Au rayon des produits après-rasage, les fabricants ont tout loisir de faire mousser leur imagination. Ils profitent d’une législation très souple pour multiplier les appellations et prêter à ces after-shave, baumes et autres lotions de nombreuses qualités. Tour à tour «revitalisants», «tonifiants» ou «relaxants», la plupart agissent dans tous les cas pour que le menton rasé ne tire pas et n’irrite pas. Ils contiennent de la glycérine, de l’huile naturelle et des graisses, qui fixent l’humidité et la restituent à la peau malmenée, tout en la parfumant d’une note plus ou moins prononcée.
Mais contiennent-ils des substances potentiellement nocives (lire encadré «En détail») pour accomplir leur délicate mission? Afin de lever le voile sur cette question, nous avons confié au laboratoire douze baumes après-rasage, que nous avons achetés chez les grands distributeurs et dans des commerces spécialisés, selon une fourchette de prix allant de 3 fr. à 61 fr.
Des résultats positifs
Bonne surprise: trois quarts des baumes s’en sortent avec la mention «très bon», puisqu’ils ne contiennent aucune des substances nocives traquées par nos experts (voir tableau). Notre test démontre aussi que le prix n’est pas un gage de qualité. En effet, celui des produits décrochant la note maximale varie fortement: de 2.99 fr. pour le G. Bellini (Lidl) à 54 fr. le baume Annemarie Börlind (Coop City).
Les moins bons
Le plus cher (Biotherm, à 61 fr. /100 ml) n’obtient que la mention «bon». Des frottis ont décelé sur ce baume la présence d’un composé de musc polycyclique, susceptible d’agir sur le système hormonal. Deux produits ont en revanche obtenu la mention «peu satisfaisant». Il s’agit du baume Gillette, dans lequel le laboratoire a décelé du formaldéhyde, une substance allergène. Il en va de même du Denim, qui contient, outre la présence de formaldéhyde, deux composés de muscs polycycliques.
Interpellés, ni Procter & Gamble Suisse (Gillette) ni la société Promena AG, qui distribue la marque Denim en Suisse, n’ont voulu s’exprimer sur les résultats de notre test.
Gertrud Rall / cap
BONUS WEB: conseils liés aux problèmes de rasage
EN DÉTAIL
Les critères du test
Nous avons confié l’analyse des douze baumes après-rasage au Laboratoire Eurofins, à Hambourg, en Allemagne, afin de rechercher les substances indésirables suivantes.
- Formaldéhyde – Cet agent conservateur est absorbé par la peau ou les voies respiratoires, qui peuvent être affectées. Il est toléré en cosmétique jusqu’à une concentration de 2000 mg/kg. Inhalée, cette substance allergène peut provoquer le cancer.
- Parfums allergènes – 26 parfums hautement allergènes doivent être déclarés dans la composition des cosmétiques depuis 2007. Ils sont classés en quatre catégories en fonction de leur agressivité (de A à D).
Un seul produit du test appartient à la catégorie B (HMPCC). Les parfums du groupe C et D n’ont pas entraîné une pénalité dans l’appréciation globale. - Composés de muscs polycycliques – Ils s’accumulent dans le corps humain ainsi que dans l’environnement et se décomposent mal. Certaines substances peuvent en outre perturber le patrimoine héréditaire, le métabolisme cellulaire et influencer le taux hormonal. La loi ne fixe pourtant pas de limites maximales.
ACHETER FUTÉ
Méfiez-vous des appellations: lisez les étiquettes!
After-shave, baume, crème, gel, fluide, émulsion, lotion, eau de rasage, etc. L’étendue des appellations a de quoi rendre perplexe: «Il n’existe aucune disposition légale sur la façon dont chacun de ces produits doit être désigné», confirme Sabina Helfer, de l’Office fédéral de la santé. Ni l’apparence ni la fluidité du produit ne permettent donc de tirer des conclusions sur leur teneur en alcool. En clair, les publicitaires ont carte blanche pour doper les ventes avec des expressions très imagées et prometteuses.
Le terme «baume» après-rasage, qui suggère déjà un effet particulièrement relaxant et calmant, en est un bon exemple. A l’inverse, les adjectifs «revitalisant», «rafraîchissant» ou «tonifiant» sont choisis pour traduire la sensation due à l’évaporation de l’alcool. Au final, quel que soit son choix (produit avec ou sans alcool, notamment), le consommateur avisé ferait mieux de se fier à la composition du produit. Elle seule permet de ne pas se laisser induire en erreur par le nom parfois fantaisiste du produit.