel dans les tiges introduites (à titre temporaire ou non) dans les oreilles ou d’autres parties du corps percées (piercing).
Mais sachez que les objets fabriqués avant l’application de cette réglementation peuvent encore être vendus jusqu’au 30 juin 1998. La prudence reste donc de mise, notamment à l’achat d’un bijou. Prudence conseillée également dans les pays lointains, paradis des bijoux artisanaux en toc.
Ellen Weigand
PRéVENTION
Test de détection
Pour être sûr d’acheter des bijoux, bracelets de montre et autres montures de lunettes qui ne dégagent pas de nickel, utilisez le «Test d’identification du nickel». Il est en vente libre en pharmacie (23,95 fr. pour 20 tests). Il suffit d’humecter l’un des bâtonnets ouatés spéciaux avec quelques gouttes de la solution-test et de frotter l’objet en question durant une quinzaine de secondes. Si le métal dégage du nickel, la ouate prend une coloration rose; sinon elle reste blanche. Et si un commerçant s’inquiète de vous voir traiter ainsi ses articles tout neufs, montrez-lui la notice d’emploi du test: le fabricant y assure que les objets testés restent intacts.
Enfin, sachez que les objets métalliques d’emploi courant contenant du nickel sont recouverts d’une couche protectrice, qui peut s’user avec le temps. Il est donc conseillé de répéter le test après un certain temps pour des objets relativement neufs.
E.W.