Rien de plus doux qu’une moquette fraîchement posée. Mais rien de plus gênant aussi qu’une carpette à bout de souffle. La famille Mercier le sait bien: lorsqu’elle a emménagé, il y a cinq ans, dans un quatre pièces de la région bulloise, la moquette avait déjà dix ans d’âge. Aussi, lorsque Mme Mercier demanda, cinq ans plus tard, de procéder à son remplacement, il lui semblait qu’il ne s’agissait que d’une formalité. Premier refus cependant de la régie Roland Deillon, à Fribourg, estimant que l’état des tapis était encore acceptable.
Etonnée, la famille Mercier écrit à Bon à Savoir pour demander son avis. Nous lui faisons parvenir le tableau de la longévité des installations, reproduite dans la page de droite, en lui suggérant de réitérer sa demande à l’aide de ce document. Nouveau refus de la régie, plus nuancé toutefois: le remplacement est possible, mais les frais devront être partagés, car le budget accordé par le propriétaire est réservé à d’autres travaux prioritaires. Que faire dans un tel cas?
Défauts moyens
Si l’on se reporte à l’ouvrage du juriste David Lachat, Le bail à loyer, référence en la matière (*), l’usure normale d’une moquette est un défaut de moyenne importance. Par opposition aux défauts graves (ils excluent ou entravent considérablement l’usage des locaux loués: toiture à refaire, ascenseur à remplacer pour les locataires des étages supérieurs, etc.) et aux menus défauts (ils peuvent être éliminés par de simples travaux de nettoyage ou de réparation incombant souvent au locataire: vitre brisée, fusible à changer, neige et glace sur le balcon, etc.).
Les défauts de moyenne importance diminuent le confort du logement, sans exclure l’usage des locaux loués. Exemples: le mauvais fonctionnement d’une machine à laver, une tapisserie défraîchie, etc. Ils découlent de l’usure normale des locaux et ne deviennent donc des défauts qu’à partir du moment où cette usure peut être assimilée à un manque d’entretien de l’appartement loué. Le locataire est alors en droit de demander au propriétaire de faire les travaux nécessaires à ses frais.
Le tableau de longévité des installations, également tirée de l’ouvrage de David Lachat, indique les durées maximales de chacune d’entre elles. Ces durées peuvent en effet être réduites selon la nature et la qualité des installations, mais aussi en fonction de la destination des locaux. On considère par exemple que la longévité des installations d’une chambre d’enfant doit être réduite de 30 à 50%.
Pas de doute
Dans le cas de la famille Mercier, il n’y a pas de doute. La durée d’une moquette de qualité est en effet estimée à dix ans au plus. Elle doit donc être changée, aux frais du propriétaire. Mais que faire s’il ne veut pas entendre raison? «Réagir, répond sans hésiter Nils de Dardel, du secrétariat romand de l’ASLOCA. L’évolution de la jurisprudence est plutôt favorable au locataire en de tels cas. Mais mieux vaut se faire conseiller, car les moyens d’obtenir gain de cause sont compliqués et comprennent de nombreux pièges.»
En parlant de la sorte, le représentant de l’ASLOCA ne prêche pas pour sa paroisse. Il faut en effet souvent mener plusieurs opérations en parallèle: demander l’exécution des travaux devant la commission des baux, demander une baisse de loyer pour diminution de l’usage de la chose louée et, éventuellement, consigner une partie du loyer.
Des démarches complexes et qui peuvent même devenir dangereuses. Si, par exemple, la consignation du loyer n’est pas faite dans les règles de l’art, elle peut se transformer en un défaut de paiement avec résiliation possible du bail à la clé! Pour éviter ce genre de mésaventures, il vaut donc mieux consulter les spécialistes de l’ASLOCA (**).
La famille Mercier n’aura peut-être pas à le faire. «Je ne conteste pas que cette moquette n’ait plus de valeur assurance, explique Jean-Claude Liardet, gérant immobilier auprès de la société Deillon, à Fribourg. Mais j’estime que l’âge n’est pas suffisant pour justifier un remplacement automatique: tout dépend de l’usure réelle de l’objet.» En l’occurrence, la moquette a perdu ses boucles sur de larges surfaces (ce que l’on voit mal sur la photo publiée ci-contre), mais, il est vrai, n’est pas trouée ou tachée. Est-ce un état «acceptable»? Affaire à suivre: M. Liardet a en effet revu sa position et fait de nouvelles propositions au propriétaire.
Christian Chevrolet
(*) D. Lachat, Le bail à loyer, Lausanne 1997, éd. de l’ASLOCA.
(**) ( de l’ASLOCA:
BE: (032) 941 35 35
FR: (026) 322 83 72
GE: (022) 786 61 11 - (022) 731 20 00
JU: (032) 422 74 58
NE: (032) 724 54 24
VS: (027) 322 92 49
VD: (021) 617 50 36
loyer internet
Calculez votre baisse de loyer sur Internet
Un gigantesque hold-up! Telle est l’expression utilisée par l’ASLOCA pour commenter la dernière étude du Bass (Büro für arbeits- und sozialpolitische Studien). Il est vrai qu’elle révèle qu’entre octobre 1989 et mai 1998, les propriétaires ont encaissé un supplément injustifié de 11,2 milliards de francs! Autrement dit: chaque locataire a versé, en moyenne, 6386 fr. en trop!
