Au début de l’année, Pierre Jaillet se rend chez son médecin pour une douleur dorsale. Ce dernier décide de l’envoyer aux urgences des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) pour des examens complémentaires, notamment un scanner thoracique. Fort heureusement, les résultats sont négatifs et notre lecteur peut quitter l’hôpital le soir même.
Un mois plus tard, il reçoit la facture. «Le coût des examens au scanner m’a étonné et incité à analyser le document de manière plus approfondie», souligne-t-il. Une tâche facilitée par le fait que ce dernier demande systématiquement ses rapports médicaux, DVD d’imagerie et analyses de laboratoire. «J’ai ainsi pu comparer le descriptif des images du DVD avec les lignes détaillées de la facture.» Et là, surprise: un scanner (CT) «de l’ensemble de l’abdomen» et un «supplément pour chaque série supplémentaire» lié à ce scanner ont été facturés, alors qu’ils ne figurent pas sur le DVD.
Pierre Jaillet contacte son médecin qui lui explique n’avoir pas demandé cet examen. Il décide donc d’appeler sa caisse maladie Assura. «Sa réponse m’a ébahi: elle m’a dit n’avoir pas accès aux rapports médicaux et donc pas savoir si les prestations facturées correspondaient à ce qui a été fait. Elle m’a aussi dit qu’elle paie quand les factures sont vraisemblables.» Une pratique qui stupéfie notre lecteur, mais que confirme santésuisse, la faîtière des assureurs maladie (lire encadré). Sur le conseil d’Assura, Pierre Jaillet contacte ensuite les HUG. Non sans peine, après avoir relancé le Service de facturation puis contacté la direction générale, il finit par obtenir une réponse de l’hôpital, qui reconnaît une erreur. Le montant facturé en trop s’élève à 506 fr. et est déduit de la facture.
Que s’est-il passé? Selon les HUG, le technicien en radiologie médicale qui cote la prestation aurait en fait tout simplement coché la mauvaise case dans la liste des examens.
1% d’erreurs de facturation
L’hôpital plaide coupable, mais relativise l’importance du phénomène: «Pour le scanner, il existe une soixantaine d’examens différents. Les protocoles sont nombreux et l’erreur est humaine. On estime que ces erreurs atteignent 0,5 à 1%, soit une dizaine de cas sur les 1500 à 2000 scanners réalisés chaque année.»
Une chose est sûre: «Vérifier ses factures d’hôpital est une opération payante», conclut Pierre Jaillet. En revanche, elle n’est de loin pas toujours facile. Les intitulés des décomptes de prestations ressemblent parfois à du charabia pour le profane. Du côté de santésuisse, on conseille au patient de contacter d’abord le spécialiste. La démarche est parfois moins évidente qu’il n’y paraît. Même si les HUG affirment que leur «secteur des débiteurs est à disposition des patients pour expliquer une facture et, le cas échéant, vérifier son exactitude», Pierre Jaillet souligne que ce fut un véritable parcours du combattant. Sa persévérance a toutefois payé et le problème a été résolu. Quand ce n’est pas le cas, le patient peut signaler la situation à son assureur qui consultera, au besoin, son médecin-conseil, recommande santésuisse.
Sébastien Sautebin
DANS LA PRATIQUE
Traque aux éventuels abus
Lorsque les assurances reçoivent des factures des médecins, elles contrôlent systématiquement de manière électronique que les prestations facturées correspondent bien aux tarifs médicaux Tarmed. Pour cela, leurs logiciels traquent les incohérences dans les lignes de chiffres. Cela permet notamment de confirmer que le médecin a employé les bonnes positions tarifaires. «L’assureur n’a cependant pas les moyens de vérifier si les prestations ont été réellement fournies. Il se réfère donc à un critère de plausibilité des factures», explique Anne Durrer, porte-parole de santésuisse. Dans ce domaine, le patient reste en quelque sorte le meilleur organe de contrôle, d’où l’importance d’examiner ses décomptes de prestations.
De son côté, sur mandat des assureurs, santésuisse vérifie les coûts occasionnés par les médecins par rapport à leurs collègues. Si un généraliste, par exemple, engendre des coûts 30% plus élevés que ses collègues dans le même canton, santésuisse va s’y intéresser. «Il ne s’agit pas, dans la plupart des cas, de fraude, tempère Anne Durrer, le surcoût peut, par exemple, se justifier par le fait que le médecin compte beaucoup de patients âgés ou de malades chroniques. C’est le seul instrument que nous avons pour détecter d’éventuels abus.»