Les parents croient souvent que, en faisant une avance sur héritage, «c’est tout ça qui n’ira pas à l’Etat». C’est faux. Lorsqu’elles sont imposées, les donations à une descendance directe sont taxées au même titre que les successions et à peu près dans les mêmes proportions, comme dans les cantons de Vaud et de Neuchâtel en Suisse romande (lire «Quand le fisc se mêle à la famille», TCF 4/2012).
Reste le cas où les parents finissent leurs jours dans un EMS, sans avoir les moyens d’assumer la totalité de leur pension. Ils peuvent alors déposer une demande de prestations complémentaires (PC AVS/AI) pour faire le joint. Mais, pour savoir s’ils ont droit à ces prestations, les autorités compétentes vont faire un calcul assez complexe incluant les donations accordées au préalable. Autrement dit: elles tiennent compte d’une fortune qui est pourtant passée entre d’autres mains…
Du coup, il ne reste qu’une solution aux pensionnaires: demander l’aide sociale à leur commune. Elle la leur accordera, mais se retournera alors vers leurs descendants en invoquant ce que le Code civil appelle la «dette alimentaire», laquelle oblige les enfants vivant «dans l’aisance» à assister leurs parents s’ils tombent dans le besoin. Un devoir que les pouvoirs publics ont renoncé à exiger, sauf lorsqu’il y a eu donation relativement importante au préalable.
Faites vos calculs
Or, à l’occasion de l’actualisation de son «Guide des successions», Tout Compte Fait a emboité le même pas avec son calculateur* permettant d’estimer la participation que l’Etat, dans un tel cas, peut demander aux bénéficiaires du don.
Prenons l’exemple d’un couple vaudois qui a donné sa maison à son fils en l’an 2000. Sa valeur était de 700 000 fr. avec une hypothèque de 150 000 fr.
Monsieur est décédé l’an dernier et Madame, rentière AVS, doit entrer en EMS. Son revenu annuel (rentes AVS et LPP) est de 48 000 fr., alors que les frais de pension sont de 58 120 fr. Si on ajoute les frais personnels, il manque 13 000 fr. par an pour couvrir les dépenses.
En tenant compte de tous les paramètres, notamment la déduction de 10 000 fr. que les enfants peuvent faire pour chaque année séparant l’année de la donation de l’entrée en EMS, et les déductions forfaitaires accordées sur la fortune (37 500 fr.), l’enfant devra couvrir le déficit de sa mère (soit 1083 fr. par mois) jusqu’en 2023, cette participation diminuant ensuite pour, définitivement, disparaître en 2028. Il aura toutefois dû ristourner 183 180 fr. sur la valeur de la maison (550 000 fr. hors hypothèque).
Un montant total un peu moins élevé à celui qu’aurait perçu Berne (186 225 fr.), mais presque identique à ceux de Genève et de Neuchâtel, et supérieur aux prétentions du Valais (133 280 fr.) et de Fribourg (115 200 fr.), alors que le Jura renonce à demander une participation pour une donation faite il y a plus de cinq ans.
Christian Chevrolet