Tout le monde n’a pas la chance d’habiter Schwyz, unique canton à ne prélever aucun impôt sur les donations! Ou plutôt d’y avoir une tante richissime et partageuse, car c’est, en fait, toujours le canton du donateur et non celui de l’heureux bénéficiaire qui taxe en la matière. Seule exception: les dons d’un bien immobilier, qui sont imposés selon le régime fiscal du canton où il est situé.
En Suisse romande, le fisc se réserve habituellement une part du gâteau, surtout s’il est gros et si le lien de parenté entre celui qui donne et celui qui reçoit s’avère plus ou moins éloigné.
Mais, même en Romandie, l’impôt sur les donations n’est pas une fatalité, loin de là. Les différentes lois fiscales cantonales prévoient toutes certaines libéralités. Aujourd’hui, les dons faits entre conjoints, ou entre partenaires enregistrés, sont totalement exemptés. Et seuls Neuchâtel et Vaud prélèvent encore un impôt auprès des enfants et petits-enfants bénéficiaires d’une donation (voir tableau).
Les astuces du système
Partout, des seuils ou des franchises d’imposition ont également été prévus, en deçà desquels le don est entièrement exonéré. Un Neuchâtelois peut ainsi offrir 10 000 fr. à son meilleur ami sans que ce dernier ait à reverser le moindre centime à l’Etat. Berne ferme les yeux jusqu’à 12 000 fr., mais le canton du Valais n’exonère, en théorie, que les dons de 1999 fr., mais 2000 fr. en pratique.
Parfois, ces lois s’avèrent en effet très subtiles. Dans le canton du Jura, par exemple, il est question d’une franchise de 10 000 fr. Ce qui, concrètement, signifie qu’on ne peut donner que 9999 fr. à ses parents, frères et sœurs ou amis. Mais, si on donne 1 fr. de plus, alors, la totalité est imposée. Il y est aussi dit que, si la même personne reçoit un second don durant les cinq années qui suivent le premier et que leur somme dépasse les 9999 fr., alors la totalité des deux donations est imposée. Idem à Neuchâtel, si on donne 10 001 fr., la totalité sera taxée, mais là on peut donner 10 000 fr. chaque année, sans effet de cumul.
A Genève, en revanche, le seuil est fixé à 5000 fr. Donc jusqu’à 5000 fr., on ne paie aucun impôt. Mais, si on reçoit 5001 fr., c’est ce seul franc supplémentaire qui sera imposé. De même si la personne perçoit plusieurs dons en l’espace de quelques années, en l’occurrence 10 ans à Genève: c’est uniquement la part excédant 5000 fr. qui sera taxée.
Autre particularité: le régime réservé aux donateurs très fortunés, au bénéfice d’un forfait fiscal, est plus strict, presque partout.
Toute générosité devrait donc être précédée d’une prise de renseignements quant aux limites et modalités en vigueur dans le canton du donateur (lire ci-contre «L’expert vous répond»).
Au-delà de l’exonération
Lorsque le don dépasse les montants exonérés, les cantons perçoivent, en principe, un impôt unique calculé selon un barème plus ou moins progressif, basé sur le degré de parenté et le montant de la donation. «Canton», car, à l’exception de Vaud et de Fribourg, les communes ne ponctionnent pas les donations, la Confédération non plus, d’ailleurs.
A titre d’exemple, Roland Bron, directeur pour la Suisse romande de VZ VermögensZentrum, a chiffré l’imposition d’un don de 100 000 fr. (voir partie inférieure du tableau). Les résultats révèlent très clairement les grandes disparités cantonales. Un frère, qui reçoit 100 000 fr. de sa sœur, doit ainsi payer 17 955 fr. d’impôts si elle est domiciliée à Genève, mais seulement 5400 fr. si elle est Bernoise.
Les dons entre concubins sont aussi l’objet d’énormes inégalités, puisque seuls quelques cantons accordent un tarif préférentiel lorsque le couple peut se prévaloir de cinq ou de dix années de vie commune (BE, FR, JU et NE). A Berne, le concubin ne paie que 5400 fr., mais, à Lausanne, 48 708 fr.! De quoi se passer tout de même la bague au doigt.
Joy Demeulemeester
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Donation et succession
Les donations sont des «cadeaux» faits de son vivant, et sans contre-prestation; donc la personne qui en bénéficie n’a rien besoin d’offrir en échange.
Ce peut être de l’argent, un bien mobilier ou immobilier, mais aussi les prestations découlant d’une assurance vie arrivant à échéance lorsque le preneur d’assurance est encore en vie.
L’impôt sur les donations est fréquemment associé à celui sur les successions, car les cantons appliquent des barèmes très souvent identiques pour ces deux impôts, mais pas à Genève, par exemple.