Diviser pour mieux saigner
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Bon à Savoir
08.03.2017
Dernière mise à jour:
04.10.2022
Yves-Noël Grin
Pourquoi les entreprises s’évertuent-elles à conserver des départements qui ne rapportent pas un seul kopeck? A quand un grand coup de balai dans les ressources humaines, la comptabilité et l’administratif? Certains actionnaires doivent en rêver pour que le cauchemar des dividendes trop timides ne cesse de hanter leurs nuits.
Qu’ils se rassurent, les dérives du capitalisme sont pétries d’empathie à leur égard. Il est déjà monnaie courante de partitionner les résulta...
Pourquoi les entreprises s’évertuent-elles à conserver des départements qui ne rapportent pas un seul kopeck? A quand un grand coup de balai dans les ressources humaines, la comptabilité et l’administratif? Certains actionnaires doivent en rêver pour que le cauchemar des dividendes trop timides ne cesse de hanter leurs nuits.
Qu’ils se rassurent, les dérives du capitalisme sont pétries d’empathie à leur égard. Il est déjà monnaie courante de partitionner les résultats financiers d’une société pour tailler dans certains secteurs. En désolidarisant les activités d’une entité, la logique comptable se fait complice des décisions les plus brutales. Délocalisation, restructuration massive ou disparition, rien n’est assez fort pour sublimer les bénéfices.
Cette stratégie est devenue si banale qu’elle touche même le service public. Prenons La Poste: elle pleure sur les chiffres de son réseau postal de vente en transférant une partie de ses activités rentables à d’autres domaines (PostMail, PostFinance, etc.). Une manière habile de noircir le tableau pour mieux poursuivre le démantèlement de son réseau à coups de hache. On oublierait presque que son bénéfice annuel franchit régulièrement la barre des 600 millions.
Le mécanisme est parfois plus subtil. Les grands groupes de presse tirent profit de ce qui contribue à la perte des journaux: la digitalisation des services. Tamedia exploite des plateformes lucratives comme ricardo.ch ou immostreet.ch, Ringier fait de même avec
anibis.ch ou autoscout24.ch. Toutes ces petites annonces, qui participaient, jadis, au financement de la presse, ne sont désormais que des machines à pognon indépendantes. Les journaux, eux, doivent se contenter d’un autre type d’annonces: celui des grandes saignées qui les font crever à petit feu.
Yves-Noël Grin