Comment éviter aux parents qui tempèrent leurs ardeurs professionnelles pour élever une famille d’être pénalisés à la retraite? Le calcul de la rente de vieillesse se base en effet sur les revenus cumulés au fil des ans, de sorte qu’une mère restant au foyer ou travaillant à temps partiel est forcément perdante.
En 1997, la 10e révision de l’AVS a partiellement réparé cette injustice, puisque chaque année passée à élever un ou des enfants de moins de 16 ans se traduit désormais par un bonus éducatif. Lors du calcul de la rente vieillesse, ce supplément s’ajoute aux revenus professionnels.
Dans le cas d’un couple marié, il est partagé entre les époux, alors que les mères célibataires le touchent intégralement. Ce cadeau n’a toutefois pas été offert sans contrepartie, puisque les femmes ont vu l’âge officiel de leur retraite reculer de 62 ans à 64 ans.
Rente plafonnée
Gare aux faux espoirs toutefois! Le bonus éducatif ne permet pas de dépasser la rente de vieillesse maximale, qui s’élève actuellement à 2280 fr. par mois (chiffres 2009). Il ne fera donc aucune différence pour une mère qui a déjà droit à ce montant, même si elle a élevé cinq enfants. En revanche, il sera octroyé à celles qui se sont exclusivement consacrées à leur foyer sans jamais déclarer de salaire.
Pour illustrer ce mécanisme, prenons l’exemple de Danièle, née en avril 1945 et qui fêtera donc ses 64 ans au printemps. Au début de janvier, elle en a averti sa caisse de compensation, l’institution chargée de gérer les cotisations et les rentes AVS, afin de toucher sa rente de vieillesse dès le 1er mai 2009. Danièle est mariée depuis 1968 et son époux, Gérard, est encore actif. Elle a toujours travaillé et a eu deux enfants, nés en 1969 et en 1971.
Gérard n’ayant pas encore l’âge de la retraite, la caisse de compensation va d’abord déterminer la rente de Danièle.
Revenu annuel moyen
1. Revenus cumulés – Sur la base des cotisations versées au fil des ans, la caisse de compensation va d’abord chiffrer le total des revenus cumulés (voir ligne 1 du tableau A). Pour Danièle, ce total s’élève à 807 300 fr.
2. Revalorisation – Depuis que Danièle a commencé à travailler, le coût de la vie et le niveau des salaires ont considérablement augmenté. La caisse va donc pondérer ce chiffre avec un facteur de revalorisation en fonction de l’année où elle a débuté son activité professionnelle. Ce coefficient est de 1,355 pour 1966, ce qui porte les revenus de Danièle, une fois revalorisés, à 1 093 891 fr.*
3. Revenu annuel moyen – Pour l’obtenir, il suffit de diviser cette somme par le nombre d’années de cotisations, soit, dans notre cas, 43. Ce qui donne 25 439 fr.
Seize ans de bonus
Comme il s’est écoulé 18 ans entre la naissance de l’aîné, en 1969, et les 16 ans du cadet, en 1977, le bonus éducatif sera calculé sur cette durée.
4. Le montant de la bonification correspond au triple de la rente annuelle minimale (13 680 fr. en 2009), soit 41 040 fr.
5. Cette somme doit encore être multipliée par les 18 années que Danièle a passées auprès de ses fils.
6. Le total est alors divisé par la durée de cotisations (43 ans).
7. Il est encore partagé par deux, puisque Danièle est mariée, même si son mari ne touchera sa part que lorsqu’il atteindra lui-même l’âge de la retraite.
8. Au final, le bonus éducatif octroyé à Danièle s’élève à 8590 fr.
9.Revenu annuel déterminant – L’étape suivante se résume à une simple addition: le bonus de 8590 fr. s’ajoute au revenu de 25 439 fr. On obtient 34 029 fr. On se reportera alors à l’échelle 44, qui tire son nom des 44 années de cotisations, pour arrondir ce montant à 34 200 fr. (voir tableau B). Ce chiffre est le revenu annuel déterminant.
10.Rente complète – L’échelle 44 indique, pour chaque palier de revenu, le montant de la rente de vieillesse correspondante. Soit, pour Danièle, 1585 fr. par mois.
Comme la sexagénaire a cotisé de manière ininterrompue, de janvier 1966, année de ses 21 ans, à décembre 2008, soit pendant 43 ans, elle a largement droit à une rente complète, la durée minimale étant fixée à 42 ans. A noter que chaque année de cotisations manquante entraînerait une réduction de la rente de 1/43e, ou de 2,33%.
La même échelle permet de constater que, sans le bonus éducatif, avec un revenu déterminant de 25 439 fr. provenant uniquement de son activité professionnelle, Danièle n’aurait eu droit qu’à une rente vieillesse mensuelle de 1407 fr., soit 178 fr. de moins.
Quand Gérard touchera sa retraite, un nouveau calcul sera effectué pour déterminer cette fois les deux rentes individuelles de chaque conjoint.
Calcul anticipé
Ces calculs sont impossibles à réaliser soi-même, puisque personne n’a accès à l’estimation de ses revenus cumulés. Si l’on souhaite établir un budget précis pour sa retraite, il est toutefois possible de demander à sa caisse de compensation d’évaluer la rente.
La requête est gratuite dès 40 ans, pour autant qu’on ne l’ait pas déjà faite dans les cinq ans et qu’aucun changement important, tel que divorce ou décès du conjoint, ne soit survenu depuis lors. Inutile en revanche de faire l’exercice trop tôt: la vie professionnelle réserve bien des aléas et, dans la plupart des professions, il est difficile de prévoir son salaire 25 ans d’avance.
Claire Houriet Rime
* Barèmes: www.avs-ai.ch > Office fédéral des assurances sociales > Echelle rente 44 > Facteurs de revalorisation pour 2009.
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Parents de jumeaux pas gâtés
Le calcul du bonus éducatif avantage les familles dont la naissance des enfants est espacée, puisqu’il est accordé sur la durée. Ainsi, si Danièle avait eu un premier enfant en 1969, puis un autre en 1980, le bonus serait attribué de 1969 à 1996, date des 16 ans du cadet, soit pendant 27 ans. En répétant le calcul ci-contre, on obtient une rente de vieillesse mensuelle de 1703 fr., soit 118 fr. de plus par mois.
Si, en revanche, elle avait eu des jumeaux nés en 1969, le bonus éducatif n’aurait été calculé que sur seize ans, puisqu’ils auraient tous deux atteint cet âge en même temps.
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