«Si on n’apprend pas à se débrouiller, nous deviendrons les illettrés du XXIe siècle!» Laurence ne mâche pas ses mots. Avec l’âge, elle a davantage besoin d’être rassurée et c’est une fidèle du Cyberthé, l’atelier informatique proposé, chaque mercredi, à La Chaux-de-Fonds.
Cet après-midi, elle est venue mettre de l’ordre dans son ordinateur portable, une tâche ingrate qu’elle repousse depuis quelque temps. La déclaration d’impôt en ligne n’a plus de secret pour elle et la septuagénaire dépanne, désormais, ses amies par téléphone quand elles sont bloquées. Son ancienne collègue, Marie, a apporté son iPad pour retrouver les photos du mariage de son neveu en Irlande. «Depuis que je viens ici, j’ai fait beaucoup de progrès!»
Ivano Scandurra, animateur des Cyberthés, propose son aide à chacun. Gérard n’arrivait plus à ouvrir ses mails après une mise à jour de la messagerie, mais tout est réglé. Quant à Jacques, il apprivoise les subtilités de son nouveau PC. L’octogénaire manie les applications courantes, les paiements et la déclaration en ligne. En fin d’après-midi, tout le monde se rassemble autour d’une tasse de thé.
Répondre à la demande
Dans le quartier des Pâquis, à Genève, une initiation à Google Maps est programmée ce matin. Spécialement dédiée aux manipulations sur iPhone. Le cours est proposé par Cité Seniors – une structure de la Ville. Et affiche presque complet: très concentrés, les huit participants s’entraînent à entrer une destination et à repérer les bouchons indiqués, en temps réel. Cent questions surgissent. Au passage, la formatrice, Pierrette Frily, donne quelques indications sur les réseaux non sécurisés, avec quelques règles de prudence. Elle explique comment gérer le centre de contrôle Apple et augmenter la taille du texte à l’écran.
Rester dans le coup en informatique, cela ne va pas de soi. Selon une étude de Pro Senectute, trois aînés sur quatre souhaiteraient recevoir de l’aide. Plus du tiers émettent des craintes quant à la sécurité de leurs données. Quand on utilise un smartphone, une tablette ou un ordinateur portable, il faut sans cesse improviser. Comment réagir quand l’appareil propose une mise à jour? Les générations qui ont appris l’informatique sur le tard se sentent démunies quand il faut réintroduire un mot de passe ou quand un fichier disparaît.
Dans tous les ateliers, on aide les participants à trouver eux-mêmes la solution au problème. «Il n’y a pas de sotte question», insiste Ivano Scandurra. «Une fois rentré chez soi, on est mieux armé pour faire face aux imprévus.» «Quand on n’a pas grandi avec un smartphone dans la poche, on a peur de se tromper», renchérit Pierrette Frily, formatrice à Genève. «Si on est bloqué, on ferme l’application et on reprend tout de zéro. L’important, c’est d’oser essayer et de vaincre la crainte de faire faux!»
Claire Houriet Rime
La convivialité au rendez-vous
Le cliché d’aînés allergiques à tous les écrans, sauf à celui du téléviseur, ne correspond plus à la réalité. Selon Pro Senectute, l’utilisation de Internet sur smartphone a doublé chez les personnes âgées de 65 ans et plus, entre 2015 et 2020. Près de neuf septuagénaires sur dix surfent régulièrement sur la Toile et ce n’est qu’à partir de 85 ans que la majorité des seniors y renoncent.
Aucun organisme ne centralise les formations en Suisse romande, mais Pro Senectute (prosenectute.ch) est très actif dans ce domaine. A Neuchâtel et à La Chaux-de-Fonds, on peut s’inscrire à des Cyberthés (6 fr. pour 2 heures ou 100 fr. par an) ou des Cyberlunchs (15 fr.). Un dépannage à domicile est également proposé. A Delémont, c’est le Club des aînés en informatique (caid.ch) qui anime une permanence tous les lundis matin (50 fr. par an).
A Sion, Pro Senectute organise chaque mois un échange avec des adolescents. Les Vaudois peuvent participer à des ateliers gratuits, consulter une permanence ou prendre un cours privé à domicile (90 fr. + 1 fr. / km). Dans le canton de Fribourg, on peut s’inscrire à un cours privé (50 fr., 70 fr. à domicile). L’antenne locale de la Croix-Rouge organise gratuitement tous les mardis soir, à Fribourg et à Bulle, une permanence animée par des jeunes de moins de 30 ans.
A Genève, Cité Seniors affiche un riche programme d’activités dans ses locaux. Leur prix varie entre 20 fr. pour une matinée et 60 fr. pour plusieurs demi-journées. On peut prolonger ces cours lors de cafés gratuits en apportant son smartphone ou sa tablette. Dans cinq Espaces de quartier équipés d’ordinateurs connectés, des bénévoles accueillent, en outre, gratuitement les habitants pour apprivoiser de nouvelles fonctionnalités et les aider à mettre en pratique ce qu’ils ont retenu des cours.
