Delphine* et Daniel* ont sursauté lorsqu’ils ont reçu un courrier leur annonçant un loyer majoré de 189 fr. par mois dès le 1er octobre 2024. Les avis d’augmentations liés aux relèvements successifs du taux hypothécaire ont, hélas, largement arrosé les locataires de toute la Suisse. Les taux sont passés de 1.25% à 1.5% en juin 2023 et de 1.5% à 1.75% en décembre de la même année. Avec, à la clé, une facture parfois salée.
Bailleurs peu motivés à donner des chiffres
Notre couple de lecteurs vaudois a heureusement eu le bon réflexe. Un calcul de rendement – dont le résultat aurait pu invalider toute l’augmentation – était possible dans leur cas (voir encadré). Ils ont suivi les conseils de notre Service juridique et saisi la Commission de conciliation en matière de bail à loyer. Bien leur en a pris: Delphine* et Daniel* n’ont même pas eu besoin d’attendre une audience. Avisé de leur démarche, le bailleur a purement et simplement annulé leur hausse.
Bonne nouvelle également pour cet autre couple en Suisse romande qui a, lui aussi, exigé un calcul de rendement. Là encore: le bailleur a agi avant l’audience, cette fois pour négocier. Sur les 119 fr. d’augmentation mensuelle, ils ne paieront finalement que 20 fr. Selon nos lecteurs, c’est clairement leur requête auprès de la Commission qui explique ce succès. «Le propriétaire n’avait sûrement pas envie de sortir tous ses comptes devant l’Autorité», avance l’un d’eux.
Frais d’exploitation presque toujours déduits
Les locataires qui saisissent la justice obtiennent presque systématiquement une réduction de leur augmentation, même lorsqu’un calcul de rendement n’est pas possible. De nombreuses régies alourdissent en effet la note en ajoutant des frais d’exploitation forfaitaires (voir encadré).
Elles les négocient presque toujours en cas de contestation. Le locataire a en effet le droit de demander un calcul selon les frais effectifs qui implique un travail plus conséquent pour les régies. Béa* a ainsi économisé 16 fr. par mois, Francine* près de 20 fr. et Denis* 47 fr.
Protégés trois ans contre les congés
Locataire d’un petit commerce dans la région genevoise, Sandra* a également eu raison de contester sa hausse. Dans son cas, son bailleur n’a pas seulement déduit 23 fr. par mois de «charges d’exploitation». Il a aussi reporté toute l’augmentation restante (189 fr. par mois) de près d’un an. Notre Service juridique avait en effet remarqué qu’elle était notifiée pour la mauvaise échéance. N’hésitez donc pas à agir pour faire valoir vos droits!
Attention: le délai pour saisir la Commission est de trente jours seulement dès la notification de l’avis de majoration. La procédure est gratuite et comporte peu de risques. Les locataires sont protégés contre les congés ordinaires pendant les trois ans qui suivent la clôture du litige, s’ils ont obtenu – pour une grande partie – gain de cause, ou s’ils ont passé un accord avec le bailleur, même hors cadre judiciaire.
*prénoms modifiés
Silvia Diaz
Quelle est la juste hausse?
- Chaque quart de point d’augmentation du taux hypothécaire (appliqué sur un taux au-dessous de 5%) permet d’augmenter le loyer de 3%. Exemple: La variation du taux de 1.25% à 1.75% permet une hausse théorique possible de 6% au moins.
- Par ailleurs, le bailleur a le droit d’y ajouter encore 40% de la variation de l’indice des prix à la consommation (IPC) depuis la dernière fixation du loyer.
- Le bailleur peut aussi ajouter l’évolution de ses frais d’exploitation – désignés parfois comme «charges d’exploitation» ou «hausses des coûts» – et d’éventuels travaux à plus-value.
- Le locataire a le droit de vérifier tous les chiffres avancés par le bailleur.
Conseil: Même si elle est mathématiquement correcte, une hausse peut être contestée malgré tout lorsque le bailleur obtient un rendement abusif sur les fonds propres qu’il a investis dans le logement. Une telle vérification – complexe car elle requiert l’analyse de données comptables en main du propriétaire – n’est malheureusement pas toujours possible. L’immeuble doit avoir été acquis ou construit il y a moins de trente ans. Les locataires peuvent savoir si tel est le cas en contactant le registre foncier de leur région.