Depuis décembre dernier, Sandra S. paie chaque mois 250 fr. à Procrédit. Elle le fera, péniblement, car elle n’est qu’une simple employée de commerce, jusqu’au remboursement des 5000 fr. qu’elle doit encore à cette institution bancaire. Pourtant, elle n’a jamais emprunté un sou. Ce prêt, c’est son père qui l’a obtenu en 1996, mais il est décédé depuis.
«Nous sommes tombées des nues lorsque nous avons appris, après sa mort, qu’il avait obtenu un crédit de 27 000 fr.», raconte Sandra S. Et comme sa mère vit d’une petite rente AVS, c’est elle, comme co-héritière, qui doit rembourser la dette. Pourtant, il est clairement écrit dans le contrat que la banque Procrédit a contracté une assurance auprès de la Zurich au cas où l’emprunteur meurt pendant la durée du contrat.
Oui, mais le père de Sonia S. est mort d’un cancer de la prostate dont il se savait déjà atteint lorsqu’il a fait son emprunt. Or, en tel cas, la Zurich est en droit de réduire ses prestations, comme elle le mentionne dans les conditions générales d’assurance (CGA), ces petites lettres qu’il faudrait toujours prendre le temps de lire avant de signer quoi que ce soit!
Geste minimal
Pour la famille S., l’affaire est d’autant plus pénible qu’elle ne savait même pas que son proche souffrait du cancer en 1996. «Il a longtemps gardé le secret sur sa maladie, probablement pour nous protéger», se souvient Sandra S. Procrédit en a d’ailleurs partiellement tenu compte, acceptant de prendre à sa charge la moitié du solde de la dette, soit 5000 francs.
Un geste que Gerda Haber juge être un minimum. La directrice du service chargé des problèmes d’endettement dans le canton de domicile de Sandra S. (ZH) estime en effet que les banques devraient clairement mentionner les réserves importantes directement dans le contrat de crédit. Elle sait d’expérience que personne ne lit les annexes, surtout s’ils sont imprimés en tout petit.
Procrédit, qui fait aujourd’hui partie de la société américaine GE Capital Bank, semble aller dans son sens, puisque depuis peu, elle mentionne dans le contrat de crédit que dans un cas comme celui de la famille S., les prestations de l’assurance solde de dettes peuvent être réduites de moitié.
Et chez les autres?
Comment procèdent les autres institutions? Le Crédit Suisse (CS) et la Banque Coop mentionnent dans leurs contrats une possible réduction, mais sans limite en francs ou en pour cent. Les clients de la Banque Coop doivent donc fournir des indications concernant leur état de santé lors de la signature du contrat, tout comme ceux du CS, mais seulement pour un crédit supérieur à 60 000 fr. pour ce dernier.
Les clients de la Banque Migros confirment aussi, par leur signature, qu’ils sont en parfaite santé et jouissent de leur totale capacité de travail. Mais, assure Christine Ruesch, directrice de Mileda, société affiliée à la banque pour les petits crédits, «nous n’exigeons pas le remboursement des héritiers, même si l’assuré se savait condamné au moment où il a emprunté l’argent». Il en ira autrement, en revanche, en cas de maladie: non seulement le client est tenu d’avertir qui de droit dans un délai court et déterminé, mais il ne devra aussi avoir aucun retard dans ses paiements. Personne ne dit ce qu’il adviendra d’une personne plongée dans le coma et dont l’entourage ignore qu’il a contracté un petit crédit...
DROIT
Refuser la succession
Sandra S. et sa mère auraient pu échapper au remboursement de la dette si elles avaient refusé l’héritage. Mais...
• Il faut agir vite: la loi donne trois mois aux héritiers pour répudier une succession. Sinon, elle considère qu’ils l’ont acceptée.
• La répudiation doit être faite par lettre recommandée, sans réserve ni condition. L’administration cantonale vous dira à quelle autorité il convient de la faire parvenir.
• Surtout, ne prenez aucune autre initiative concernant l’héritage. Par exemple, n’emportez pas un objet du défunt: vous perdreriez votre droit de refuser son héritage.
• Quand la situation n’est pas très claire, mais qu’il
risque de toute façon de
ne pas rester grand-chose, mieux vaut refuser l’héritage. Si, après paiement des créanciers, il reste quelque argent, l’héritier y aura de toute façon droit comme s’il n’avait pas refusé la succession.
• En cas de gros doute, vous pouvez demander un inventaire: les créanciers sont alors sommés de s’annoncer, via la feuille d’avis officielle. Si vous acceptez ensuite votre héritage sous bénéfice d’inventaire, vous n’aurez à supporter que les dettes qui y sont mentionnées. Mais attention: vous devez demander cet inventaire dans le mois suivant le décès et vous devrez faire une avance de frais souvent importante à la justice de paix, au notaire ou au tribunal de district (cela varie selon les cantons).