Depuis quelque temps déjà, Coop et Migros notamment se sont lancées dans le créneau des produits de luxe, appelés Fine Food chez la première et Sélection chez la seconde. Si la plupart de ces articles sont des préparations d’une originalité certaine, d’autres concurrencent directement les produits de base (spaghetti, café, poulet, etc.). Et dans cette catégorie, les aliments de luxe peuvent être jusqu’à vingt fois plus chers.
En collaboration avec On en Parle (RSR, La Première), nous avons décrypté le contenu de produits vendus dans les gammes discount, standard et gourmet (voir tableaux).
Packaging peu coûteux
Premier constat: les emballages, d’apparence plus luxueuse, ne justifient pas les différences de prix observées, selon Didier Louvier et Eric Martine, du Laboratoire Emballage et Conditionnement à la Haute Ecole d’Ingénierie et de Gestion du Canton de Vaud (HEIG-VD), à Yverdon. En effet, les articles ont souvent le même emballage, ceux de la gamme supérieure étant simplement glissés dans un carton supplémentaire: l’effet est garanti sans pour autant être bien coûteux.
Dans notre sélection, seuls les sachets de thé Fine Food ont un emballage réellement plus élaboré, permettant une meilleure conservation. Mais, là non plus, pas de quoi décupler le prix du thé: «Dans l’agroalimentaire, l’emballage ne représente que 2% à 3% du prix de vente», explique Didier Louvier. Cela dit, les produits haut de gamme sont souvent proposés dans de plus petites quantités, augmentant ainsi leur prix au détail.
Diététiquement proches
Après le contenant, nous nous sommes intéressés au contenu, en faisant décrypter les composants de chaque produit par Petra Mèche, enseignante en diététique à la Haute école de santé de Genève. Son constat: «Même si leurs prix sont parfois surfaits, les produits Fine Food et Sélection font véritablement preuve d’une traçabilité maximale avec une grande transparence dans la déclaration des ingrédients, et des garanties dans les conditions de production.»
Diététiquement cependant, leurs propriétés sont généralement identiques (à l’exception notable de la sauce tomate, onze fois plus grasse en Sélection qu’en M-Budget!). Selon Petra Mèche, les produits M-Budget et Prix Garantie sont surtout bon marché car leur provenance est suffisamment vague pour que Migros et Coop puissent changer de fournisseur au gré des fluctuations des marchés mondiaux. Mais bas prix ne veut pas dire malsain: «Ces produits sont si peu élaborés qu’on y retrouve un minimum de composants. La sauce tomate M-Budget, par exemple, ne contient pratiquement que de la tomate. Et les additifs n’y sont pas plus nombreux: chaque adjonction non indispensable est économisée», remarque la spécialiste.
Les procédés de fabrication sont toutefois bien différents. Le bas de gamme est produit aux limites de ce que la loi permet, tandis que le haut de gamme tend à offrir un retour aux méthodes artisanales. Quitte, parfois, à aller un peu trop loin: «L’argument du thé Fine Food et du café Sélection cueillis à la main est exagéré, car le café et le thé sont toujours cueillis à la main», souligne Petra Mèche.
A chacun d’apprécier
Migros et Coop le reconnaissent sans honte: les articles bas de gamme sont des produits de masse très peu élaborés et de provenance variable, tandis que les plus luxueux jouent la carte de la rareté, avec la plus grande traçabilité et les meilleures conditions de production possibles. Quant au goût, à chacun d’apprécier et de panacher son caddie en fonction de ses propres intérêts et envies.
Yves-Alain Cornu