Le «mal absolu» a un nouveau nom: smartphone! C’est en tout cas la première impression que laisse la lecture d’un rapport rédigé par l’antenne américaine de Greenpeace. L’organisation est connue pour ses méthodes radicales et son verbe acéré. Voilà donc qu’elle accuse le meilleur ami de l’homme – n’ayons pas peur des mots – des pires maux.
Dans sa ligne de mire, les conditions de production de nos petits bijoux technologiques. Le cobalt qu’ils contiennent, extrait en République démocratique du Congo, finance les milices armées, tandis que les conditions de travail des mineurs font passer Germinal de Zola pour une partie de plaisir. Dans les usines asiatiques, c’est la mine aussi, pour les travailleurs, exposés aux pires substances chimiques, sans parler des quantités pachydermiques d’énergie englouties dans le processus de fabrication. Tout cela pour un «gadget» (sic!) utilisé en moyenne un peu plus de deux ans, déplore Greenpeace, qui pointe encore du doigt le taux de recyclage très faible de ses composants (16%). Lâchez donc immédiatement ce machin inutile, vous avez du sang sur les mains et la mort de la planète sur le dos!
Plus sérieusement, le document américain n’est pas un brûlot exigeant le retour du télégraphe. Plutôt bien ficelé, il appelle avant tout à un nouveau modèle de production dit «circulaire». Durée de vie, recyclage et réparations en sont les maîtres-mots. Aux yeux de l’organisation, le mobile de demain devrait être conçu pour fonctionner plus longtemps, réparable et «upgradable» à bas coût, et se composer d’éléments recyclés. Les usines utiliseraient 100% d’énergies renouvelables et renonceraient aux substances chimiques problématiques.
Mais revenons sur Terre. Sans un soutien massif des consommateurs et une évolution des mentalités, ces propositions resteront lettre morte, car elles se trouvent aux antipodes de la logique mercantile des fabricants. Pour ces derniers, le portable idéal est celui que le consommateur remplace vite. Depuis la création du smartphone, il y a dix ans, 7,1 milliards d’appareils ont ainsi été vendus.
Sébastien Sautebin