Au printemps dernier, Eric Berdoz (photo) est réveillé par l’alarme de sa pompe de relevage des eaux usées. Il constate que l’un des fusibles a sauté, le change, sans toutefois parvenir à remettre la machine en route. Un dépanneur du fabricant, appelé à la rescousse, ne peut pas faire mieux. Il cherche alors du côté du réseau électrique et constate un disfonctionnement dans un coffret du fournisseur d’électricité, Romande Energie. N’ayant pas l’autorisation d’intervenir lui-même, il contacte un spécialiste de l’entreprise, qui découvre qu’une défaillance, au niveau du poteau d’arrivée de l’électricité, a causé la panne et répare l’installation.
Lorsqu’il reçoit la facture du technicien intervenu pour réparer sa pompe, notre lecteur pense tout naturellement que Romande Energie va payer la note, puisque ses installations sont en cause. Erreur! Dans la réponse qu’il adresse à sa requête, le fournisseur d’électricité reconnaît certes que la panne a été causée par un disfonctionnement de son matériel, en l’occurrence une tête de câble alimentant son domicile et dont la défaillance a causé un court-circuit avec mise à terre. Mais pas question, pour autant, d’entrer en matière pour un remboursement de l’intervention du technicien: «Comme l’indiquent nos conditions générales, en présence d’une défaillance de matériel, notre responsabilité n’est pas engagée», se justifie la porte-parole de Romande Energie.
Coupable mais pas responsable
Il est vrai que, en signant son contrat de fourniture d’électricité, notre lecteur a accepté les conditions générales. Reste à savoir si elles sont licites, car des clauses non conformes à la loi peuvent être frappées de nullité par la justice. Or, il semble bien que oui… Certes, l’article 27 de la loi sur les installations électriques (LIE) indique que l’exploitant est responsable des dommages physiques et matériels qu’il cause. Mais il ajoute une nuance de taille: pour les dommages causés aux choses, les «perturbations de l’exploitation» font exception à la règle.
Cette brèche n’a pas échappé aux fournisseurs d’électricité: un document de recommandation de la branche – le «Distribution Code Suisse» – comporte, en effet, un article qui fait directement écho à celui de la LIE: «L’utilisateur du réseau ou la personne raccordée au réseau n’a pas droit au dédommagement des dommages directs ou indirects causés par les interruptions, en cas de (…) perturbations du réseau non imputables à une négligence grave.» En toute logique, la même disposition a donc fini sa course dans les conditions générales de Romande Energie. Dès lors, difficile d’obtenir le moindre centime de dédommagement… A moins de prouver que la panne est consécutive à une faute grave du fournisseur (lire encadré).
Vincent Cherpillod
Faute grave?
En cas de grave négligence du fournisseur, la clause de non-responsabilité tombe et le lésé peut obtenir réparation. «Mais une défaillance de matériel électrique ne constitue pas une négligence imputable à Romande Energie, sauf si nous avions eu connaissance de l’existence de ce défaut de matériel depuis longtemps et avions omis de prendre des mesures correctrices, ce qui n’est pas le cas», avance la porte-parole du fournisseur d’électricité. Autre exemple de faute grave: une erreur de commande du réseau qu’un collaborateur, eu égard à sa formation et aux circonstances du cas d’espèce, ne devrait pas commettre.