Une réserve trop dissuasive
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Bon à Savoir 12-1999
08.12.1999
Christian Chevrolet
Claudine Ballifard et son mari ont vécu les dix dernières années de leur vie commune dans un petit appartement, à Lausanne. A la mort de ce dernier, en 1995, sa veuve a reçu une lettre de la gérance Sogirom, l’informant que le contrat se poursuivait aux mêmes conditions et qu’elle bénéficiait d’un loyer inchangé de 1100 fr., ce qui est tout à fait normal. Il était cependant ajouté que le loyer réel s’élevait à 1260 fr. et que le bailleur «invoquera à l’avenir cette...
Claudine Ballifard et son mari ont vécu les dix dernières années de leur vie commune dans un petit appartement, à Lausanne. A la mort de ce dernier, en 1995, sa veuve a reçu une lettre de la gérance Sogirom, l’informant que le contrat se poursuivait aux mêmes conditions et qu’elle bénéficiait d’un loyer inchangé de 1100 fr., ce qui est tout à fait normal. Il était cependant ajouté que le loyer réel s’élevait à 1260 fr. et que le bailleur «invoquera à l’avenir cette réserve, par exemple pour s’opposer à une demande de baisse de loyer».
Impressionnée, Claudine Ballifard n’a donc jamais demandé de baisse, alors que la dernière augmentation de son loyer datait de 1992, une époque où le taux hypothécaire était au plus haut. Il a fallu une récente discussion avec sa fille pour que cette dernière saisisse le téléphone et demande à la gérance en quoi consistait exactement cette réserve, puisque sa mère aurait pu demander une réduction de presque 18% l’été dernier. La gérance persiste et signe: non, la réserve l’empêche de demander une baisse. C’est à ce moment que le dossier est arrivé sur les bureaux de notre rédaction.
Le poids des travaux
Examen fait, il existe bel et bien une réserve sur le bail initial. Elle n’est toutefois estimée (à 2%) que dans la dernière notification de hausse du loyer (novembre 1992), ce qui n’est déjà pas normal. Mais passons: à cette date, le loyer aurait donc dû passer à 1122 fr. au lieu de 1100 fr. Pourquoi notre lectrice n’aurait-elle donc pas droit à une baisse, déduction simplement faite de la réserve?
«Mais Mme Ballifard a droit à une diminution de loyer et il faut qu’elle nous la demande, répond Hugues de Siebenthal, directeur de Sogirom. Il y a vraisemblablement eu un malentendu lors du téléphone avec sa fille. Cette baisse ne sera toutefois pas aussi importante que vous l’avez calculée, car nous avons récemment fait d’importants travaux dans cet immeuble, nos charges ont augmenté et le taux hypothécaire va remonter.» Selon ses calculs, Mme Ballifard aurait donc droit à une baisse d’environ 90 fr. à la prochaine échéance de son bail, soit en avril 2000. Elle va bien sûr s’empresser de la demander.
Elle pourrait peut-être même obtenir plus. En chiffres et en pour-cent, le calcul est en effet correct (nous l’avons vérifié).
Mais retenir 3% pour les travaux ainsi qu’une augmentation forfaitaire des charges de 0,5% par an, c’est compter large. La gérance devrait justifier ses chiffres devant un tribunal, ce qu’elle ne conteste pas.
Quant à la lettre reçue par Mme Ballifard après la mort de son mari, M. de Siebenthal admet qu’elle pourrait être formulée différemment, mais estime qu’elle est claire et n’interdit pas de demander une baisse. Elle ne l’interdit pas, c’est vrai, mais elle a été suffisamment dissuasive pour empêcher notre lectrice de réclamer son dû.
Christian Chevrolet