Poursuites pour dettes: un système injuste
Un consommateur ne dispose que de moyens coûteux pour faire radier un commandement de payer, même s’il n’est pas fondé. Un fonctionnaire vaudois reconnaît l’inéquité du système.
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Bon à Savoir 10-2004
06.10.2004
Suzanne Pasquier
La réception d’un commandement de payer est souvent ressentie comme un couperet par le destinataire, surtout lorsqu’il l’estime injustifié. A tort et à raison. A tort, car s’il considère qu’il n’est pas débiteur, il peut se défendre en formulant une opposition. A raison, car il ne dispose que de moyens coûteux pour faire face à un créancier chicanier.
Les conséquences du système: le destinataire hésite à faire opposition à un commandement de payer pour une petit...
La réception d’un commandement de payer est souvent ressentie comme un couperet par le destinataire, surtout lorsqu’il l’estime injustifié. A tort et à raison. A tort, car s’il considère qu’il n’est pas débiteur, il peut se défendre en formulant une opposition. A raison, car il ne dispose que de moyens coûteux pour faire face à un créancier chicanier.
Les conséquences du système: le destinataire hésite à faire opposition à un commandement de payer pour une petite somme, tandis que l’expéditeur, de son côté, dispose d’un énorme moyen de pression, dont il sera tenté d’abuser.
Voici les principales étapes de la poursuite et les options offertes à celui qui en fait l’objet.
> Le commandement de payer:
Il doit être notifié au débiteur ou à une personne adulte faisant ménage commun avec lui. Le facteur ne peut pas le remettre à la femme de ménage, pas plus qu’à un enfant. Si le destinataire n’est pas à la maison, il est prié d’aller le chercher à La Poste dans les sept jours. Passé ce délai, l’avis revient à l’office des poursuites, qui enverra un agent de police (ou un autre fonctionnaire) pour le remettre au destinataire.
> La dette est due:
Si la créance est fondée, le débiteur a intérêt à la payer directement à l’Office des poursuites, qui radiera tout de suite le commandement de payer. Si l’argent est remis au créancier, celui-ci doit s’adresser à l’Office pour faire disparaître toute trace de la poursuite. Mais il arrive qu’il tarde à le faire. «Certaines maisons de recouvrement, par exemple, font traîner les choses par esprit de chicane, même si la dette est payée», déplore Claude Bonjour, préposé à l’Office des poursuites de Lausanne-ouest. Le débiteur ne dispose alors pas de moyen de contrainte, si ce n’est une coûteuse action en justice.
> La dette n’est pas due:
Le «faux» débiteur a intérêt à faire opposition au commandement de payer. Sans cela, il lui sera très difficile de faire valoir son droit par la suite. Le créancier peut alors requérir la mainlevée de l’opposition et la continuation de la poursuite, qui permettra au juge d’établir si la créance est justifiée ou non.
Mais il arrive que le créancier, pas sûr de son bon droit, renonce à continuer la poursuite tout en maintenant le commandement de payer. Celui-ci reste par conséquent inscrit. De ce fait, le destinataire se trouve en mauvaise posture. Il peut intenter une action en annulation de la poursuite, mais il devra débourser 300 à 500 fr. en frais de justice pour une créance de moins de 8000 fr., (auxquels s’ajoutent les frais d’avocat ou d’agent d’affaires). Et ces frais grimpent à plus de 1000 fr. lorsque le créance contestée dépasse 8000 fr.
De faux créanciers profitent ainsi du système pour exercer des pressions sur des particuliers. Selon Claude Bonjour, «les personnes poursuivies à tort sont alors victimes d’une injustice, contre laquelle les Offices de poursuites ne peuvent malheureusement rien faire».
> Communication de la poursuite:
Le nœud du problème, ce sont évidemment les renseignements fournis par les Offices des poursuites aux bailleurs, banquiers ou commerçants qui s’informent sur la situation financière de leurs locataires ou clients potentiels. Ce droit de consultation devient toutefois caduc cinq ans après la clôture de la procédure.
La poursuite est inscrite à l’Office du domicile du débiteur. Raison pour laquelle les créanciers demandent parfois à leurs clients potentiels les adresses des domiciles des deux ou trois dernières années. Déménager pour se «laver» de ses poursuites ne marche donc pas forcément à tous les coups.
Suzanne Pasquier
Prochain article: Comment mettre un débiteur aux poursuites.