Un ado sur cinq avoue prendre régulièrement des médicaments contre les maux de tête, de ventre, les troubles du sommeil ou la nervosité, comme le révèle une enquête menée auprès des écoliers de Suisse par l’ISPA (Institut suisse de prévention de l’alcoolisme et autres toxicomanies). Plus en détail, on constate même qu’un tiers des filles de 15 ans, plus introverties, font un usage répété et cumulé de ces remèdes. Et nous ne parlons pas ici des 5% de filles et 2% de garçons de 15 ans qui ont déjà pris des pilules dans l’intention de se droguer.
Les ados seraient-ils tous accros? Nous avons posé la question à Corine Kibora, porte-parole de l’ISPA: «Pas forcément, mais, lorsque le recours aux médicaments est la seule réponse proposée à tous les petits maux de l’existence, il risque de devenir un automatisme à l’âge adulte.»
La société montre le mauvais exemple
La surconsommation est en partie liée à la recherche de la performance, présente à tous les niveaux de la société, et donc également chez les jeunes en formation. «Entre les compléments utilisés pour faire de la musculation, les alicaments et les autres compléments vitaminés, le médicament devient un réflexe chez tout le monde, explique Pierre-André Michaud, médecin chef de l’Unité multidisciplinaire de santé des adolescents (UMSA), au CHUV. Simultanément, il arrive aussi que des médecins ou des pharmaciens conseillent un peu hâtivement la prise de comprimés.»
Chez les jeunes, le problème tient aussi au fait qu’ils ne savent pas toujours identifier et formuler leurs problèmes de santé. Et les ados, en quête permanente de réponses, apprécient particulièrement l’effet immédiat de la médication.
Prendre les choses en main
Au lieu d’atténuer les symptômes avec des médicaments, et sans pour autant diaboliser leur utilisation parfois inévitable, il conviendrait plutôt de s’arrêter sur son rythme de vie. Pourquoi suis-je fatigué? Pourquoi mon estomac brûle-t-il? Les parents doivent prendre au sérieux la consommation de leur enfant, et l’emmener chez le médecin si la prise devient chronique et si le mal demeure inexpliqué. Les infirmières scolaires sont également de bon conseil pour mettre le doigt sur un problème plus important.
«Aménager une chambre individuelle, changer de classe ou faire de la relaxation peuvent suffire à faire taire certains maux», explique Pierre-André Michaud. Quant aux parents, qui servent d’exemple, ils devraient eux aussi surveiller leur comportement vis-à-vis des médicaments.
Yves-Alain Cornu