Malgré l’existence de nombreuses familles recomposées, le Code civil (CC) ne règle pas les relations directes entre un enfant et son beau-père ou sa belle-mère. Pour remédier à ce manque, les tribunaux et les législations cantonales ont réglé de nombreuses situations, recensées et commentées dans un ouvrage fort pratique(1). A sa lecture, on s’aperçoit que pour ménager les finances publiques, les autorités développent des trésors d’imagination afin de mettre à contribution le beau-père ou la belle-mère, et même le concubin...
Pour analyser les relations entre enfants et beaux-parents, prenons l’exemple de Jeanne et Olivier, qui se sont mariés et ont eu un enfant. Mais Olivier est également le père de Steeve, qui vit dans sa première famille, et Jeanne est la mère d’Eva, qui vit avec elle (voir schéma).
> Devoir d’assistance:
Olivier n’exerce pas l’autorité parentale sur Eva, mais il est tenu «d’assister son conjoint de façon appropriée dans l’exercice de l’autorité parentale à l’égard des enfants de l’autre et de le représenter lorsque les circonstances l’exigent» (art. 299 CC). Si Olivier ne prend pas lui-même de décision importante concernant l’éducation d’Eva, son avis compte tout de même. Et il peut être amené à prendre la place de Jeanne lorsqu’elle a un empêchement, par exemple pour signer un bulletin scolaire ou, plus sérieux, décider d’une intervention médicale urgente. Son rôle sera néanmoins moins important si Jeanne partage l’autorité parentale avec le père biologique d’Eva.
> Obligation d’entretien:
Concernant l’obligation d’entretien, «chaque époux est tenu d’assister son conjoint de façon appropriée dans l’accomplissement de son obligation d’entretien envers les enfants nés avant le mariage» (278 CC). L’obligation du beau-parent est toutefois subsidiaire: elle n’existe que si le père ou la mère biologique ne peut remplir seul son devoir d’entretien.
Dans notre exemple, Jeanne peut être contrainte à participer à l’entretien de Steeve, même si celui-ci habite sous un autre toit. De par la loi, elle n’interviendra toutefois qu’à deux conditions: si Olivier ne parvient pas à verser l’entier de la pension alimentaire de Steeve, et si elle dispose elle-même de ressources suffisantes pour en attribuer une part à Steeve. De même, le revenu de Jeanne sera pris en compte pour voir si Steeve a droit à une avance de pension par l’Etat.
> Droit de visite:
Si Olivier et Jeanne se séparaient ou divorçaient, ils n’auraient en principe pas de droit de visite sur l’enfant de l’autre. Toutefois, le juge pourrait le leur accorder
à titre exceptionnel, pour autant que ce soit dans l’intérêt de l’enfant (art. 274a CC).
En cas de concubinage:
Si Jeanne et Olivier n’étaient pas mariés, ils ne seraient pas concernés, d’un point de vue légal, par le devoir d’assistance (indirect) ou l’obligation d’entretien (subsidiaire) envers l’enfant de l’autre. Pour différentes questions financières, leur union serait toutefois souvent assimilée à celle d’un couple marié! Si l’un d’eux déposait une demande d’avance sur pension pour l’enfant né de la première union, les autorités tiendraient compte des revenus des deux partenaires pour prendre leur décision. Idem lors d’une demande d’aide sociale, ou pour le calcul des biens saisissables dans le cadre d’une poursuite. Suzanne Pasquier
(1)«Familles recomposées», éditions
la Passerelle, CSP Vaud, commande au tél. 021 320 56 81.