S’il est un médicament difficile à éviter en ce moment, c’est bien la pilule Alli. Bien placés sur les présentoirs des pharmacies, ces kits minceur en vente libre séduisent le quidam par leur look attrayant et leur promesse alléchante: «Pour 2 kilos perdus, Alli vous en fera perdre un troisième»! Mais à quel prix?
Comme le Xenical, son homologue plus concentré vendu sur ordonnance, Alli développe ses effets en provoquant une réaction immédiate du corps face aux graisses consommées: flatulences grasses, selles huileuses, diarrhées et douleurs abdominales sont le lot de ceux qui, sous traitement, consomment des graisses, et cela quel qu’en soit l’origine (animale ou végétale). Le fabricant GlaxoSmithKline ne le nie pas, puisque sa brochure induit que ces effets ont une vertu éducative car ils permettent à l’ignorant de repérer les aliments gras et indiquent au gourmand son abus. Et d’ajouter que ces gélules sont destinées à un public précis: les personnes proches de l’obésité, dont l’indice de masse corporelle (IMC – lire encadré) est supérieur ou égal à 28.
Les risques
Le programme Alli comprend, outre sa fameuse pilule bleue, un journal de bord dans lequel il convient de lister l’ensemble des calories et des graisses ingurgitées, sans omettre les exercices physiques. Selon Carmen Chuard, de l’Association suisse des diététiciens, cette exigence peut provoquer un hypercontrôle et ainsi engendrer des troubles du comportement alimentaire, tels que la boulimie ou l’anorexie. A ces risques d’ordre psychologique s’ajoutent des ennuis physiologiques: complications intestinales liées aux diarrhées chroniques, efficacité réduite de la pilule contraceptive et carences en vitamines liposolubles A, D, E et K induites par une élimination trop rapide des graisses. Pour y remédier, le fabricant recommande d’ailleurs une prise de compléments alimentaires quotidienne.
Les lacunes
Ciblant ses effets exclusivement sur les graisses, Alli n’agit pas sur l’absorption des sucres ou de l’alcool et ne modifie pas le comportement alimentaire, le plus souvent à l’origine de la prise de poids.
Selon Carmen Chuard, chaque régime requiert des moyens et des conseils personnalisés, puisque les besoins énergétiques diffèrent en raison du sexe, de l’âge, du poids, de la taille et de l’activité physique. Elle constate, par ailleurs, que les besoins énergétiques recommandés par le programme Alli (entre 1200 et 1400 kcal par jour) sont insuffisants pour la majeure partie des individus, qui ne manqueront pas de reprendre du poids par la suite.
Prix excessif
Outre les effets désagréables du traitement et l’impact de l’effet yoyo lié au retour à l’alimentation habituelle, le traitement Alli a son prix: à raison de trois gélules par jour, une à chaque repas, la cure de six mois, compléments alimentaires non inclus, atteint 836 fr.!
En dépit de ces éléments dissuasifs, la pilule antigras reste fortement demandée. Sa commercialisation en vente libre suscite la controverse dans les pays de l’Union européenne, principalement en Grande-Bretagne où elle est délivrée à volonté. Notre pointage en Suisse romande a heureusement démontré que les pharmaciens ne vendent le traitement qu’à des personnes qui présentent un embonpoint évident, et cela seulement après un long entretien.
Jade Ruppen
A lire: «Mince alors! Comment gérer son poids».
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