Linda Jaquier, lectrice de Bon à Savoir, est sidérée. Elle s’est rendue récemment chez Casse-Prix, à Yverdon: «J’ai acheté pour
10 francs de marchandises. Ensuite seulement je me suis aperçue que la moitié des articles étaient périmés. J’ai dû jeter pour 5 francs de produits: des chocolats After Eigth à 2,50 francs avaient mauvais goût et étaient devenus blancs, et mes enfants n’ont vraiment pas aimé le chocolat en tube à tartiner Pic Nic Tubi à 80 centimes. Quant à la boisson énergétique offerte, je l’ai jetée en voyant que la date était dépassée depuis un an.»
«Est-ce légal de vendre des denrées périssables avec un datage échu?» demande la mère de famille.
La réponse est oui. «Les consommateurs l’ignorent souvent, remarque Bernard Klein, chimiste cantonal vaudois. Le droit alimentaire différencie en effet date limite de consommation et date de durabilité minimale (lire l’encadré). Le fabricant garantit la qualité des articles portant cette dernière jusqu’à cette limite. Au-delà, il n’est plus responsable du produit. La responsabilité passe à celui qui poursuit la vente. A lui de veiller, par sondages réguliers, à ce que la marchandise reste consommable.»
Conserves à détruire
Pour l’heure, le Laboratoire cantonal a dû avertir deux fois Casse-Prix. Une première fois pour la vente de produits trop périssables. «Après notre intervention, ils ont été retirés de la vente», rapporte M. Klein. La seconde fois après que Bon à Savoir ait fait un petit tour dans ce magasin. Et découvert un tas de boîtes de tomates pelées, toutes cabossées et même rouillées, mais dont le datage n’était pas encore dépassé.
Alerté par nos soins, le chimiste cantonal a aussitôt envoyé l’un de ses inspecteurs sur place. Résultat: les boîtes ont dû être retirées de la vente pour être détruites. «Lors du développement de micro-organismes dans des conserves, les boîtes se bombent, commente M. Klein. Or, si elles sont cabossées, on ne peut plus voir si elles sont bombées! Il ne reste alors que l’analyse en laboratoire pour vérifier le contenu.»
«Cette marchandise était parfaite, rétorque laconiquement Georges Bloch, patron de Casse-Prix, et seul en Suisse à vendre des aliments au datage dépassé. Mais pour leur faire plaisir, nous avons retiré ces boîtes de la vente. Nous en avions déjà vendu 120000, sans réclamation aucune. En cinq ans de vente de denrées alimentaires, dont certaines avec un datage dépassé, aucun de nos clients n’a été malade. Mais les gens insatisfaits peuvent rapporter les articles pour les échanger contre d’autres produits ou un bon d’achat.» Mais comment savoir si des aliments sont encore propres à la consommation? «Il est impossible de dire pendant combien de temps chaque denrée reste consommable», explique Bernard Klein. Tout dépend de la qualité, du mode de fabrication, de l’emballage et des conditions de stockage. A part les analyses de laboratoire, le meilleur moyen reste donc de regarder, sentir et goûter.
«C’est une véritable loterie, constate Mme Jaquier: on ne peut pas être sûr que la marchandise sera encore consommable avant de l’ouvrir. Ce n’est donc pas économique d’acheter chez Casse-Prix, si ensuite on doit jeter la moitié des marchandises ou les ramener au magasin. Je n’y retournerai pas.»
Ellen Weigand
CHERCHEZ LA DATE
A consommer de préférence avant le...
L’Ordonnance fédérale sur les denrées alimentaires (art. 25/26) définit quelles denrées alimentaires doivent être datées et comment.
La date limite de consommation est celle avant laquelle une denrée alimentaire très périssable (risquant une rapide prolifération de micro-organismes) doit être consommée. Elle doit être indiquée par «à consommer avant le...». Après, l’aliment ne doit plus être remis comme tel au consommateur. Mais une viande hachée crue peut être vendue si elle est cuite au moment de l’échéance.
La date de durabilité minimale indique jusqu’à quand une denrée moins périssable garde ses qualités dans de bonnes conditions de conservation. A indiquer par: «à consommer de préférence avant le...» ou «à consommer de préférence avant fin...». Ainsi datés, les articles peuvent être vendus après l’échéance.
Certains aliments sont exempts de datage. Parmi eux: les fruits et légumes frais non pelés, coupés ou traités autrement, le vinaigre, le sel, les sucres et le miel.