Urgent pour le médecin, mais pas pour la loi
Un traitement hors du canton de domicile est remboursé en cas d’urgence par l’assurance de base. Mais l’urgence selon la loi n’est pas la même que l’urgence médicale.
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Bon à Savoir 12-2007
05.12.2007
Dernière mise à jour:
18.01.2023
Suzanne Pasquier
La libre circulation des patients en Suisse fait certes l’objet de débats au Parlement fédéral, mais elle est loin d’influencer la pratique des différents acteurs de la santé. Le cas d’un habitant de St-Imier (BE) hospitalisé dans le canton de Neuchâtel en décembre 2005 en est un bon exemple. Ce quinquagénaire à la santé fragile, aujourd’hui décédé, avait été admis en urgence à l’hôpital de la Chaux-de-Fonds (à 15 km de chez lui) à cause d’une pneumonie doublé...
La libre circulation des patients en Suisse fait certes l’objet de débats au Parlement fédéral, mais elle est loin d’influencer la pratique des différents acteurs de la santé. Le cas d’un habitant de St-Imier (BE) hospitalisé dans le canton de Neuchâtel en décembre 2005 en est un bon exemple. Ce quinquagénaire à la santé fragile, aujourd’hui décédé, avait été admis en urgence à l’hôpital de la Chaux-de-Fonds (à 15 km de chez lui) à cause d’une pneumonie doublée d’un état confusionnel aigu. Il avait choisi cet établissement parce qu’il devait de toute façon s’y rendre le lendemain pour un traitement ambulatoire en cours depuis plusieurs semaines.
A sa sortie, trois jours plus tard, la surprise a été de taille: sur une facture d’hospitalisation de 8769 fr., seuls 2740 fr. étaient pris en charge par l’assurance maladie de base. Selon la loi, en effet, le patient bernois n’avait pas de «raison médicale» de se rendre dans un hôpital à l’extérieur de son canton de domicile. Une analyse confirmée par le médecin cantonal bernois ainsi que par le médiateur de l’assurance maladie, auquel le cas a été soumis.
Selon le médiateur, cette malheureuse affaire, loin d’être exceptionnelle, illustre bien les effets indésirables du fédéralisme. En réalité, un refus partiel de remboursement guette toutes les personnes tentées de franchir une frontière cantonale pour se faire soigner, à moins qu’elles puissent invoquer une raison médicale prévue par la loi (lire ci-dessous). Et pour autant, bien sûr, qu’elles n’aient pas conclu une assurance complémentaire pour hospitalisation dans toute la Suisse.
En l’absence d’une telle couverture, voici comment se règlent les différents cas d’hospitalisation hors du canton de domicile dans un établissement admis par l’assurance de base (LAMal).
> Une hospitalisation pour des «raisons médicales» – Le patient voit ses frais entièrement remboursés (après déduction de la franchise et de la quote-part) lorsque son hospitalisation a été motivée par des «raisons médicales». C’est-à-dire en cas d’urgence, ou lorsque le traitement dont il a besoin n’est pas disponible dans son canton. L’urgence est reconnue lorsque le patient séjourne hors de son domicile et qu’on ne peut lui imposer de retourner chez lui pour se faire soigner.
Le surcoût occasionné par la différence de facturation entre le lieu du traitement et le canton de domicile est alors pris en charge par ce dernier. Hormis les cas d’urgence, la garantie de paiement par le canton de domicile doit d’ailleurs être demandée avant le début du traitement.
> Une hospitalisation «de convenance» – En l’absence de «raisons médicales», l’assurance de base ne prend en charge les coûts qu’à concurrence du tarif applicable dans le canton de domicile. Comme on l’a vu, la facture peut être lourde pour l’assuré, car les tarifs du lieu de l’hospitalisation sont plus élevés pour les patients extra-cantonaux.
> Un traitement ambulatoire – Comme en cas d’hospitalisation, il est remboursé entièrement lorsqu’il est motivé par une urgence. Il l’est aussi lorsqu’un traitement adéquat n’était pas disponible au lieu du domicile, du travail ou dans leurs environs. Par ailleurs, en l’absence de «raison médicale», le patient peut également se faire soigner sur son lieu de travail ou ses environs sans compromettre la prise en charge par l’assurance de base.
Les conséquences financières d’un traitement ambulatoire de convenance sont nettement moins lourdes qu’en cas d’hospitalisation. Les patients extra-cantonaux n’assument en effet que l’éventuelle différence de valeur des points tarmed. Et dans les faits, les assurances prennent souvent à leur charge ce léger surcoût. C’est précisément ce qui s’est passé dans le cas de notre lecteur, pour le traitement ambulatoire entamé avant l’hospitalisation en urgence.
> Cas particuliers – Les hôpitaux multisites à cheval sur deux cantons, comme celui du Chablais (Vaud et Valais), ont un statut particulier. Les assurances traitent de la même manière les personnes domiciliées dans toute la région, même si elles passent la frontière cantonale pour se faire soigner.
Par ailleurs, sont considérés comme des hôpitaux du canton ceux qui figurent sur la liste des établissements dressée par le canton, quel que soit leur emplacement.
Suzanne Pasquier