Depuis la cigarette au menthol, l’industrie à fait du chemin. Pour attirer les consommateurs – les femmes et les jeunes en particulier – le tabac se décline désormais à l’arôme caramel, chocolat, vanille, pomme ou macchiato. Mais ce n’est pas tout. Le magazine 60 millions de consommateurs, en collaboration avec le Comité National contre le tabagisme (CNCT), a analysé la teneur en édulcorants et en sucre dans 20 échantillons de cigarettes, cigarillos, tabac à pipe, à rouler et à chicha.
Résultat: certains produits mériteraient d’être placés dans les rayons confiseries. Le laboratoire a notamment relevé des concentrations en sucre de 10% dans les tabacs à rouler et même 37% dans une préparation pour la chicha très prisée (Al Sultan Double pomme).
L’ajout de ces saveurs de confiserie au tabac permet de masquer le côté âcre susceptible de rebuter les jeunes candidats à l’herbe à Nicot, explique le Pr. Yves Martinet, président du CNCT. De même que les alcopops habituent les adolescents au goût de l’alcool, les «cigarettes bonbons» facilitent le passage de la Fraise Tagada, liée à l’enfance, à la cigarette d’adulte du cow-boy Marlboro.
La vanilline ou le sucre ajoutés
ne sont pas toxiques en eux-mêmes, affirme pourtant Eva van Beek, chargée de
communication à l’Office fédéral de la santé: «le produit nocif, c’est le
tabac». Si l’étude se focalise sur ces additifs-ci, c’est parce que, d’une part,
ils sont utilisés pour séduire des consommateurs toujours plus jeunes. Et,
d’autre part, parce que ce sont les seuls soumis par la législation française a
des valeurs limites, explique Emmanuelle Beguinot, directrice du CNCT. Il ne
s’agit en l’occurrence pas d’un seuil sanitaire, mais politique, fixé sous la
pression des cigarettiers.
Quant à dire que le sucre, la
vanillline ou la sacharine ajoutés au tabac ne sont pas toxiques en soi, Madame
Beguinot se montre prudente. Avec plus de 4000 substances toxiques comprises
dans une seule cigarette, les combinaisons chimiques sont infinies,
rappelle-t-elle. Dans ces conditions, «même le cacao, substance innofensive
s’il en est, pourrait se révéler nocif, brûlé dans une cigarette».
Philippe Chevalier