Depuis le temps, on s’est habitué au télémarketing, cette nouvelle méthode de vente par téléphone. Livres, casseroles, disques, abonnements à des opérateurs de téléphonie: la gamme des produits distribués par ce biais n’est pas limitée. Mais, récemment, cette technique s’est ouverte à un nouveau domaine: l’aide caritative. Or, s’il est simple de refuser une vente par téléphone, il est plus difficile de ne pas se laisser émouvoir par l’évocation de maladies infantiles rares. Même si on n’a pas la moindre idée de qui se trouve à l’autre bout du fil ni de quelles maladies il s’agit.
Ainsi, plusieurs de nos lecteurs ont été contactés par deux associations, qui récoltent des dons pour la même cause, par téléphone: Solidarité Enfance, à Bevaix, et Enfance et Maladies Orphelines, à Monthey. La démarche a surpris, d’autant que ces organismes ne jouissent pas d’une renommée nationale, ni même romande.
Très sagement, nos lecteurs n’ont pas voulu s’engager et ont demandé de plus amples informations sur l’association qui les contactait. Et là, surprise: non seulement la lettre reçue par ces lecteurs fait mention, en gras, d’une promesse de don de leur part, mais de plus ils ont été relancés par la suite pour savoir pourquoi ils n’avaient pas encore effectué de versement! Des méthodes qui ont de quoi surprendre dans le milieu habituellement très discret de l’entraide.
Curieuses similitudes
Qui plus est, nous nous sommes aperçus que les deux associations offraient, dans les buts poursuivis, dans la présentation de leur courrier ainsi que dans leurs statuts, de curieuses similitudes. «Effectivement, répond Pascal Ducommun, président de l’Association Solidarité Enfance. Il y a du reste une procédure en cours contre l’autre association, créée postérieurement à la nôtre et qui nous cause du tort. D’ailleurs, pour éviter tout amalgame auprès du public, toutes les activités de Solidarité Enfance sont actuellement en stand-by.»
Contrat rompu
Le président reconnaît toutefois qu’il a bien eu, l’an dernier, des relations avec les responsables de l’association valaisanne, qui n’existait pas encore à ce moment-là. «En fait, j’avais mandaté une société de télémarketing pour procéder à la recherche de dons, mais c’était trop coûteux et j’ai rompu le contrat.» Or, ce sont justement les membres du personnel de cette société de télémarketing qui ont fondé l’autre association.
Du côté de Monthey, le son de cloche est tout autre: «Dans le cadre de notre mandat de télémarketing pour Solidarité Enfance, nous avons été confrontés en direct à des familles dont les enfants sont victimes de maladies génétiques rares. Comme nous avions l’impression que cette association n’était pas sérieuse, nous avons tout stoppé. Mais nous ne pouvions pas laisser tomber les familles et la cause qui nous avaient touchés», explique Paul Perriard, patron de la société de télémarketing montheysanne.
Du coup, les membres de la famille Perriard, ainsi que les employés de leur société de télémarketing et quelques autres personnes, ont décidé de fonder leur propre association, au début de cette année. Et, selon le principe déjà éprouvé, la recherche de dons est faite par leur société de télémarketing.
Aujourd’hui, les deux associations se tournent ostensiblement le dos et se mettent en cause mutuellement. Cependant, même si l’accès
à leurs comptes respectifs nous a été refusé, il semble que, tant à Bevaix qu’à Monthey, des familles bénéficient effectivement d’un soutien financier.
Méthodes agressives
Il n’empêche: la méthode de récolte des dons, même s’il s’avérait qu’elle n’est pas sujette à caution, ne laisse pas que des bons souvenirs aux personnes contactées. Entre des courriers particulièrement incitatifs et des relances jugées agressives, le donateur potentiel peut se sentir malmené. Or, chacun est libre de décider s’il veut faire un don, quand et à qui. C’est ce que souligne la Fondation ZEWO (lire encadré), dont les deux associations en cause ne font pas partie.
Jacqueline Favez
obtenir des informations
Donner en toute connaissance de cause
La Fondation ZEWO* à Zurich est spécialisée dans la certification des organismes d’utilité publique récoltant des dons en Suisse. Elle fournit gratuitement des informations sur les associations, y compris celles qui ne portent pas le label ZEWO.
Cet organisme dispense également des conseils pratiques à l’attention des donateurs, notamment:
• S’informer au préalable sur les institutions qu’on veut aider par un don et leurs projets en deman-dant les rapports annuels d’activité et les comptes annuels.
• Choisir d’aider un nombre limité d’œuvres, plutôt que disperser les moyens disponibles. Et opter pour une aide à long terme, ce qui permet de suivre de façon plus intensive les activités des organisations soutenues.
En devenant donateur d’une œuvre caritative portant le label ZEWO, dont les conditions d’obtention sont très strictes, on est pratiquement sûr que le don sera utilisé à bon escient. Toutefois, il existe de nombreuses associations qui n’ont pas souscrit à ce label et qui sont néanmoins parfaitement sérieuses.
En général, l’obtention des renseignements demandés, notamment des comptes, doit pouvoir aider le donateur à se faire une idée des actions menées et de l’utilisation qui sera faite de son appui financier.
* Lägernstrasse 27, 8037 Zurich,
tél. 01 366 99 55, fax 01 366 99 50, www.zewo.ch