Selon les directives de Bio-Suisse, les producteurs de vin biologique ne doivent pas utiliser de pesticides chimiques. Logiquement, il ne devrait donc en apparaître aucune trace dans les bouteilles munies du bourgeon...
Pourtant, des analyses réalisées récemment par le Laboratoire de Suisse centrale ont montré que 51 des
83 vins biologiques testés – suisses et étrangers – contenaient des traces de pesticides. Un test récent commandé par Bon à Savoir à l’Interlabor Belp confirme ces résultats: sur vingt des vins helvètes analysés, quatre contenaient des résidus chimiques (voir encadré).
La présence de ces résidus, en quantité très faible, ne peut s’expliquer que par une pollution externe, en provenance des vignobles voisins cultivés traditionnellement. Un problème qui touche peu les propriétaires de grands domaines bio. En revanche, il peut arriver que de petites parcelles isolées soient contaminées. Parfois, il est même impossible d’y produire du vin biologique. «Certaines de nos parcelles sont entourées de vignobles traités par hélicoptère, explique Bruno Martin, vigneron à Ligert (BE). Cette production ne peut donc pas être vendue sous le label Bio-Suisse.» Avec le sulfatage manuel, le risque de contamination est plus limité. Mais il existe: preuve en est le résultat du test.
Ces vins biologiques pollués – même légèrement – méritent-ils encore leur label? «Oui, répond sans hésitation Christof Dietler, directeur de Bio-Suisse. Les quantités de pesticides révélées par les tests sont si infimes qu’encore récemment il était impossible de les déceler. Et elles sont très inférieures à notre seuil de tolérance.»
n Impossible
n d’éliminer le cuivre
Autre problème: le cuivre. Les agriculteurs biologiques ont pour mission d’assurer une production respectueuse de l’environnement: engrais naturels (fumier, compost), désherbage manuel, traitement contre les champignons à base de soufre,
de cuivre et d’argile. De plus, tout le travail répond à un cahier des charges très strict, exigeant jusqu’à l’utilisation de produits de nettoyage écologiques.
Or, nos analyses ont montré que les quantités de cuivre contenues dans les vins bio étaient très similaires à celles qu’on trouve dans les vins traditionnels. Certes, ce métal n’a aucune incidence sur la santé, mais on sait qu’il s’accumule dans le sol et peut le rendre stérile. Il y a quelques décennies encore, il était utilisé massivement par les viticulteurs (jusqu’à 80 kilos par hectare). Quelle la situation aujourd’hui?
«Il faut d’abord savoir qu’une forte teneur en cuivre n’est pas forcément représentative des doses diffusées sur la vigne, explique Christof Dietler. Ces résidus peuvent provenir des installations et de la robinetterie des caves. Quant aux normes d’utilisation, elles sont devenues très strictes, aussi bien pour les producteurs biologiques que pour les vignerons traditionnels.» En plus des pesticides chimiques, ces derniers ont le droit d’en répandre jusqu’à 4 kg/ha. Les viticulteurs bio doivent, eux, se limiter à 3 kg/ha (jusqu’à 4 kg/ha sur demande).
L’influence du climat
En 1999, cette limite a d’ailleurs été exceptionnellement augmentée à 6 kg/
ha, en raison des mauvai-
ses conditions climatiques. L’humidité favorise, en effet, l’apparition du mildiou. «Le cuivre reste indispensable pour prévenir l’apparition de ce champignon, mortel pour la vigne, explique Jean-Daniel Schläpfer, vigneron à Peney (GE). Mais nous en utilisons le moins possible.» Christof Dietler reconnaît que la pratique pourrait être améliorée: «Nous n’avons pas encore trouvé de produit de substitution. Mais nous poursuivons nos recherches dans ce domaine.»
Sophie Reymondin
test
Traces infimes de pesticides
Sur les vingt vins biologiques analysés à la demande de Bon à Savoir, provenant de toutes les régions viticoles de Suisse, quatre seulement ont montré des traces de pestici-des: entre 3 microgrammes (µg/kg) et 11 µ/kg. Mais il faut savoir que les limites autorisées dans les vins traditionnels sont jusqu’à 100 fois plus élevées selon le type de pesticide.
Bon à Savoir a également fait analyser la teneur en cuivre des vins biologiques. Elle varie entre 0,06 mg/l et 0,83 mg/l. La limite légale, valable aussi bien pour la production biologique que traditionnelle, est fixée à 1 mg/l. Aucun des vins testés ne la dépassait.