Morgana, 13 ans, n’avait jamais été malade. Mais, en automne 2005, elle se sent souvent fatiguée et peine à se concentrer. Rien d’alarmant pour une adolescente. On lui prescrit des vitamines. Puis un soir, fin novembre, elle se sent mal. Ses parents pensent à un problème intestinal. Mais à peine deux jours plus tard, son état s’aggrave: le blanc de ses yeux et sa peau virent au jaune. «Nous sommes tout de suite allés chez le médecin qui a pensé à une bonne jaunisse», se souvient Rita, sa mère.
Transfert d’urgence
Une demi-heure après la consultation, l’enfant ne peut soudain plus marcher. Transportée d’urgence à l’Hôpital de Morges (VD), son état empire d’heure en heure. Elle est transférée aux soins intensifs du CHUV de Lausanne le soir même, puis à l’Hôpital universitaire de Genève (HUG), spécialisé en transplantations du foie, le lendemain.
Après diverses analyses, on annonce aux parents de Morgana que leur fille a un besoin urgent d’une greffe du foie. «J’ai proposé de donner un bout du mien», raconte sa maman. Mais cette option n’a pas été retenue: le sien était totalement détruit par une maladie génétique rare, la maladie de Wilson, qui empêche l’organisme d’éliminer le cuivre, si bien qu’il s’accumule dans le foie.
A l’évocation de ces moments où sa fille unique était entre la vie et la mort, l’émotion submerge encore Rita. Son mari, Vincenzo, enchaîne: «Dans ces cas d’urgence, il est rare de trouver immédiatement un greffon. Par miracle, nous n’avons dû attendre que deux heures!»
La transplantation, elle, durera quinze heures. Mais l’adolescente n’est pas encore tirée d’affaire. La destruction de son foie a entraîné l’arrêt d’autres organes, notamment des reins. Elle échappe de justesse à une autre greffe, celle des reins, mais passe trois mois à l’hôpital, dont cinq jours en coma artificiel et vingt-cinq jours de dialyse.
Un an et demi après, Morgana a retrouvé son sourire, ses copains d’école et une vie normale. «Je me sens bien. Pendant un an, je ne pouvais pas courir car je portais provisoirement un drain, ni manger des choses crues à cause du risque d’infection. Mais aujourd’hui je n’ai plus que quelques médicaments à prendre (réd.: pour prévenir le rejet).»
«Je remercie les parents qui ont accepté de donner le foie de leur proche décédé pour sauver ma vie», tient-elle à dire. Tout comme elle a voulu expliquer à ses camarades de classe pourquoi le don d’organes est nécessaire: «Si l’on ne donne pas les organes de quelqu’un qui n’est plus vivant, ils disparaissent pour toujours. Si on les donne, on peut sauver une autre personne qui est encore vivante!»
En 2006, 1304 personnes attendaient une greffe en Suisse. Seules 443 d’entre elles ont pu être greffées. 40 patients sont décédés.Ellen Weigand
carte de donneur
Mieux vaut prendre sa décision à tête reposée
La nouvelle Loi sur la transplantation va entrer en vigueur le 1er juillet prochain. Elle stipule que le défunt ou ses proches doivent avoir accepté préalablement le prélèvement d’organes. Par exemple en signant une carte de donneur (à découper ci-dessous), ce qui est autorisé dès l’âge de 16 ans. La carte est distribuée en pharmacie et par Swisstransplant*, qui coordonne les activités liées à la transplantation. On peut encore y indiquer qu’on ne souhaite pas être donneur, ou de certains organes seulement.
En juillet, l’Office fédéral de la santé lancera une campagne d’information et enverra de nouvelles cartes aux ménages suisses. On pourra aussi y indiquer le nom d’une personne de confiance qui confirmera si le porteur de la carte est donneur ou non. La carte ci-dessous reste toutefois valable.
Comme l’explique Conrad Müller, directeur de Swisstransplant: «Peu de gens ont envie de penser à leur mort ou à celle de leurs proches. Mais réfléchir tranquillement au don d’organes alors que tout va bien rend moins difficile la décision que d’avoir à le faire au moment où l’on vient de perdre un être cher».
*http://swisstransplant.org, numéro gratuit: 0800 570 234.