Le commerce des noms de domaine Internet va bon train. Exemple célèbre: celui de l’entreprise américaine AltaVista Technology Inc qui vient de vendre le nom altavista.com à Digital/Compaq pour la coquette somme de 3 millions de dollars!
Patrick Schranz, lecteur de Bon à Savoir a, lui, reçu une offre «spéciale» du fournisseur d’accès Cadiware de Riehen: le développement d’un site Internet professionnel d’une trentaine de pages et le transfert «gratuit» du nom de domaine schranz.ch pour 6000 francs. «C’est de la pure spéculation, déplore M. Schranz. Ce genre d’entreprises achète des centaines de noms pour réaliser un bon bénéfice. Il y a certainement des particuliers, ignorant encore comment fonctionne Internet, qui marchent et veulent absolument ce nom de domaine précis.»
Beat Fehr, responsable de Cadiware admet miser sur le côté affectif des clients en leur proposant leur propre nom en même temps que la création d’un site sur Internet. «Vu le nombre d’entreprises offrant des solutions Internet complètes, nous cherchons à nous distinguer en proposant aussi les noms de domaine. Quant à nos tarifs, ils sont équivalents, voire plus avantageux que ceux d’autres providers professionnels.»
Premier arrivé, premier servi
Stéphane Perino, directeur commercial de l’Agence Virtuelle à Genève, société internationale pour les noms de domaine, la programmation, l’hébergement de sites Internet, etc., estime que proposer un nom déjà enregistré avec une homepage n’est qu’une excuse pour vendre le nom de domaine plus cher que ce qu’il vaut en réalité. «Mais c’est légal. Le premier arrivé reste le premier servi dans
de nombreux pays dont la Suisse.»
Cadiware vend aussi le seul nom de domaine réservé pour 300 à 1000 fr. Selon le principe: plus il y a de gens du même nom, plus cela coûte. «C’est pas cher quand on sait que le nom de meyer.ch est proposé pour 80000 francs», estime M. Fehr, en référence au site domainmarket.ch où l’on peut acheter et vendre des noms de domaine. Mais de l’avis de Stéphane Perino, «on ne devrait jamais payer plus de 300 à 500 francs pour le seul nom de domaine». Et de rappeler qu’on peut enregistrer soi-même une telle adresse à moindre frais, p.ex. chez chez Switch* (80 fr. d’enregistrement et 45 fr. de taxe annuelle pour les noms en .ch).
Clients potentiels
A ce jour, la société alémanique dit avoir enregistré 100 à 150 domaines en .ch. Sans préciser s’il s’agit de noms de famille très répandus en Suisse. Cependant, une petite recherche a montré que Cadiware a réservé des patronymes romands tels Dumont, Duoraz, Clement, Gaillard et Chevalley. Or, on compte 316 Dumont répertoriés dans l’annuaire électronique Swisscom, 361 Dupraz, 1029 Clement (y compris les Clément), 1008 Gaillard et 997 Chevalley! Et sur les plus de 700 Schranz de Suisse, notre lecteur n’est certainement pas seul à avoir reçu l’offre. Un joli réservoir de clients potentiels donc, dont l’un ou l’autre pourrait bien céder à la proposition de Cadiware afin d’obtenir son nom de domaine rien qu’à lui.
«Nous ne sommes pas les seuls à enregistrer plusieurs centaines de noms», note M. Fehr. A juste titre. Cependant, si le procédé est courant et de bonne guerre sur le marché grandissant d’Internet, le consommateur a toujours le choix: «Si son nom en .ch est déjà enregistré par quelqu’un d’autre, il peut l’enregistrer différemment, par exemple avec le suffixe .net», conseille M. Perino. On peut aussi simplement rajouter une lettre, telle l’initiale de son prénom.
Par ailleurs, pour avoir la meilleure offre pour la création d’un site Internet, mieux vaut demander un devis à plusieurs fournisseurs, au lieu de souscrire spontanément à ce genre d’offres. Et tant pis si on n’est pas le Clement ou le Dupraz à avoir pour adresse Internet son seul nom de famille.
Ellen Weigand
*http://www.switch.ch, site de l’organisme officiel chargé de l’enregistrement des noms en Suisse.