En Suisse, la teneur en nickel des bijoux est limitée depuis juin 1998. Or, des contrôles effectués dans plusieurs cantons ont révélé que tous ceux qui pratiquent le piercing ne respectent pas ces limites. Elles sont même parfois largement dépassées.
Selon les prescriptions en vigueur, les bijoux en contact prolongé avec la peau ne doivent pas dégager plus de 0,5 microgramme de nickel par cm2/semaine. Pour les piercings, dont les anneaux et tiges restent dans la peau jusqu’à la guérison, les normes sont encore plus sévères. Comme la peau blessée libère beaucoup plus de sels de nickel, le taux de ce métal ne peut pas dépasser 0,05%.
Les contrôles impromptus effectués l’an passé par différents laboratoires cantonaux livrent des résultats effrayants. Dans le canton de Berne, par exemple, deux tiers des tests ont révélé une teneur de 7 à 9% de nickel dans les tiges destinées aux premiers piercings au lieu des 0,05% autorisés.
L’acier surtout est très contesté pour un premier piercing. En effet, le métal connu sous le nom d’acier médical peut contenir, selon les alliages, de 10 à 15% de nickel. Les chimistes cantonaux ont donc ordonné l’utilisation de titane pour les premiers piercings. Quoique plus cher et moins brillant que l’acier, ce métal blanc ne contient pratiquement pas de nickel.
Piercing risqué
«Lorsqu’on est allergique au nickel, c’est en principe pour la vie», avertit le dermatologue zurichois Andrea Cadotsch. Une sensibilisation qui provient le plus fréquemment de boucles d’oreilles, de bagues, de montres ou de boutons de jeans contenant du nickel. Ceux-ci provoquent des rougeurs, des démangeaisons, des petites ampoules, ou – plus grave – de l’eczéma. Des symptômes qui n’apparaissent souvent pour la première fois que des années après le premier contact.
Quant au piercing, les guérisons sont lentes et douloureuses, voire problématiques (de 3 à 9 mois pour le nombril). Les cas d’infection grave et de cicatrisation proliférante sont bien connus des dermatologues, de même que les réactions au corps étranger (inflammation, nodule). Par ailleurs, les dentistes mettent en garde contre les piercings dans le menton, les lèvres ou la bouche. Les personnes se faisant percer la langue peuvent s’attendre à des gonflements, à une salivation accrue ainsi qu’à des problèmes d’élocution. De plus, le corps étranger dans la bouche peut endommager la gencive et les dents.
Formation à améliorer
Quiconque veut se faire percer une partie du corps agit sous sa propre responsabilité. En effet, en dehors des valeurs limites de nickel, il n’existe aucune directive au niveau fédéral ou cantonal pour cette mode en plein boum. Ce que déplore le médecin Heiner Ziegler, lui-même pierceur. A son avis, la branche devrait se doter de standards professionnels éthiques et réclamer une formation solide pour l’exercice du métier. Car sans un minimum de connaissances en anatomie, désinfection, stérilisation, métallographie et allergies, personne ne devrait «venir fourrager dans le corps humain».
A lire: «Piercing. Rites ethniques. Pratique moderne», Véronique Zbinden, Editions Favre, Lausanne, 1997.
marche à suivre
Se faire percer sans risque
• Que vous souhaitiez vous faire percer les oreilles ou une autre partie du corps, choisissez un prestataire qui utilise des bijoux sans nickel et qui travaille dans des conditions d’hygiène irréprochables (aiguilles jetables, dispositif de stérilisation). Demandez à votre médecin si le remède fourni pour le soin de la plaie est approprié. Pour les piercings sur des mineurs, les commerçants sérieux demandent l’accord des parents.
• Ne portez que des tiges sans nickel jusqu’à ce que le trou soit guéri. Le titane, le niobium, le Téflon ou l’Optofil conviennent aux premiers piercings. Sachez que celui qui rend une autre personne allergique en lui insérant une pointe contenant du nickel est responsable du dommage causé. En cas de lésions corporelles graves, il est même punissable.
• Les bijoux portés sur la peau ne doivent pas dégager de nickel non plus. Un test disponible en pharmacie pour 23,95 fr. (20 applications) permet de le constater aisément (pas utilisable pour les premiers piercings avec acier médical). Pourtant, selon une enquête menée en 1997 dans le cadre de la prévention contre les allergies au nickel, une bijouterie sur cinq seulement l’utilise. La plupart des commerçants s’en remettent à la composition donnée par le fabricant. En espérant que celle-ci soit fiable.