Pendant plusieurs semaines, des pages entières de publicité promettaient de faire «mincir la Suisse». Cela grâce à la capsule Jogun, vendue – sans autorisation – par la maison de vente par correspondance Ambassador Service AG à Wollerau (ZH). La capsule contient un petit cube à base de cellulose (voir photos ci-dessus), expliquait la réclame. Une fois avalé, il gonfle comme une éponge et remplit l’estomac. Ainsi, la sensation de faim disparaît pendant 6 à 8 heures. Résultats promis: des pertes de poids pouvant aller jusqu’à 10 kilos en 28 jours.
A première vue, le consommateur non averti et, surtout, mal dans ses kilos, pouvait avaler cette logique simpliste. Reste que la belle promesse s’est dégonflée: Rolf Lanz, directeur d’Ambassador, a retiré le Jogun du marché fin octobre.
Car, avant d’autoriser la vente de la capsule miracle, l’Office cantonal de contrôle des médicaments zurichois et l’OFSP (Office fédéral de la santé publique) ont exigé qu’Ambassador apporte les preuves scientifiques de l’effet amaigrissant et de l’absence de risques du Jogun pour la santé.
Pas de preuve
«L’entreprise nous a fourni diverses pièces, mais aucune qui apportait ces preuves, rapporte Rainer Voelksen, chef du service dispositifs médicaux de l’OFSP. Le
22 octobre dernier, Rolf Lanz, nous a écrit en prétendant avoir fourni toutes les pièces réclamées. Mais, en même temps, il annonçait qu’il retirait le Jogun de la vente et demandait à “collaborer” avec l’OFSP, afin de pouvoir le remettre sur le marché. Or, nous ne sommes en aucun cas des consultants!»
Il n’existe qu’un seul moyen pour que l’OFSP puisse envisager d’autoriser un jour le Jogun: le producteur doit effectuer un véritable essai clinique, ou prouver qu’il l’a déjà réalisé sur un certain nombre de personnes, avec un suivi, en analysant risques et absence de risques, notamment pour l’estomac.
Les autorités sanitaires jugent la publicité d’Ambassador trompeuse à un autre titre encore: «L’entreprise nous a fourni des documents indiquant clairement que Jogun ne doit pas être utilisé tout seul, mais pour améliorer un régime. Or, dans sa publicité, elle n’en fait nullement mention», déplore Rainer Voelksen.
L’entreprise n’en est d’ailleurs pas à son coup d’essai dans la tromperie. Il y a quatre mois à peine, elle vantait des gouttes au thé vert, censées faire disparaître cellulite et autres ventres replets. Mais elle n’a pas été inquiétée pour autant.
Pas étonnant, lorsqu’on sait que les amendes en la matière ne sont guère dissuasives. Car les quelque 500 à 2000 fr. d’amende qu’encourent les vendeurs de poudre à pirlimpinpin, ne sont que bagatelle à côté des dizaines de milliers de francs qu’ils encaissent grâce à la crédulité de gens mal dans leur peau. D’ailleurs, la Fédération romande des consommateurs, dans son mensuel J’achète mieux (no 277, novembre 1999), réclame une législation efficace contre ce genre d’abus.
Remboursez!
En attendant une loi appropriée, ceux qui se sont laissés tenter par les cures de Jogun vendues entre 59 fr. (60 gélules) et 206 fr. (240 gélules) peuvent demander à être remboursés. «Comme le produit a été retiré du marché et qu’il n’est pas efficace, il faut retourner les emballages, entamés ou non, et exiger le remboursement», note M. Voelksen.
Des acheteurs mécontents ont déjà suivi ce conseil de l’OFSP. Ce dont M. Lanz a eu le culot de se plaindre auprès de M. Voelksen... Aurait-il oublié que, dans sa publicité, il proposait bel et bien aux personnes intéressées de «tester» l’offre?
Ellen Weigand