Quoi de plus banal qu’un rideau de douche, objet utilitaire du quotidien par excellence? Tellement banal que beaucoup d’entre eux finissent à la poubelle presque à l’état de neuf. On estime en effet que la durée de vie moyenne d’un tel produit est de trois ans. Migros, par exemple, en vend 80 000 par an. Pour le biochimiste Felix Meier, du WWF Suisse, il s’agit d’un gaspillage inquiétant. Car tous les rideaux de douche ne peuvent pas être éliminés sans nuire à l’environnement. C’est ce qu’a démontré le test que nous avons fait passer à neuf modèles. Certains contiennent, notamment, des substances polluantes telles que du plomb, du vinyle et du PVC ou encore du formaldéhyde, soupçonné d’être cancérigène.
Mais rassurez-vous, les résultats de notre test, effectué en collaboration avec le WWF, sont dans l’ensemble, plutôt positifs: si vous avez besoin d’un nouveau rideau de douche, vous disposez d’un bon choix, non seulement du point de vue esthétique, mais également pécunier (le plus cher n’est pas forcément le meilleur) et écologique.
Les analyses ont permis de dégager un vainqueur indiscutable, récompensé par la mention «très bien»: le modèle Igge d’Ikea. A une exception près, ce produit a obtenu le score maximum de cinq étoiles pour tous les points du test. Rien à dire en plus sur le prix: 19,50 fr.
Autres scores écologiques honorables pour les modèles Delgado de Migros (encore moins cher que celui d’Ikea) et Wanda M808 d’Interio, placés respectivement au deuxième et troisième rangs avec la mention «bon».
Les matériaux utilisés pour la fabrication des rideaux de douche ont été évalués selon la méthode de bilan écologique de l’Office fédéral de l’environnement, des forêts et du paysage (OFEP). Résultats:
- Ce sont les rideaux en PEVA (acétate de polyvinyleéthylène) et en PES (polyester) qui s’en sortent le mieux sur le plan écologique, même s’ils ne sont pas exempts de tous défauts.
- Les rideaux contenant du chlore, confectionnés en PVC (polychlorure de vinyle ou vinyle), totalisent de nombreux points négatifs, toujours sous l’an- gle écologique. Conclusion: une seule étoile sous la rubrique matériau.
Pourtant, il est possible de fabriquer des rideaux de douche sans PVC.
Conscient de la charge que ce matériau représente pour l’environnement, le leader suisse en la matière, la maison Spirella – 70% du marché suisse du rideau de douche (selon ses dires) et fournisseur de produits maison pour Migros, ABM et Jumbo – le prouve: «Depuis des années, commente son directeur Ernst Kraft, nous nous efforçons d’offrir des rideaux à bon prix sans PVC.»
Le rideau en coton de Spirella n’a cependant pas fait le plein de points. Car si l’utilisation de cette matière première renouvelable est louable, la culture conventionnelle du coton, contrairement à la culture biologique, pollue le sol et l’eau.
Le poids du plomb
- Autre point délicat: les poids en fil de plomb cousus dans l’ourlet des rideaux pour éviter qu’ils ne glissent par-dessus le bord de la douche ou de la baignoire. En petite quantité déjà, ce métal lourd peut être très nocif pour l’homme et l’environnement. Les produits munis d’un tel fil n’ont donc obtenu qu’une seule étoile. D’autant qu’il est tout à fait possible de faire autrement, puisque certains modèles se passent des poids en plomb.
- Autres métaux lourds problématiques: ceux qui se trouvent partiellement dans les mélanges de matière plastique ou dans les imprimés couleurs. Ils ne sont pas biodégradables et leur emploi devrait donc être limité à un strict minimum, comme l’exige Felix Meier du WWF. Exemple, le modèle Delgado de Migros: il n’a certes pas de fil de plomb, mais il affiche la plus haute teneur en plomb de tous les produits testés (neuf fois le taux limite fixé dans l’Ordonnance sur les substances dangereuses pour l’environnement, permettant d’être considéré comme un produit destructible sans nuire à l’environnement). A quoi s’ajoute encore une haute teneur en chrome. Mais si ces taux sont très élevés, les quantités sont en revanche assez minimes. Voilà pourquoi ces critères ne représentent que 14% de l’appréciation globale et voilà comment Degaldo arrive en deuxième position de notre test.
- L’institut Testex, qui a effectué les tests, a également cherché la présence de formaldéhyde, soupçonné d’être cancérigène. Le rideau Cairo de Spirella s’est malheureusement distingué par une concentration de 188 mg/kg, soit deux fois plus que la valeur limite fixée (75 mg/kg) pour les textiles entrant en contact avec la peau. «La haute concentration en formaldéhyde de ce rideau est probablement due aux imprimés en couleurs ou à la substance qui le rend imperméable», estime Felix Meier.
Toutefois, les consommateurs ne courent aucun risque, car ils n’ont pas de contact prolongé avec le rideau. Là encore, la teneur en formaldéhyde ne constitue donc que 14% de l’appréciation globale du produit. En revanche, le risque est plus élevé pour les employés qui entrent en contact avec cette substance durant la fabrication: le formaldéhyde peut être présent en quantité dangereuse sur leur lieu de travail. C’est pourquoi les rideaux en coton n’obtiennent que deux étoiles. Les produits contenant plus de 20 mg/kg de cette substance ont été déclassés d’une étoile.
- Autre substance à problèmes: les agents blanchissants, donnant leur éclat aux couleurs des rideaux neufs. Beaucoup sont difficilement biodégradables, alors que ces substances synthétiques arrivent déjà dans les égouts lors de la première douche prise avec le nouveau rideau. Les produits contenant de tels agents ont donc perdu une étoile.
Sus aux taches de moisissure
- La recherche des pesticides PCP (pentachlorophénol) et TeCP (tétrachchlorophénol) hautement dangereux et interdits, s’est heureusement révélée infructueuse.
- De même, les chimistes n’ont pas trouvé de traces de colorants azoïques, considérés comme cancérigènes.
- Les experts ont également cherché à savoir si les rideaux avantageaient la formation de champignons de moisissure, qui adorent l’humidité des salles de bain. Bonne nouvelle: aucun des produits testés n’a moisi. Ce qui laisserait croire que les rideaux sont traités avec des substances empêchant la formation de telles taches. Mais les chimistes n’ont pas trouvé la moindre trace d’un tel traitement dans les rideaux testés: un autre bon point pour les fabricants.
Au cas où des taches de moisissure apparaîtraient malgré tout, un conseil en guise de conclusion: pour les prévenir, rincez rapidement votre rideau à l’eau froide, étendez-le bien et, surtout, laissez-le sécher comme il faut après chaque emploi. Vous éviterez ainsi l’utilisation d’eau de Javel, conseillée par certains fabricants pour faire disparaître les tâches de moisissure.
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