Les taux d’intérêt actuels sont extrêmement bas. Au grand dam de l’épargnant: un compte d’épargne basique ne rapporte, au mieux, que 0,75% (voir tableau). Et la rémunération des comptes privés est encore plus faible: entre 0,0625% (le 0 après la virgule n’est pas une erreur…) et 0,25%.
En revanche, dès que son compte affiche un solde négatif, ce même épargnant va devoir payer une somme astronomique, puisque les banques taxent logiquement les découverts, lorsqu’elles les autorisent. Ce qui est moins logique, c’est l’intérêt retenu à cette fin: entre 8% et 12,5%! A la Banque Cantonale du Jura (BCJ), l’intérêt débiteur est ainsi 152 fois plus élevé que l’intérêt rémunérateur du compte privé. Autrement dit, et sans parler des frais, ce que le client gagne en 152 jours, il peut le perdre en une seule journée! A l’inverse, l’intérêt débiteur de la Banque Cantonale Bernoise n’est «que» 36 fois plus important que l’intérêt créancier.
Pour justifier leurs taux débiteurs prohibitifs, la plupart des banques se gardent bien de se référer aux prix du marché, à l’instar de UBS, dont le taux est passé de 12% à 12,5% depuis le 1er juin, ou de la BCJ, dont l’intérêt débiteur a augmenté de 0,25% en janvier.
Elles affirment, au contraire, que le niveau de ce taux dépend du risque pris et du coût de la main-d’œuvre, les soldes négatifs étant évalués et gérés par un employé. Les établissements insistent également sur le fait que les dépassements sont une solution de dépannage, un service à la clientèle.
Certaines, comme la BCF, assurent en outre vouloir éviter qu’un taux trop bas soit interprété comme un encouragement à l’endettement. Marco Roncoroni, de Dettes Conseils Berne, voit les choses avec l’autre bout de la lorgnette: «Ces taux élevés peuvent aggraver le niveau d’endettement de celui qui a des difficultés financières.»
Autorisation de dépassement
Dans certaines situations individuelles, le client peut toutefois bénéficier d’un taux préférentiel, à condition qu’il ait les reins solides. C’est le cas à la BCVS, la BCGE et UBS: jusqu’à concurrence d’un solde négatif défini, le taux débiteur est inférieur au taux usuel. A la BCVS, ce taux préférentiel est de 7,125% (au lieu de 8%), à la BCGE de 8% (11,5%) et à UBS de 9,5% (12,5%). Ce dépassement «autorisé» peut être, par exemple, accordé à un client sur le point de faire une grosse dépense, laquelle doit être compensée quelques jours plus tard. Car, que le client bénéficie ou non d’une autorisation de dépassement, le découvert est toujours ponctuel. C’est logique: les banques n’ont pas intérêt à concurrencer les petits crédits.
Petits crédits également onéreux
Les taux de ces petits crédits ne sont d’ailleurs pas moins élevés que l’intérêt débiteur d’un compte: ils affichent jusqu’à 14,5% (voir tableau ci-contre), soit à peine moins que le maximum légal (15%)! Et la baisse du prix de l’argent n’a rien changé à l’affaire, puisque Cashgate et Bank-now n’ont pas modifié leurs taux depuis respectivement mars 2005 et février 2007. Au contraire de la Banque Migros qui, depuis le mois de mars, pratique un taux de 5,9% pour son crédit en ligne, précisément en raison du «faible niveau des taux sur les marchés des capitaux». En d’autres termes, les autres prêteurs ne font pas voir la couleur de cette baisse à leurs clients…
Rien n’indique non plus que les établissements vont spontanément s’aligner sur les tarifs du géant orange. Seul le Conseil fédéral pourrait les y contraindre indirectement, en diminuant le taux maximal de 15% fixé dans la loi sur le crédit à la consommation: son niveau est en effet censé être fondé sur «les taux d’intérêt de la Banque nationale déterminants pour le refinancement» des petits crédits.
Nicolas Zeitoun
Taux débiteur pas affiché
Si tous les établissements retenus dans notre comparatif indiquent, sur leur site internet, les taux rémunérateurs de leurs comptes, cinq seulement (BCBE, BCJ, Banque Migros, PostFinance et UBS) affichent aussi clairement la valeur de leur intérêt débiteur. Sept d’entre eux (BCF, BCN, BCVS, Coop, Credit Suisse, Raiffeisen et Valiant) ne l’affichent pas du tout et deux d’une manière peu claire (BCGE et BCV). Principale raison invoquée: les comptes ne sont pas faits pour être à découvert… L’argument est un peu court, puisque le client doit pouvoir choisir un compte en toute connaissance de cause!