Depuis quelque temps, Izabel Schnurrenberger ne voyait plus assez bien de près. Un handicap pour cette artiste peintre. Son oculiste lui apprend alors qu’elle est presbyte. Et lui prescrit des verres dits de proximité. Ils permettent de voir net de près (à env. 40 cm) et à une distance intermédiaire (80 à 100 cm), avec un champ de vision assez large, indispensable pour peindre.
Cependant, l’opticien chez qui se rend notre lectrice lui conseille des verres progressifs, pour voir à la fois de près, de loin et entre deux, avec une seule paire de lunettes. «Je vois bien à distance, mais je me suis laissé convaincre», raconte-t-elle après coup.
Mal lui en a pris: après plus de quinze jours, elle n’a pas pu s’habituer à ses lunettes. «Le champ visuel était trop restreint. Il y avait trop de flou dans les bords.» Finalement, l’opticien lui montera donc les verres prescrits par son oculiste, d’ailleurs moins chers. Désormais, elle peint à nouveau avec plaisir. Mais elle s’interroge sur l’utilité des verres progressifs: «Ne servent-ils pas surtout à enrichir les opticiens?»
En fait, les verres progressifs sont destinés aux presbytes, dont l’œil n’arrive plus à accommoder la vue de près. C’est un processus naturel: dès la naissance, le cristallin, derrière la pupille, commence à perdre de sa souplesse. Or, c’est lui qui permet l’accommodation, soit de voir net de près en se bombant, et de loin en s’amincissant. L’enfant peut encore voir net à 5 cm. Un adulte jeune doit déjà éloigner son texte, et le presbyte (normal) aura progressivement «les bras trop courts» pour lire.
La presbytie se fait ressentir à partir d’environ 40 ans. C’est l’heure des lunettes de lecture. Mais pour voir au loin, il faut les ôter. Et le myope, qui porte des lunettes pour voir à distance, sera obligé de les enlever toujours plus souvent pour lire. Des gestes supprimés par des verres progressifs. Leur verre unique offre une variation continue de puissance, sans saut d’image (comme c’est le cas avec des verres à double foyer). A travers le haut du verre on voit loin, à travers le bas de près, et avec le milieu entre deux.
Toutefois, ces verres ne conviennent pas à tous. «Cela dépend du tempérament de la personne, de sa profession, etc., note l’opticien lausannois Jean-Félix De Malm. Pour un jeune presbyte, les lunettes de lecture suffisent. Mais si l’on doit changer constamment de distance, par exemple comme caissière, les verres progressifs sont plus commodes».
Pour savoir si ces verres conviennent, on doit donc en discuter en détail avec son ophtalmologue ou l’opticien. Sans oublier qu’il faut un temps d’adaptation – 1 à 15 jours en moyenne. «Les jeunes presbytes s’habituent plus vite, mais certains ne s’y font jamais, surtout les impatients», fait remarquer M. De Malm.
• Comment regarder: pour voir net avec des verres progressifs, au champ de vision relativement étroit, il faut tourner la tête , non les yeux. Pour lire, il faut placer la tête bien en face du texte. En marchant, il faut baisser la tête et regarder le sol à travers le haut du verre. Sinon, gare à la marche ratée!
«Le prix élevé de ces verres se justifie par le coût de la recherche et la haute technicité nécessaire pour les produire», précise M. De Malm. Ils coûtent entre 190 et 500 fr./pièce.
De toute manière, pour l’heure, les presbytes n’ont guère le choix. Les chercheurs s’efforcent certes de trouver un médicament contre la rigidification du cristallin, mais en vain jusqu’ici. Ils tentent aussi de mettre au point une intervention chirurgicale pour déformer la cornée (partie antérieure, transparente de l’œil) et augmenter son effet loupe, avec des résultats encore décevants. Mais l’espoir est permis.
Ellen Weigand
conseils pratiques
Demandez des devis
Pour obtenir les verres les mieux adaptés à votre problème de vue et à... votre porte-monnaie, veillez à plusieurs points:
• Demandez à votre oculiste quel type de verres il conseille, et le traitement nécessaire (verre, plastique, antireflet, verres teintés, etc.) Ainsi, vous pourrez mieux réagir face à un éventuel discours commercial de l’opticien.
• Un bon opticien vous demandera l’usage précis que vous ferez de vos lunettes, pour les adapter à vos besoins spécifiques.
• Si l’opticien propose d’autres verres que ceux prescrits, assurez-vous qu’il en discute avec votre oculiste, comme c’est en général la pratique.
• Essayez plusieurs types de verres pour en apprécier les différences, surtout pour les progressifs.
• Demandez un devis à plusieurs opticiens. Pour qu’on puisse les comparer, ils doivent mentionner en détail le type de verres, le traitement, etc. Sachez que
les prix peuvent varier du simple au double!