Il y a bientôt cinq ans, Danièle Chazaud est atteinte de vertiges et de violents maux de tête. Tellement violents qu’elle doit s’arrêter de travailler pendant six longues semaines. S’ensuit un véritable marathon médical pour tenter de trouver l’origine de ces douleurs: elle passe d’abord un IRM et un électrocardiogramme, puis consulte un ostéopathe, un oculiste, un neurologue, un oto-rhino-laryngologue, un homéopathe, un phytothérapeute, un médecin dentiste et enfin un dermatologue...
C’est ce dernier, en soumettant la patiente à des tests d’allergie aux métaux, qui constate une allergie au chrome, au nickel, au cobalt, au zinc, au mercure et au pla-
tine. Or, les obturations dentaires, plus communément appelées «plombages» (quand bien même elle ne contiennent pas de plomb...), sont composées d’une faible quantité de zinc.
Résultat inespéré
La solution: remplacer tous les amalgames existants par des obturations en résine composite, qui ne contient pas les matériaux incriminés. Le travail sera exécuté en une année et 24 séances, entre juin 1997 à juin 1998, pour le montant de 5000 fr. Une somme certes importante, mais dérisoire par rapport aux frais engagés en pure perte jusque-là pour découvrir l’origine du mal. Avec à la clé un résultat que Danièle Chazaud espérait sans trop y croire: la guérison!
Enfin soulagée, Danièle Chazaud envoie logiquement la facture de son médecin dentiste à Helsana, sa caisse maladie, considérant que l’allergie dont elle était victime est une maladie dont le traitement passait par une intervention dentaire. Malheureusement, la logique et la LAMal (loi sur l’assurance maladie obligatoire) ne vont pas toujours de pair!
Considérant en effet que l’allergie aux amalgames ne figure pas sur la liste établie par l’Office fédéral des assurances sociales (ordonnance sur les prestations dans l’assurance obligatoire des soins en cas de maladie du 29 septembre 1995), Helsana refuse d’intervenir. Une position qu’approuve le Tribunal cantonal des assurances de Genève.
Juges frileux
Déçue, Danièle Chazaud décide d’aller jusqu’au bout et soumet son cas au Tribunal fédéral des assurances (TFA), considérant que la facture de son médecin dentiste ne concerne pas des soins dentaires proprement dits, mais bien des soins nécessaires pour traiter une maladie grave*. Tel n’est toutefois pas l’avis des juges fédéraux qui admettent certes être en droit de décider s’il s’agit de soins dentaires nécessaires à enrayer une maladie grave, mais estiment devoir faire preuve d’une «grande retenue» dans cet examen, compte tenu de la rapidité avec laquelle l’ordonnance peut être modifiée par l’OFAS et de son caractère scientifique.
Autrement dit: il appartient au pouvoir politique et non judiciaire de décider ce qui est une maladie grave au sens de la loi. Nos juges préfèrent donc ne pas s’aventurer sur cette pente savonneuse. N’en déplaise au justiciable qui doit, une fois de plus, constater qu’en Suisse, les dents ne semblent pas faire partie du corps humain...
Et le TFA d’ajouter que «le recours se situe à la limite de la témérité», Danièle Chazaud ayant à l’évidence eu tort de vouloir faire coïncider la justice et le droit!
Mauro POGGIA
ASSUAS/GE
*Art. 31, alinéa 1, lettre c, LAMal
commentaire
Un procédé pervers
Espérons que la décision du Tribunal fédéral des assurances amènera la Commission fédérale des prestations de l’OFAS à revoir sa position dans ce domaine. Il est en effet pervers de rechercher une limitation des coûts de la santé en donnant à une autorité administrative le soin d’établir une liste exhaustive des prestations remboursées. Danièle Chazaud aurait pu, durant des lustres, s’adresser aux plus grands spécialistes de notre pays pour rechercher en vain l’origine de son mal, et sa caisse maladie aurait remboursé sans sourciller ces frais inutiles, alors qu’elle refuse d’assumer le modeste coût de la guérison.
De délégation en délégation, chacun a confié à autrui le soin d’être suffisamment clair, au point que nos juges se sont eux-mêmes confinés au rôle de simple lecteur sans pouvoir d’appréciation. C’est franchement regrettable.
M. P.
association suisse des assurés
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