L’an dernier, à pareille époque, le Parlement décidait de réduire une nouvelle fois les rentes de la prévoyance professionnelle (2e pilier), en baissant progressivement le taux de conversion* jusqu’ 6,4% d’ici à 2014 (contre 7,05% pour les hommes et 7% pour les femmes en 2009). Concrètement, pour un capital de 100 000 fr., cela représente une rente à vie annuelle de 6400 fr. au lieu de 7050 fr. aujourd’hui, soit une différence de 650 fr.
Cette réduction est-elle justifiée, alors que, en 2002 déjà, la décision de baisser le taux de conversion de 7,2% (en 2005) à 6,8% (en 2015) avait déjà été prise pour compenser la prolongation de la durée de vie? Non, comme va le démontrer la calcul suivant. Et voici pourquoi nous avons soutenu le référendum qui refuse cette nouvelle réduction, et sur lequel le peuple devra se prononcer le 7 mars prochain.
Deux critères
Le taux de conversion est calculé en fonction de deux critères surtout:
- la durée de vie moyenne des assurés après la retraite, durant laquelle une rente devra être versée;
- le taux de rendement du capital, qui permet de faire fructifier les sommes versées tant par l’employé que l’employeur.
Dans un cas comme dans l’autre, il s’agit donc de prévisions, et non de chiffres absolus. Pour justifier les réductions, les assureurs ont donc tout intérêt à miser sur un prolongement maximal de la durée de vie théorique et sur un rendement minimal des marchés, ce qu’ils ne se gênent pas de faire.
Espérance de vie
Pour calculer l’espérance de vie des futurs retraités, il existe ainsi plusieurs tables de mortalité. Faut-il s’en étonner? Celle des assureurs (GRM/F 95) est la plus large, affichant des âges supérieurs de presque une année par rapport à la moyenne des six autres. Or, officiellement, la plus récente échelle établie par l’Office fédéral de la statistique (OFS 2003) retient une durée de vie après la retraite de 17,1 ans pour les hommes et de 20,8 ans pour les femmes, ou une moyenne de 19 ans.
Taux de rémunération
L’autre pierre d’achoppement, c’est le taux de rémunération espéré, duquel il convient de soustraire 0,5% pour les frais d’assurance et d’administration afin d’obtenir le taux technique (TT). Selon les assureurs, il est illusoire, à l’avenir, d’espérer plus qu’un rendement de 3,35%, (TT: 2,85%). Or, à l’heure de faire son choix entre diverses variantes, la Confédération a estimé que le taux attendu pouvait être de 4% (TT: 3,5%), ce que confirment nombre de spécialistes hors assurances.
Le calcul
Nos confères du magazine des consommateurs alémaniques saldo ont donc fait le calcul (voir graphique ci-dessous): avec un taux technique de 3,5%, un capital peut servir une rente moyenne (hommes et femmes) durant 21 ans avec un taux de conversion de 6,8%, et durant 23 ans avec un taux de conversion de 6,4%.
Avec le taux de conversion de 6,8%, d’ores et déjà retenu pour 2015, il existe donc une marge de deux ans sur la période durant laquelle il conviendra de verser les rentes par rapport à la durée de vie moyenne retenue par l’OFS. C’est largement suffisant. Et il sera toujours temps, au cas où l’espérance de vie augmente au-delà des prévisions ou si les marchés n’arrivent vraiment pas à se relever, de corriger le tir plus tard, puisque, désormais, la Confédération a l’obligation de faire le point tous les cinq ans.
Christian Chevrolet
*Chiffre qu’il convient de multiplier par le capital pour obtenir la rente annuelle que l’on touchera à vie.
Exemple: 100 000 fr. x 6,8% = 6800 fr.