Envie de dormir davantage? De manger des sucreries ou des féculents? Manque d'énergie? Humeur morose? Vous n’êtes pas seul. Ce genre de symptômes de la dépression hivernale touche, selon une étude menée à l'Université de Bâle, 11% des Suisses! La plupart sont des femmes, plutôt jeunes, habitant indifféremment au sud ou au nord du pays, au-dessous ou au-dessus du stratus une partie de l'année. Mais seuls 2% souffrent de graves dépressions qui se déclarent en hiver et qui nécessitent impérativement un traitement médical.
Dans sa forme légère ou aggravée, le mal apparaît bel et bien avec la diminution des jours. Comme la nature se met en veilleuse, tout un chacun se sent alors des envies d'«hiberner», de rester au lit le matin ou de grignoter en dehors des heures des repas. Rien d'alarmant! Mais pour certains, ces envies sont démesurées et la fatigue est telle qu'elle empêche de mener à bien les activités quotidiennes ou professionnelles. Or, si les jours baissent, les bureaux ouvrent toujours à la même heure... Il est donc recommandé de consulter son médecin.
«Les gens ont tendance à banaliser ce qui leur arrive et ne se rendent pas compte qu'ils pourraient être traités, remarque la doctoresse Sylvia Quayzin, du centre de consultations de la Jonction, à Genève. Lorsqu'on a de la peine à se rendre au travail ou qu'on perd l'envie de sortir avec ses amis, cela devrait représenter un signal d'alarme. Si ces dépressions sont rarement assez graves pour nécessiter une hospitalisation, elles sont souvent invalidantes.»
Comme la plupart des policliniques psychiatriques universitaires, le centre de la Jonction traite ces cas par la luminothérapie, parfois combinée avec des antidépresseurs, mais sans hospitalisation. Le principe est le suivant: puisque la personne souffre d'un manque de lumière, eh bien plaçons-la devant une lampe d'une intensité comparable à la clarté du jour! Avec une dizaine de séances d'une demi-heure, si possible le matin, la plupart des patients se retrouvent guéris. Du moins pour l'année à venir. Car dès la fin de l'automne suivant, les risques de rechute seront élevés, même si la maladie n'est pas forcément chaque année au rendez-vous.
Traitement «jeune»
Le déprimé de l'hiver, lorsqu'il a déjà été soigné une fois, saura réagir assez tôt pour ne pas trop souffrir. La luminothérapie réussit souvent là où les antidépresseurs ont échoué. Reste que, comme le souligne l'Université de Bâle, pionnière en la matière, le traitement est relativement «jeune» et n'a pas encore vraiment conquis la médecine privée.
Suzanne Pasquier
ANTICIPER
Gare aux symptômes
Même les défenseurs de la luminothérapie le reconnaissent: les dépressions hivernales ne représentent qu’une minorité de l’ensemble des dépressions. Pour beaucoup de psychiatres, le facteur saisonnier est souvent secondaire et vient se greffer sur l’une ou l’autre forme de dépression. Il faut dire que, souvent, les cas légers n’arrivent pas jusqu’à eux, car ils sont plutôt pris en charge par des généralistes.
Au centre psychosocial de Neuchâtel, le Dr Flammer souligne l’importance des dépressions liées à une perte (deuil, divorce), ou à des stress répétés (par exemple une surcharge professionnelle). Ou, actuellement, au chômage: «Souvent, plusieurs facteurs sont présents. Il faut être attentif aux symptômes et ne pas négliger de consulter son médecin lorsqu’ils se manifestent.»
Les symptômes les plus fréquents (mais qui ne se manifestent pas forcément tous):
- une insomnie (réveil au milieu de la nuit avec impossibilité de se rendormir, c’est à dire l’inverse de l’excès
de sommeil des déprimes
hivernales); - un manque d’appétit, là aussi contrairement à la déprime hivernale;
- une humeur morose,
un pessimisme général pouvant aboutir à des idées
suicidaires; - un ralentissement des
activités dû à un manque d’énergie; - des difficultés de concentration et une mémoire défaillante;
- parfois des douleurs inexpliquées, de l’irritabilité et de l’anxiété.