La pilule, ça suffit! Assumez votre sexualité, débarrassez-vous de ces artifices! C’est par ces termes belliqueux que débute la lettre de la Fondation Sympto Therm, glissée dans les boîtes aux lettres romandes.
Suit un mélange d’accusations contre les industries pharmaceutiques et les médecins, et de glorification de l’«écologie naturelle de la méthode sympto-thermique». Bref, un patchwork d’informations éveillant davantage la méfiance que l’intérêt. «Nous avons envoyé 5000 lettres à des femmes entre 18 et 35 ans, mais avons reçu à peine 10 réponses positives et beaucoup d’e-mails d’insultes», admet le théologien, philosophe et docteur en psychologie Harri Wettstein, secrétaire de la fondation.
Le problème n’est pas tant la méthode sympto-thermique (voir encadré), basée sur des recherches sérieuses. Mais la manière maladroite, voire agressive, avec laquelle elle est présentée dans la lettre.
Formation obligatoire
La Fondation Sympto Therm certifie que, grâce à ce procédé de régulation naturelle des naissances, la femme peut déterminer précisément ses jours fertiles ou infertiles. Pour aider les débutantes,
elle propose un manuel, «L’art de vivre sa fertilité» (24 fr.), des cours d’initiation (150 fr./90 min.) et un
thermomètre électronique (225 fr.) qui mémorise les températures et indique les jours fertiles et infertiles.
«Moyennant une connaissance de base et une formation sérieuse, le couple gère ensuite parfaitement sa vie sexuelle. En outre, la méthode favorise le dialogue», souligne Christine Bourgeois, fondatrice de Sympto Therm et art-thérapeute.
Opinions divergentes
Afin de convaincre un maximum de couples, les promoteurs de la méthode jouent sur deux plans. D’un côté, ils affirment qu’un «désir inconscient d’enfant» réside en chaque femme et leur site internet regorge d’images de mères heureuses. De l’autre, ils dénoncent la pilule et ses effets secondaires possibles. «Des études prouvent qu’une fille qui commence à prendre la pilule avant 20 ans risque de souffrir un jour d’un
cancer du sein. Mais les gynécologues ne mettent pas leurs patientes en garde», avance ainsi Harri Wettstein.
«Il n’est pas prouvé que la pilule soit une des causes de cancer du sein, réplique Jean-Marc Lambercy, président
du groupement des gynécologues vaudois. Nous n’avons pas vu exploser le nombre de cancers, alors que c’est déjà
la troisième génération qui prend la pilule.»
Autre accusation de Harri Wettstein: la pilule serait une cause d’infertilité. «Les données concernant les cas d’inffécondité sont extrêmement difficiles à évaluer, rétorque le gynécologue lausannois. Il est aisé de mettre la faute sur la pilule, puisqu’on ne peut pas répondre en avançant des chiffres précis.»
Conseils individuels
Face au discours virulent
du théologien, les gynécologues restent diplomates. D’ailleurs, ils connaissent la méthode sympto-thermique. Et au Centre de planning familial Profa, les conseillères sont même formées dans
le domaine. «Notre rôle consiste à donner la meilleure information possible sur la contraception et la fertilité, souligne la conseillère Danielle Terzi. Vouloir proposer la méthode sympto-thermique à tout le monde la dessert, car chaque femme a des motivations différentes.
»Par ailleurs, tout moyen de contraception doit être totalement accepté et utilisé dans la durée pour être bien supporté. Nous évaluons donc la méthode à conseiller selon les désirs et besoins de chaque femme et chaque couple.»
En conclusion: c’est aux femmes de choisir entre une contraception hormonale
peu contraignante et l’auto-contrôle de leur fertilité. En toute liberté.
Véronique Kipfer
Comment ça marche
Fiable mais contraignant
La méthode sympto-thermique consiste à déterminer ses jours fertiles et infertiles en fonction des signes de son corps. En effet, la température corporelle s’élève durant la phase fertile et les glandes du col de l’utérus sécrètent une glaire élastique. La femme doit alors prélever et observer ses sécrétions vaginales et dresser une courbe de température. Elle peut également palper le col de l’utérus, celui-ci devenant mou et/ou s’élargissant au début de la période fertile.
Cette méthode ne coûte rien, ne provoque pas d’effets secondaires et permet aussi bien d’éviter une grossesse que de déterminer le meilleur jour pour concevoir. Mais les observations exigent une discipline quotidienne très rigoureuse.
Par ailleurs, les promoteurs assurent une fiabilité de la méthode à 100%. Mais la femme doit parfaitement connaître son corps. Les gynécologues, eux, parlent de 2% de risques de grossesse en théorie et de 20% lors de l’étude de 100 femmes ayant utilisé la méthode durant un an.