Avec ou sans testament, un enfant hérite presque toujours de ses parents. Il existe certes des exceptions (lire «Je te déshérite!», TCF 8/2011*), mais elles sont rares. Les descendants profitent, en effet, de ce qu’on appelle les «réserves héréditaires», qui correspondent à la part de l’héritage à laquelle ils ont obligatoirement droit, quoi qu’aient prévu les parents.
Si l’un des parents vit encore:
- sans testament, le conjoint survivant touche la moitié de la succession et les enfants se partagent l’autre moitié;
- avec un testament, le conjoint a droit à au moins un quart de la succession et les enfants à au moins trois huitièmes. Le solde (trois huitièmes aussi) correspond à ce qu’on appelle la «quotité disponible» que le défunt est libre de léguer à qui il veut.
Il y a donc moyen de favoriser les enfants au détriment du conjoint survivant, en leur accordant les trois quarts de l’héritage via un testament.
Si le parent survivant décède:
- sans testament, les enfants héritent de la totalité;
- avec un testament, ils ont droit à au moins trois quarts de la succession, le solde (un quart) restant disponible.
A noter que tant qu’il y a des descendants (enfants ou petits-enfants par défaut), aucun autre parent – excepté le conjoint survivant – n’a un droit d’hériter. Mais le défunt a pu léguer les quotités disponibles à d’autres héritiers.
Né d’un premier mariage
Qu’en est-il, maintenant, des enfants nés d’un premier mariage du conjoint? Aussi cruel que cela puisse paraître par rapport aux nombreuses années qu’ils ont peut-être vécues avec le défunt, ils ne lui sont rien… Autrement dit: la loi les considère comme des tiers, qui ne peuvent bénéficier que de la quotité disponible, et sur laquelle – en plus – ils vont souvent devoir payer des impôts à frémir…
La seule chance – si l’on ose dire – de contourner cette injustice, c’est que le beau-parent décède avant le vrai parent. Exemple: Paul épouse Marie, déjà mère de deux enfants, Steven et Julia. Ils n’ont pas d’autres enfants. Si Paul décède avant Marie, elle peut toucher la totalité de la succession. Du coup, à sa mort, Steven et Julia hériteront indirectement des biens de Paul, en payant des impôts très réduits. Mais, si c’est Marie qui décède avant Paul, Steven et Julia auront droit, au mieux, à la moitié de l’héritage de leur mère, et ne toucheront plus rien à la mort de Paul.
On évoque souvent, dans ce cas, la possibilité pour le beau-parent d’adopter les enfants, qu’ils soient mineurs ou majeurs, de l’autre conjoint. Pas facile! Certes, l’article 266 du Code civil (CC) le prévoit, pour autant que l’enfant ait vécu au moins cinq ans avec le parent adoptif et qu’il y ait de justes motifs. Mais le Tribunal fédéral est clair: les motifs successoraux uniquement ne sont pas suffisants! Et cela n’est de toute façon possible que si l’adopté n’a plus son père ou sa mère biologiques et que l’adoptant n’a pas de descendance.
Pas reconnu
Autre cas difficile, celui des enfants qui ne sont pas reconnus. Exemple: Sonia a toujours affirmé à son fils, Marc, que son ex-ami, René, était son père biologique. Ce dernier ne l’a pourtant jamais reconnu. A son décès, Marc n’aura donc le droit à aucune réserve héréditaire. Certes, là aussi, la loi (art. 261 à 263 du CC) prévoit que la mère et l’enfant peuvent demander devant la justice que le père reconnaisse sa progéniture, notamment par le biais des analyses scientifiques. Mais, sauf exception, Marc doit le faire dans l’année suivant sa majorité, donc, le plus souvent, plusieurs décennies avant la possibilité d’un héritage!
*Toutes nos archives sont disponibles, gratuitement pour nos abonnés, sous www.toutcomptefait.ch