Retour sur une assurance
L’assurance responsabilité civile suffit à couvrir le préjudice réel des passagers d’une automobile. L’assurance occupants est, au mieux, une assurance supplémentaire offrant une surindemnisation.
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Bon à Savoir 04-1999
14.04.1999
Christian Chevrolet
Rarement un article aura suscité un tel échange de courrier! Dans notre édition de février, notre collaborateur Fernand Cerf, juriste au bénéfice d’une large expérience dans le domaine des assurances, critiquait méthodiquement les arguments employés pour «placer» une assurance occupants. Ce qui a provoqué la colère des assureurs interpellés par nos lecteurs, et le trouble de ces derniers à qui ces mêmes assureurs répondaient que nous n’y connaissions rien! Remettons donc,...
Rarement un article aura suscité un tel échange de courrier! Dans notre édition de février, notre collaborateur Fernand Cerf, juriste au bénéfice d’une large expérience dans le domaine des assurances, critiquait méthodiquement les arguments employés pour «placer» une assurance occupants. Ce qui a provoqué la colère des assureurs interpellés par nos lecteurs, et le trouble de ces derniers à qui ces mêmes assureurs répondaient que nous n’y connaissions rien! Remettons donc, pour la dernière fois, l’église au milieu du village.
Autrefois, l’assurance RC ne couvrait pas les proches du détenteur du véhicule et l’assurance occupants était presque indispensable. Mais la loi a changé en 1976. A l’époque déjà, le Touring Club Suisse (TCS) éditait donc une brochure au titre évocateur: «Qui a encore besoin d’une assurance occupants?» Depuis l’entrée en vigueur de la LAA (1984), puis de la LAMal (1996), la réponse est claire: personne, s’il s’agit de couvrir le préjudice réel des passagers, au même titre que celui d’un piéton innocent qui serait blessé par la faute du même conducteur.
Nous avons demandé aux assureurs indignés de nous transmettre un cas où l’assurance occupants leur semblait indispensable. Aucun d’entre eux n’a réussi à nous faire changer d’avis. Nous avons en revanche fait les constats suivants.
• L’assurance occupants est souvent utilisée à la place de la RC. Très souvent au détriment de l’assuré qui aurait été mieux indemnisé avec la RC, ce qui est un comble.
• Une assurance occupants pourrait tenter une petite catégorie d’automobilistes: un indépendant sans assurance perte de gains (APG) avec charge de famille, ou une personne non salariée (mais pas un chômeur), avec charge de famille. Mais seulement s’il est détenteur et conducteur fautif. En tel cas, les frais médicaux seront pris en charge via la LAMal, mais pas la perte de gain (ou de soutien). En pareille situation toutefois, ce n’est pas une assurance occupants, réservée à la seule situation décrite ci-dessus, qui est indispensable, mais bien une assurance accidents individuelle, valable dans toutes les activités de la vie (déplacements à pied, sports, loisirs, etc.), y compris au volant d’une voiture.
• L’assurance occupants permet de cumuler certaines prestations avec celles d’autres assurances, avec celles de la RC automobile par exemple. Nous ne l’avons jamais nié, mais nous réfutons cet argument pour déclarer ladite assurance indispensable. Nous répétons au contraire qu’elle est superflue pour la couverture du préjudice réel des passagers. Elle peut en revanche servir d’assurance supplémentaire à celui qui souhaite une surindemnisation.
En conclusion: si l’assurance occupants n’avait pas été conçue à une époque où elle était indispensable, elle n’existerait pas. Les assureurs proposeraient d’autres produits plus clairs et plus larges, couvrant au-delà du domaine automobile. Mais comme un conducteur sur deux possède encore une telle police et que c’est un secteur particulièrement juteux, personne n’a intérêt à changer les habitudes. Qu’on nous permette de le regretter et d’en informer nos lecteurs!
Christian Chevrolet