Monica Rusconi a cet accent du Sud qui donne immédiatement un avant-goût de vacances. Elle est vive, drôle et pétillante. Elle a donc beaucoup de mal, dans son petit immeuble de la région genevoise, à comprendre ce qui lui arrive: le 26 mars dernier, elle a reçu une lettre de sa gérance, lui annonçant que, suite aux plaintes réitérées de certains voisins, son bail était résilié.
C’est en automne dernier que Monica Rusconi reçoit la première lettre de son bailleur, l’informant avoir reçu une pétition de certains voisins lui reprochant de faire trop de bruit. Une deuxième lettre souligne que les plaintes perdurent et rappelle qu’en tel cas, le bailleur est en droit de résilier le contrat. Suit une ultime sommation, puis la résiliation. Sont mis en cause, en vrac: le répondeur téléphonique, la télévision, l’aspirateur, les bruits de pas sur le parquet et même les déplacements du petit chaton.
C’est la vie...
Monica Rusconi fulmine: «Mais dans quelle société vit-on? Je ne nie pas regarder la télévision, comme tout le monde me semble-t-il. Ni rentrer parfois tard le soir, mais en tel cas, désolé, je ne sais pas voler! J’admets même avoir eu, rarement, des divergences avec mon ami, et que cela a pu dépasser les murs de notre appartement. Mais est-ce de ma faute si l’isolation de cet immeuble fait que tout le monde vit avec tout le monde? Moi aussi, j’entends la télévision de ma voisine et parfois des bébés pleurer: c’est la vie, non?»
Peu de jurisprudences
Oui, c’est la vie. Le problème, c’est que chacun la vit différemment. Et que dans des immeubles avec plusieurs dizaines d’appartements, cela fait beaucoup d’avis sur la question, pas toujours unanimes. C’est tellement vrai qu’il existe finalement peu de jurisprudences sur les problèmes de bruit entre voisins, les juges gardant une très grande marge d’appréciation. Et même l’Association genevoise de défense des locataires (ASLOCA) n’intervient jamais en faveur d’un locataire contre un autre locataire.
Ce qui est certain, c’est qu’avant d’en arriver à de telles extrémités, il faudrait toujours commencer par tenter un arrangement à l’amiable, directement entre voisins. Une étape semble-t-il manquée dans le cas de Mme Rusconi. Ensuite, un locataire estimant que son voisin fait trop de bruit a effectivement le droit de demander à la gérance d’intervenir pour que cela cesse. Et l’article 257f al. 3 du Code des obligations donne à cette dernière la possibilité, après sommation, de résilier le bail pour la fin d’un mois moyennant un mois de préavis.
Que faire en tel cas? «Réagir immédiatement, répond Irène Buche, avocate de l’ASLOCA Genève. Dès la première sommation, il faut contester les reproches qui sont transmis par la gérance.» On vient de voir que cela ne sera pas facile: la plupart des règles et usages locatifs précisent certes qu’il faut «éviter les bruits excessifs qui peuvent incommoder les voisins et respecter leur repos de 22 à
7 heures», mais qu’est-ce qu’un bruit excessif? D’autre part, la jurisprudence admet qu’écouter la radio et la télévision fait partie des usages courants d’un appartement, mais seulement à une fréquence sonore «normale». Tout est donc sujet à interprétation, celle des juges en dernier ressort.
Congé suspendu
Lorsque le congé est finalement donné, comme à Mme Rusconi, il faut aussi immédiatement le contester. On le fera avec l’aide d’un spécialiste: à ce moment précis, l’ASLOCA accepte d’entrer en matière, puisqu’il ne s’agit plus d’un litige entre locataires, mais entre un locataire et le bailleur. «Mon expérience prouve que nous arrivons souvent à une conciliation, voire à une annulation du congé au Tribunal des baux, commente Me Buche. La tolérance a certes des limites, mais elles sont souvent loin d’être atteintes.»
Tant qu’une telle procédure est en cours, le congé est suspendu. Monica Rusconi, qui devrait déjà avoir quitté son appartement, attend donc le résultat de la première conciliation. En marchant, promet-elle, sur la pointe des pieds et en surveillant de près son adorable chat.
Christian Chevrolet
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