Lorsque son épouse, «assez friande de gadgets et soucieuse du respect de l’environnement», lui a montré le prospectus de la firme «Envois solaires» en pointant du doigt un joli réveil carburant à l’énergie solaire, Jacques-Olivier Rodieux n’a pas eu la réaction escomptée: «D’un naturel un peu plus méfiant, je me suis demandé ce qui se cachait derrière cette société bâloise.»
Plus que des doutes sur la qualité de la vingtaine de produits solaires et bio proposés, c’est l’énigmatique proposition de don, inscrite sur la carte de commande qui attise la suspicion de ce lecteur lausannois: «Don pour une politique énergétique respectueuse de l’environnement.» Certes, la société n’use pas de moyens condamnables, tel un rabais accordé sur un achat des produits du prospectus, pour inciter à la générosité. Mais elle ne donne aucune explication sur l’utilisation des sommes récoltées. Pour en avoir le cœur net, Jacques-Olivier Rodieux a donc envoyé le prospectus à Bon à Savoir.
But politique
Contactée par téléphone, la société «Envois solaires» nous a communiqué, ô surprise, les coordonnées de Reto Gamma, l’ancien secrétaire général du Parti socialiste suisse, désormais chef de projet «recherche de fonds» au PS. Lequel nous a expliqué que le prospectus est envoyé par une société privée liée contractuellement au Parti. Et que la totalité des dons ainsi qu’une large part des bénéfices résultant de la vente des produits du prospectus financent les actions politiques du groupe de travail «Ecologiques» du PS.
Voilà qui éclaire notre lanterne... Mais peut-être eût-il été plus judicieux de le préciser noir sur blanc?
Reto Gamma se défend en affirmant que le prospectus «Envois solaires» n’est jamais envoyé seul. Quatre fois l’an, depuis début 2005, 10 000 ménages romands reçoivent un courrier comprenant trois éléments: le prospectus, le magazine Ecologiques, rédigé par le groupe de travail du même nom du PS et un édito d’une page.
Et, comme le précise Roger Nordmann, conseiller national socialiste vaudois auteur du dernier édito: «Le magazine contient un texte mis en évidence sur fond rouge présentant les objectifs du groupe et expliquant l’affectation des fonds récoltés.» Pour savoir à quoi sont affectés les dons, il faut donc impérativement lire le magazine. Faute de quoi, et c’est ce qui est vraisemblablement arrivé aux Rodieux, il est impossible de connaître la destination des sommes offertes. Tout sauf logique, et d’autant plus abracadabrant que le texte explicatif n’a pas figuré dans tous les numéros du magazine!
Mea culpa
Pas de quoi intervenir pour autant au niveau judiciaire, puisque le don est libre, résume Dieter Biedermann. Ce spécialiste des partis politiques à l’Office fédéral de la justice regrette cependant le manque de clarté de l’envoi en question. Mais dans ce genre de situation, il appartient au citoyen de se renseigner en cas de doute.
Conscients du problème, Reto Gamma et Roger Nordmann nous ont spontanément déclaré vouloir y remédier. Promesse a donc été faite que, désormais, l’affectation des dons sera spécifiée dans la carte de commande et qu’un texte explicatif figurera dans tous les numéros du magazine. Une décision qui satisfait notre lecteur Jacques-Olivier Rodieux.
Sébastien Sautebin
labels de qualité
Donner à bon escient
Pour celles et ceux qui désirent faire un don en faveur de l’environnement sans passer par un parti politique, il existe en Suisse de nombreux organismes dignes de confiance. Martina Ziegerer, directrice de ZEWO, la fondation zurichoise qui attribue un label de qualité aux organisations d’utilité publique collectant des dons, cite notamment le WWF (www.wwf.ch) et Pro Natura (www.pronatura.ch).
Le site www.zewo.ch fournit des conseils pour donner en connaissance de cause, ainsi qu’une liste des organisations certifiées.
La Fondation fournit aussi des infos au public sur les organismes collectant des dons: ) 044 366 99 55 ou par mail: [email protected]