Une chambre minuscule sous les toits avec pour seul mobilier deux lits crasseux et une chaise cassée, un lavabo fuyant, une moquette tachée, une mauvaise isolation et le brouhaha incessant des conversations montant du bar jusqu’au petit matin… L’hôtel dont Michel Merlin garde un souvenir aussi exécrable échappe au système d’attribution des étoiles, puisqu’il ne fait pas partie de la Société suisse des hôteliers (SSH). Il pratique pourtant des prix relativement élevés (90 fr. la nuit pour une chambre simple).
Des draps sales
Mais en 32 ans de carrière comme guide touristique et conducteur d’autocar, ce lecteur en a vu d’autres: «Même dans des hôtels trois ou quatre étoiles, le personnel
se borne parfois à tourner les draps au lieu de les changer.» De quoi se poser certaines questions sur le contrôle de qualité dans l’hôtellerie suisse.
Moutons noirs
D’abord, c’est un marché libre soumis à la loi de l’offre et de la demande: «Les moutons noirs ne survivent pas longtemps dans le climat de concurrence qui règne actuellement», estime Brigitta Schaffner Schlosser, responsable de l’Ombudsman de la Société suisse des hôteliers (SSH). Le client détient, en effet, le pouvoir de répercuter la mauvaise réputation d’un établissement, mais il bénéficie aussi de certaines voies de recours (lire encadré).
En outre, la SSH a introduit, en 1979, un système de classification (de 0 à 5 étoiles) pour rendre l’offre plus transparente. Environ 75% des hôtels – dont l’ensemble des établissements susceptibles d’afficher quatre ou cinq étoiles – sont membres de l’association professionnelle et donc obligatoirement soumis à cette classification.
Concrètement: c’est à l’hôtelier d’évaluer dans quelle catégorie il souhaite être classé et à remplir le formulaire idoine. En fonction de son standing, l’établissement doit répondre à toute une série de normes pour le service, le confort, l’équipement des chambres (mobilier, TV, téléphone, sanitaires, etc.), et la sécurité. Par exemple, le client d’un hôtel trois étoiles doit pouvoir bénéficier d’une chambre d’au moins 10 m2, s’y faire servir un petit déjeuner continental, utiliser le téléphone, écouter la radio et regarder la télévision. Et il devrait encore avoir à sa disposition une table de travail avec du matériel pour écrire et un fauteuil confortable pour se détendre. Sans oublier le mini-bar.
Système cohérent
Lorsque l’hôtelier a déposé sa demande, une commission régionale de la SSH va vérifier sur place que l’établissement remplit bien tous les critères avant de lui attribuer ses étoiles.
En principe, chaque hôtel devrait, par la suite, être visité tous les cinq ans ou
en cas de changement de propriétaire – moment-clé où apparaissent parfois
des difficultés. Toutefois, la Commission de contrôle romande (composée de onze membres seulement) ne peut pas être partout: «Mais dans l’ensemble, nous savons où se trouvent les problèmes», relève Othmar Collenberg, président de la Commission régionale de la SSH pour la Suisse romande.
Suivez le guide
«Le système suisse de classification est cohérent, estime pour sa part Denis Steffan, rédacteur en chef du Guide rouge Michelin pour la Suisse. Mais il se contente de classer les hôtels selon leur standing. C’est pourquoi il est essentiel de consulter un guide de voyages, qui sélectionne les meilleurs établissements dans chaque catégorie selon ses propres critères, dont le rapport qualité/prix.»
Sophie Reymondin
les voies de recours
Un médiateur à la disposition des hôtes
N’oubliez pas que le client est roi: avant d’accepter une chambre, demandez à la visiter, ouvrez le lit et jetez un coup d’œil aux sanitaires. Si le prix vous paraît surfait, n’hésitez pas à le contester, quitte à changer d’établissement.
Cependant, quand on arrive tard et vanné dans le seul hôtel de la région, il n’est pas toujours envisageable —comme ce fut le cas pour Michel Merlin — d’adopter une solution de repli. Mais il vaut toujours la peine de réagir même après coup:
• Pour obtenir réparation: l’hôte peut solliciter l’aide et les conseils de l’Ombudsman* de la SSH. Lequel va contacter l’hôtelier et faire en sorte qu’un arrangement financier puisse être trouvé entre les deux parties.
• Pour dénoncer les problèmes: le meilleur moyen est de contacter l’Office du tourisme de la région concernée. Si des manquements graves ont été constatés (sur le plan de l’hygiène par exemple), il peut avertir la police du commerce, qui délivre les patentes d’exploitation et fait respecter les lois cantonales, notamment en matière de construction, d’hygiène et de sécurité.
*Office de médiation de la Société suisse des hôteliers (SSH), service gratuit ouvert mercredi, jeudi et vendredi de 8 h 30 à
12 h, tél. 031 941 00 30 et fax
031 941 00 36.