Les pères divorcés ne devraient pas être privés de leurs enfants. C’est en substance ce qu’ont demandé, via une pétition déposée en février dernier, des associations de pères. Leur objectif: faire de l’autorité parentale conjointe une règle dans les situations de divorce.
L’exemple de Lucie et François*, couple Vaudois en cours de séparation, est éloquent. Parfaitement d’accord sur le principe de mettre un terme à son mariage avec Lucie, François ne peut pas se résoudre à l’idée de perdre son autorité parentale sur ses deux enfants, Jeanne et Grégoire*, âgés respectivement de 10 et 12 ans. Certes, le nouveau droit du divorce, entré en vigueur en 2000, prévoit l’autorité parentale conjointe, mais la conditionne à l’approbation des deux parents. Dans le cas précis, cela signifie que François n’a aucune chance de partager l’éducation de ses enfants si Lucie s’y oppose.
> En cas d’opposition de la mère – En l’état actuel, le père n’a aucun moyen pour que le juge tranche en faveur de l’autorité parentale conjointe. La mère bénéficie alors seule de l’autorité parentale et le père a un droit de visite et paie une pension alimentaire, calculée en fonction des besoins et de son revenu.
> En cas d’accord – Une demande de maintien de l’autorité parentale conjointe après le divorce doit être déposée par les deux parents. Si la solution est compatible avec le bien de l’enfant, le juge ratifie une convention entre les parents, réglant leur participation à la prise en charge de l’enfant et à la répartition des frais d’entretien.
Cette dépendance à la décision de la mère est jugée inadmissible par les associations de pères qui, par leur pétition, appuient le postulat du conseiller national Reto Wehrli (PDC/SZ) déposé l’an dernier en faveur d’un assouplissement de l’attribution de la garde parentale conjointe.
Autorité parentale conjointe
Même si ce n’est de loin pas la règle, environ un quart des couples divorcés bénéficie aujourd’hui de l’autorité parentale conjointe. Or, celle-ci peut s’exercer de deux façons distinctes:
> Sans garde alternée – L’autorité est exercée conjointement par les deux parents, mais l’enfant conserve un domicile fixe chez l’un, le plus souvent la mère, et se rend chez l’autre une partie des week-ends et des vacances.
> Avec garde alternée - Engage le père et la mère dans une proportion égale. Dans ce cas, l’enfant vit chez l’un puis chez l’autre parent, pour une période plus ou moins équivalente (par exemple une semaine chez la mère et une semaine chez le père, les week-ends et les vacances étant tout aussi équitablement répartis).
Suisse plus restrictive
En France, comme en Allemagne ou en Grande-Bretagne, l’autorité parentale conjointe constitue la solution normale dans un divorce, sauf cas particuliers. La Suisse étant à l’heure actuelle plus restrictive, de nombreux parents, à l’instar de François dans notre exemple, vivent mal une séparation devenue pourtant inévitable.
Zeynep Ersan Berdoz
* Prénoms d’emprunt.
conséquences financières
Avantages fiscaux pour qui?
Le maintien de l’autorité parentale conjointe, spécialement si elle est couplée avec une garde alternée (voir texte ci-dessus), peut également bouleverser le mode traditionnel de répartition des frais d’entretien, dans lequel le parent qui a la garde de l’enfant assume la totalité des frais le concernant et reçoit à cet effet une pension de son ex-conjoint. Explications:
> Ressources financières distinctes – Si les ex-époux n’ont pas des revenus comparables, celui qui gagne le plus paie une pension alimentaire à l’autre. Dans le cas du couple cité en exemple dans le texte ci-dessus, le fisc vaudois en tient compte en attribuant le quotient pour famille monoparentale de 0,5% (qui, dans le canton de Vaud, diminue le revenu servant à calculer l’impôt) à celui qui touche la pension alimentaire et non à celui qui la paie.
> Ressources financières équivalentes – En revanche, si les ex-époux ont des revenus comparables, il n’y a pas de pension à prévoir de l’un à l’autre pour l’entretien de l’enfant. Chaque parent assume les frais de logement et de nourriture de l’enfant chez lui. Les autres dépenses (par exemple, l’assurance maladie, le dentiste, l’habillement, la garde, etc.) sont en général payées par l’un des parents et ensuite partagées. Dès l’instant où les frais liés à l’enfant sont assumés de manière équitable par chacun des parents, la part du quotient de 0,5% peut être partagée par moitié entre les ex-époux, mais à condition qu’ils en fassent la demande.