Hormis l’ascenseur, les escaliers roulants sont l’un des moyens les plus utilisés (2500 en Suisse) pour franchir des dénivellations. Ils sont considérés comme extrêmement sûrs, même si on ne peut exclure des petits accidents dépassant rarement la blessure légère.
Ces accidents concernent surtout les enfants jouant sur les escaliers et les personnes âgées souffrant de troubles physiques et psychologiques (peur). Côté enfant, pas grand chose à faire, sinon leur enseigner le bon comportement. Il en va en revanche tout autrement des personnes âgées: une récente étude (*) du Bureau de prévention des accidents (BPA) prouve très clairement qu’on peut considérablement améliorer leur sécurité en équipant les marches de marquages adéquats.
Recommandation
L’an dernier, le BPA a sollicité la participation de plusieurs centaines de personnes âgées pour donner leur avis et tester plusieurs types d’escaliers roulants. Le résultat est sans appel: les escaliers dont les bords des marches sont marqués avec de la peinture jaune et équipés d’un éclairage entre les marches rassurent les personnes âgées et augmentent leur sécurité.
Ni une ni deux, le directeur du BPA envoie donc – en date du 17 février 1998 – une copie de l’étude avec une lettre personnelle recommandant le marquage de tous les escaliers roulants à une centaine d’entreprises, dont la Coop, les CFF et la maison Schindler, l’un des plus gros constructeurs d’escaliers roulants en Suisse.
Pourquoi citer trois entreprises parmi une centaine d’autres? Parce que depuis la sortie de cette étude, notre rédaction a été frappée de voir que ni les escaliers roulants de la nouvelle Coop de la rue Caroline, à Lausanne, ni ceux de la gare de cette même ville n’avaient été marqués. Pourtant, ils ont tous deux été mis en fonction après la sortie de cette étude.
Les doutes de Schindler
Malaise aux CFF, même si les espaces entre les marches sont éclairés: «Nous n’avons pas eu connaissance de cette étude, explique Jacques Zulauf, porte-parole de l’arrondissement de Lausanne. Ce genre de recommandations nous est généralement transmis par notre section auprès de la CNA. Mais je peux vous assurer que dès que ce sera le cas, nous procéderons le plus rapidement possible au marquage.» A la direction de Coop Vaud aussi, personne n’a entendu parler de l’étude. On assure cependant que la société fait tout ce qu’elle peut pour les handicapés, et que «si le rapport est valable, il faudra en tenir compte». Mais on renvoie la balle dans le camp de la maison Schindler, constructeur des escaliers.
Or, il ne semble pas qu’il y ait grand-chose à attendre de ce côté-là. Daniel Bächtold, porte-parole de Schindler, le dit sans détour: «Il est absolument impossible de répondre à toutes les recommandations que nous recevons. Nous nous en tenons donc à ce qui est obligatoire. D’ailleurs, selon notre expérience, ces marquages ne sont pas aussi efficaces que le BPA le prétend. Nous les offrons cependant à nos clients, moyennant un supplément d’environ 5000 fr. Et surtout, nous recommandons toujours l’installation parallèle d’un ascenseur, entre autres pour les personnes âgées.»
Et voilà... Et comme le BPA ne peut faire que des recommandations mais n’a aucun pouvoir décisionnel, les choses en resteront vraisemblablement là. C’est désolant, et parler de gâchis n’est pas exagéré.
Christian Chevrolet
* Sicherheit von Senioren an Rolltreppen, BPA, Berne, 1997