Finies les brûlures: une peau lisse, incroyablement douce au toucher, une sensation de fraîcheur, etc. Les fabricants de mousses et de gels à raser multiplient les arguments publicitaires. Au-delà de ces slogans, ces produits sont censés faciliter le rasage et apaiser la peau après l’épreuve de la lame. Mais que contiennent-ils pour accomplir leur tâche? Pour le savoir, nous avons confié – en collaboration avec notre partenaire alémanique saldo – huit marques de mousses et gels à raser parmi les plus vendus, dont un produit bio, à deux laboratoires spécialisés.
Les résultats sont inquiétants (voir tableau): seuls deux des neufs produits testés sont totalement dépourvus de substances nocives, ou pour le moins controversées (lire l’encadré).
Dans le trio de tête cohabitent le moins cher et le plus cher du test: le Denner Classique, 1.95 fr. les 300 ml, et la mousse bio de Speick, 10.20 fr. les 200 ml, soit presque huit fois plus cher à quantité égale. Walter Rupflin, de Speick, fabricant de la mousse bio, s’explique: «Nos matières premières sont issues de plantes de très grande qualité et sont donc beaucoup plus chères que celles d’origine animale.»
L’ultime produit jugé «très bon», le Men’s Look de Migros, contient néanmoins de la paraffine. Ses effets sur la santé étant méconnus, sa présence ne lui vaut aucune pénalité.
En queue de classement se trouvent deux produits de la marque Gillette, pourtant très bien placés dans les ventes. Aussi bien la mousse que le gel à raser contiennent les composés critiques de muscs polycycliques. On y trouve aussi des parfums au haut potentiel allergène. Dans le gel Gillette, le laboratoire a trouvé du diéthyl-phtalate et la mousse de la même marque contient du formaldéhyde. Procter & Gamble, propriétaire de la marque Gillette, assure pourtant ne mettre sur le marché «que des produits sûrs, attestés par un conseiller médical et scientifique».
L’ensemble des fabricants contactés laissent entendre que la composition de leurs produits ne pose pas de problème. Or, dans la mousse à raser Nivea,
le laboratoire a détecté deux parfums au potentiel allergène élevé. Nivea se défend: «Le produit testé satisfait tant les législations suisses qu’européennes.» La réglementation en vigueur stipule en effet que les substances odorantes critiques doivent figurer dans la composition, mais seulement à partir d’une concentration de 100 mg/kg. Ce qui peut permettre d’expliquer l’absence d’indication, mais en aucun cas la présence de ces substances puisque notre test révèle que certains s’en passent totalement.
Nouvelle composition
Par ailleurs, les laboratoires d’analyse ont décelé la présence de parfums hautement allergènes ainsi que des diéthyl-phtalates dans le gel à raser His Way, commercialisé par Coop. Face à ces résultats, le géant de la distribution a promis de vérifier s’il était possible de changer le parfum et de renoncer aux composants critiques, sans que cela entraîne une perte de qualité.
Beat Camenzind / élo
Bonus Web: quelques conseils de rasage
Leçon de cosmétique
Des substances critiques entrent dans la composition des gels et des mousses à raser. Deux laboratoires spécialisés ont mis en évidence la présence de paraffine, de diéthyl-phtalate, de muscs polycycliques, de substances odorantes et de formaldéhyde dans les produits de notre test.
> Paraffine – utilisée comme additif alimentaire ou émollient en cosmétique, ses effets sont controversés: certains spécialistes affirment qu’elle n’est pas absorbée par le corps et donc non toxique; d’autres y voient le plus gros danger de pollution pour le corps.
> Diéthyl-phtalate – utilisé en cosmétique pour faciliter la pénétration dans les couches superficielles de la peau et pour prévenir les craquelures des vernis. Si certains phtalates sont reconnus toxiques, les diéthyl-phtalates sont d’usage général.
> Muscs polycycliques – produits toxiques et peu biodégradables, utilisés dans les parfums. Ils perturbent le métabolisme cellulaire et sont suspectés d’être mutagènes.
> Substances odorantes – il en existe des milliers, naturelles ou de synthèse, utilisées pour produire les parfums. Certaines peuvent déclencher des réactions allergiques à partir de quantités infimes.
> Formaldéhyde – puissant désinfectant et agent conservateur utilisé en cosmétique, reconnu cancérigène en 2006 par le centre international de recherche sur le cancer. Au-dessus d’une concentration de 0,1 millième de g/kg dans l’air, il peut irriter les yeux et les muqueuses, causant des conjonctivites, des maux de tête et des difficultés à respirer, accompagnées de douleur dans la gorge.