De façon assez complexe, les loyers suisses évoluent en fonction de trois facteurs: le taux des intérêts hypothécaires, les 40% de l’indice suisse des prix à la consommation et l’évolution des frais d’exploitation. Or, si les taux hypothécaires ont atteint des sommets en 1992, il n’ont depuis cessé de baisser.
Certes, quelques bailleurs ont spontanément annoncé des baisses de loyer. Mais, constate l’ASLOCA, elles sont souvent trop faibles, et les plus importantes concernent surtout les loyers «haut de gamme».
Il est donc grand temps de vous demander si, vous aussi, n’êtes pas susceptible d’obtenir une baisse de loyer. Car si la loi actuelle donne à chaque locataire le droit d’exiger une telle réduction, elle ne prévoit pas d’automatisme. Comprenez que c’est à vous de demander cette baisse, par écrit et au bon moment.
Le bon moment, c’est à la prochaine échéance du bail, en respectant le délai imparti (souvent trois mois, mais pouvant aller jusqu’à six mois). Pour la fin de l’année, c’est donc raté! Mais il est temps de d’ores et déjà se préoccuper des échéances de juin 1999.
Reste à calculer si, oui ou non, vous avez droit à une baisse de loyer. Pour faire le bon calcul, trois possibilités:
• La plus simple et la plus récente: Bon à Savoir a développé un programme informatique remarquable. Il vous suffit d’entrer le canton de domicile, la date de signature du bail, la date d’entrée dans l’appartement et le montant du loyer, et vous saurez, quelques secondes plus tard, à combien se monte votre baisse de loyer. Vous ne voulez pas en rester là et désirez faire immédiatement votre demande de baisse? Pas de problème! Vous entrez vos nom et adresse, puis ceux de votre bailleur (gérance ou propriétaire), et, quelques secondes plus tard, vous n’aurez plus qu’à imprimer, puis signer une lettre personnelle entièrement rédigée!
Le programme est accessible dès aujourd’hui à tous les locataires de Suisse romande (Berne inclus) sur le site Internet de Bon à Savoir. Tapez www.bonasavoir.ch
• Plus long, mais toujours valable: la feuille de calcul publiée dans notre édition de mars 1998, avec les tableaux nécessaires pour les locataires de Suisse romande (Berne inclus).
Les taux hypothécaires n’ont pas changé, mais attention à une erreur d’impression concernant les cantons de Genève, Jura, Neuchâtel et Valais: la baisse du taux à 5% a été annoncée en 1995 et non en 1997.
Il suffit ensuite de compléter le tableau de l’indice des prix à la consommation (base décembre 82) comme suit: mars (144.0), avril (144.1), mai (143.8), juin (144.0), juillet (143.8), août (144.2), septembre (144.1), octobre (144.0).
• Enfin, il est toujours possible de prendre contact avec l’ASLOCA (numéros de téléphone dans la page de gauche), qui vous conseillera et vous appuiera dans vos démarches.
Durée de vie des équipements
Sols
Sols artificiels (vinyle, Novilon, etc.) 10 à 20 ans
Linoléums 25 ans
Parquet (remplacement) 40 ans
Ponçage et imprégnation du parquet 10 ans
Carrelage, catelles, pierre artificielle 25 à 45 ans
Moquettes, tapis tendus, selon qualité 5 à 10 ans
Linteaux, plinthes en plastique 20 ans
Linteaux, plinthes en bois 40 ans
Murs
Papier peint ordinaire 10 ans
Dispersion 5 à 10 ans
Chambres d’enfant: papier et enduit 5 à 10 ans
Plafonds
ispersion ou blanc fixe 10 ans
Vernis à l’huile ou synthétique 10 ans
Boiseries
Boiseries en résineux ou bois dur 40 ans
Boiseries en aggloméré 10 à 15 ans
Agencements de cuisine, plans de travail 10 à 15 ans
Vernis 10 ans
Fenêtres, stores et tentes
Fenêtres 30 ans
Vitrages 30 ans
Stores 20 ans
Tissus pour toile de tente 10 ans
Appareils de cuisine
Cuisinière, selon la qualité 10 à 20 ans
Plaques de la cuisinière 10 ans
Armoire frigorifique, selon la qualité 10 à 15 ans
Agrégat de l’armoire frigorifique 10 ans
Joint caoutchouc de l’armoire frigorifique 6 ans
Lave-vaisselle 10 ans
Hotte d’aspiration 5 ans
Installations sanitaires
Baignoire 30 à 40 ans
Email de la baignoire 10 ans
Lavabo, bidet, cuvette de WC 40 ans
Couvercle de WC 10 ans
Flexible de douche 6 ans
Miroir 20 ans
Machine à laver ou à sécher le linge 6 à 10 ans
Serrures
Serrure de porte d’entrée 20 ans
Serrure de porte intérieure 40 ans
Source: D. Lachat, Le bail à loyer, Lausanne 1997, p. 567.