Emballage correct – traitement optimal. Tous les clients de La Poste ont en principe eu connaissance du slogan et des nouvelles prescriptions contenues sur une double page recto verso décrivant la bonne façon de faire un paquet. Fini le temps où l’on demandait à quelqu’un de «mettre le doigt» pour bien ajuster la ficelle: cette méthode est barrée sur ladite feuille et estampillée d’un sigle «faux». N’écrivez pas non plus à même le papier: il existe aujourd’hui de nouvelles étiquettes-adresses autocollantes pour ce faire. Et ne débordez pas les cases, s’il vous plaît! Enfin, renoncez à des polices de caractères fantaisistes: il s’agit d’écrire droit, en majuscules…
Ce diktat postal nous a laissé songeurs. Mais pas longtemps: nous avons pris une vieille veste, un twist-ball (deux barres métalliques avec une balle de tennis) et des cartons de jeux. Puis du papier d’emballage, des ciseaux, du scotch et de la ficelle. Et quelques minutes plus tard, trois paquets en mains, nous avons poussé trois portes différentes de La Poste suisse.
Plus cher, parce que bizarre
Le plus douteux des trois renfermait la veste. Il a passé la rampe d’un guichet de la campagne vaudoise, ouvert l’après-midi de 13 h 30 à 14 h. L’objet livré était tout mou, ni carré, ni rectangulaire. L’adresse, écrite à même le papier brun, était bicolore: le feutre noir avait rendu l’âme! Le scotch ne tenait pas. Heureusement, la ficelle oui. Au guichet, l’incontournable feuille A4 était affichée et le client pouvait se servir sur une petite pile. Le buraliste était plutôt sympa. Il a pris le paquet informe et demandé: «Rien de dommage à l’intérieur?» Il n’a pas coupé la ficelle, a rajouté du scotch et hop, l’a rangé derrière lui. C’est donc nous qui avons joué les avocats du diable:
– La feuille affichée là ne fait pas autorité?, avons-nous demandé.
– Il faut habituer la clientèle. L’important, c’est que la ficelle ne cache pas ce qui est écrit, nous a-t-on répondu…
Le deuxième paquet contenait les barres métalliques. Il était donc long et plutôt lourd. A un guichet citadin en heure de pointe, sans affichettes en vue: «Houlala, cela vous fera deux francs de plus parce que c’est bizarre», a lancé tout de go la buraliste. Ah bon… Mais c’est quoi, un paquet bizarre? «Il est trop long, pas standard», a répondu la dame avant d’attraper le paquet par les ficelles. Place au client suivant, et de deux!
«C’est joli!»
Dans cette poste fribourgeoise, la buraliste était en train de passer l’aspirateur. «C’est fermé, mais venez», a-t-elle déclaré. Notre dernier paquet était ficelé, rigide, et l’adresse était écrite sur une étiquette rouge. «Ecoutez, je ne peux pas l’envoyer comme ça, on a de nouvelles prescriptions. Je vais voir si j’ai un carton derrière. Mais c’est dommage pour l’adresse: c’est joli!» Elle a pris le paquet
et est revenue avec la fameuse affichette: «Désormais, il faudra procéder de cette façon».
Alors, ces nouvelles prescriptions? Faut-il les comprendre comme un simple conseil ou auront-elles à terme un caractère obligatoire? «La fiche a un caractère incitatif, il n’y a pas d’obligations de suivre les prescriptions, sauf pour les grands expéditeurs», rassure Pierre-Alain Pingoud, porte-parole romand de La Poste. Qui ajoute que les paquets ne se verront jamais refusés aux guichets, même ficelés. «Dans nos trois nouveaux centres de traitement des colis, certaines installations ont subi des dommages parce que la ficelle passait sous les chariots et faisait dérailler des bandes de transport, explique-t-il. Et lorsque ça déraille, il faut une heure pour remettre les bandes de transport en place! Quant aux étiquettes, c’est à cause de la lecture optique. Lorsque l’adresse est mal écrite, le colis est éjecté et doit alors être traité manuellement».
Petite question complémentaire rien que pour ceux qui envoient des colis à l’étranger: comment faire, puisque l’étiquette ne contient que quatre cases pour le numéro postal et qu’en Allemagne, par exemple, il comprend 6 chiffres? «Déborder les cases, répond sans hésitation Pierre-Alain Pingoud. Les paquets sont de toute façon traités manuellement par la poste-douane de sortie». Ouf!
Gabrielle Desarzens
à contresens
Bien arrivés
Bonne nouvelle: nos trois paquets sont arrivés à Bon à Savoir dans des temps record. Deux d’entre eux un jour après l’envoi. Le troisième, celui, tout mou, qui renfermait la veste, a pris un jour de plus. Il n’avait plus de ficelles et était scotché dans tous les sens… avec le scotch jaune de la poste qui invite à acheter les paquets Post Pac! Une étiquette conforme avait en outre remplacé l’adresse écrite à même le papier. L’écriture, en majuscules, est des plus lisibles: le buraliste n’a pas débordé les cases. Le paquet posté à Fribourg n’avait plus de ficelles non plus. L’histoire ne dit pas si le troisième, arrivé bien ficelé, a fait ou non dérailler les bandes de transport…