La grande distribution n’a jamais communiqué avec autant de fracas le réajustement des prix. En veux-tu, en voilà, les annonces de baisses se succèdent à un rythme étourdissant. Il faut dire que les enseignes ne pouvaient justifier plus longtemps la stagnation des prix des produits importés dans un environnement marqué par la force du franc face à l’euro. Mais, comme le démontre notre enquête, les efforts consentis par les distributeurs ne suffisent pas à réduire l’attractivité des magasins français, voire allemands (lire encadré).
Caddie 44,8% moins cher!
Le 16 septembre 2010, Bon à Savoir (lire BàS 10/2010) avait établi un premier comparatif en relevant le prix d’une dizaine d’articles vendus par quatre enseignes présentes des deux côtés de la frontière: Aldi, Migros, Casino et Lidl. En tenant compte du taux de change du moment (l’euro à 1.3575 fr.), les économies réalisées dans les supermarchés français étaient édifiantes. Pour un caddie identique, le ticket était 42,8% moins salé chez Casino, 32,7% chez Aldi, 28% chez Lidl et 26,8% chez Migros.
Le 26 août dernier, un pointage des mêmes produits a été fait dans les mêmes commerces avec une conversion de l’euro à 1.1697. Or, force est de constater que le fléchissement de la monnaie européenne (–13,83%) observé entre nos deux relevés a eu des répercussions diverses: chez Aldi, le fossé s’est sensiblement creusé avec une dégringolade des prix de 23,4% en France contre seulement 6,2% en Suisse. Par conséquent, le chariot rempli de l’autre côté de la frontière est près de deux fois moins cher (44,8%) pour des produits similaires!
Chez Casino, le grand écart (42,8%) enregistré en septembre dernier s’est stabilisé à 42,2%. Chez Migros, les économies réalisées en France pour un panier identique ont progressé de 26,8% à 31,2%. L’enseigne qui incite désormais le moins les ménages helvétiques à passer la frontière, est le hard discounter Lidl. En effet, la différence s’est réduite de 28% à 25,7% entre les deux pays.
Efforts visibles
Toutefois, on remarque que de nombreux prix ont été revus à la baisse dans les rayons helvétiques. Par rapport à septembre 2010, la valeur du caddie a diminué de 7,1% chez Casino, 6,2% chez Aldi et 5,8% chez Lidl. Ce qui signifie que l’effondrement de l’euro face au franc suisse a été partiellement répercuté. Chez Migros, la baisse est très timide (–0,1%). C’est que la proportion de produits fabriqués en Suisse est plus élevée qu’ailleurs. Or, ces articles ne bénéficient pas de l’effet de change, contrairement à ceux qui sont importés.
Sans surprise, la viande reste très avantageuse en France, au même titre que les légumes de production indigène. Difficile en revanche d’expliquer les différences de prix abyssales que nous avons relevées chez Casino. On en veut pour preuve le beurre Saint-Huber Oméga 3 vendu 187% plus cher en Suisse qu’en France, les pots de crème dessert Danette au chocolat (+139,9%) ou encore le riz Uncle Ben’s (+96,1%).
Déplacement à calculer
Quoi qu’il en soit, faire ses courses en France peut générer des économies importantes dans une enseigne comme dans l’autre. Mais il convient de ne pas omettre les frais de déplacement dans son calcul. En résumé, plus on habite proche de la frontière et – plus le montant des achats est élevé (dans le respect des quantités admises*) –, plus le jeu en vaut la chandelle. Libre ensuite à chacun de prendre en compte l’impact écologique du trajet et la perte de temps occasionnés par ce tourisme particulier.
Yves-Noël Grin
Bonus web:limites à ne pas dépasser à la douane
Pour télécharger le tableau comparatif, se référer à l'encadré au-dessous de la photo.
POINTAGE DE NOS CONFRÈRES
Des différences spectaculaires avec l’Allemagne
Nos confrères alémaniques du magazine Ktipp se sont prêtés au même exercice en comparant des produits vendus par Migros, Aldi et Lidl des deux côtés du Rhin. Lors d’un relevé effectué le 9 août dernier, l’écart des prix entre les supermarchés situés à Bâle et à Lörrach (D) s’est avéré spectaculaire.
Sans exception, les vingt-quatre produits pointés chez Lidl étaient plus onéreux en Allemagne. La palme revient au déodorant Cien vendu 160% plus cher en Suisse. Idem chez Lidl, où de nombreux articles sont affichés deux fois leur prix dans les supermarchés helvétiques. L’exemple le plus extrême? Le paquet de spaghettis Combino, qui bondit de 40 ct. à 1.15 fr. (+184%) lorsqu’il traverse le Rhin.
Chez Migros, le constat n’est guère plus reluisant, même si les différences sont plus faibles. Sur l’ensemble des produits, un dixième reste malgré tout meilleur marché en Suisse. L’écart le plus marqué a été constaté sur le bac de glace Crème d’Or Caramel vendu 81% plus cher à Bâle qu’à Lörrach.