Fabien* est dégoûté. Selon lui, les pratiques d’Assista s’assimilent à un jeu de dupes. Car, si les primes sont dues quoi qu’il arrive, l’assurance de protection juridique peut facilement se défausser lorsqu’il s’agit de défendre son client dans une procédure judiciaire dont l’issue, par nature, n’est jamais donnée d’avance (lire notre article «(R)assurez-vous, on s’occupe de tout», BàS 11/2012). Prévenu de violations des règles de la circulation, notre lecteur s’est retrouvé seul au tribunal, qui lui a donné raison.
Le premier acte remonte au 30 juillet dernier. A deux heures du matin, la gendarmerie intercepte Fabien sur une route cantonale, (alors qu’il roulait) au volant de sa Seat León Cupra. Les policiers inspectent son bolide, lui font souffler dans le ballon, sans rien trouver à redire. Ils lui infligent toutefois une amende de 300 fr. (plus 50 fr. de frais) au motif qu’il aurait provoqué trop de bruit en accélérant et en faisant inutilement monter le régime du moteur.
Aucune chance de succès
Deuxième acte, en septembre 2012. Fabien fait opposition à sa contravention. Il demande l’intervention d’Assista au début de décembre. Sur la base des informations reçues, celle-ci refuse d’entrer en matière, estimant que sa démarche est «dépourvue de chance de succès juridique». En substance, elle fait valoir que, en l’absence de témoins, sa parole ne pèse pas lourd contre celle de deux agents assermentés.
Dans un tel cas, l’assuré peut toutefois actionner la procédure arbitrale qui consiste à demander à un avocat neutre de trancher si le refus d’assistance est justifié ou non. C’est ce que va faire Fabien, convaincu qu’il a ses chances devant la justice: «Qu’est-ce qu’on entend par forte accélération? Comment un policier peut-il évaluer le régime du moteur, alors qu’il se trouve à une centaine de mètres? Peut-il juger à l’oreille du niveau du bruit?»
L’arbitrage échoue
Le 15 janvier, Assista, lui demande alors de proposer un arbitre, ce qu’il fait trois jours plus tard. Mais le choix ne convient pas à l’assureur qui fait une contre-proposition avec deux avocats. Mais, cette fois, c’est notre lecteur qui les récuse du fait qu’ils ont collaboré avec Assista par le passé. Vu le nombre de dossiers qu’elle traite, l’assurance répond qu’il est difficile de trouver des avocats qui n’ont jamais collaboré avec elle.
Au final, faute d’arbitre, l’arbitrage n’aura pas lieu. Un mois s’est alors écoulé entre la date à laquelle notre lecteur a fait sa proposition et la contre-proposition d’Assista du 18 février 2013. C’est la preuve, pour Fabien, qu’«Assista a joué la montre, afin d’éviter l’action en justice». Pour l’assureur, ce délai n’est pas excessif, d’autant que l’audience au tribunal est fixée au 3 avril 2013.
Acquitté!
Contrairement au pronostic pessimiste d’Assista, le Tribunal de police de Lausanne s’est rendu aux arguments de Fabien, considérant que, «à tout le moins, un doute suffisant subsiste sur la commission de l’infraction».
Rétrospectivement, on peut se demander, si l’assurance n’a pas été excessivement frileuse dans ce dossier. Ce qu’elle réfute: «Après coup, l’exercice est toujours aisé. Mais notre expérience et la jurisprudence en la matière montrent clairement qu’un prévenu a très peu de chances d’avoir gain de cause face à deux officiels assermentés.» Et d’affirmer que, dans plus de 90% des cas qu’elle traite, son pronostic est confirmé a posteriori lorsque l’assuré tente d’aller seul en justice. Personne ne sait, toutefois, combien d’assurés renoncent à se défendre seuls, de peur d’avoir à assumer les frais de justice en cas de défaite.
En définitive, la «morale de l’histoire» est qu’il ne faut pas compter sur sa protection juridique pour «aller au casse-pipe». Il est compréhensible que cette dernière se réserve le droit de ne pas défendre des cas à l’évidence perdus d’avance. Mais son appréciation reste partiale.
En cas de doute sur son pronostic initial, il vaut donc la peine de tenter l’arbitrage ou de demander un autre avis, par exemple à une permanence juridique, avant de renoncer à défendre ses droits.
Philippe Chevalier
*Nom connu de la rédaction.