Voilà bientôt dix ans que Gérard Ruedin, de Dombresson, est assuré par la caisse maladie romande Assura. Lors de la dernière augmentation de son assurance complémentaire, il décide toutefois de résilier son contrat et de passer à la concurrence. Il pensait y avoir droit, puisque son contrat, après un premier délai de résiliation de cinq ans, était reconduit chaque année pour l’année suivante. Assura refuse pourtant sa démission, expliquant qu’elle ne peut intervenir avant... le 31 décembre 2001! Comment expliquer ce tour de passe-passe?
La loi change
Par le changement de législation. En effet, depuis le début de l’année dernière, l’assurance de soins obligatoire est une chose, les assurances complémentaires en sont une autre. La première, extrêmement réglementée, dépend de la loi sur l’assurance maladie (LAMal), qui fixe les modalités (prestations, délais de résiliation, tranche d’âge pour les primes, etc.) auxquelles les caisses doivent se tenir. Les assurances complémentaires sont, en revanche, soumises à la Loi fédérale sur les contrats d’assurance (LCA), à partir de laquelle les assureurs rédigent leurs conditions générales.
«Par défaut»
De ce rapide résumé, il faut retenir deux point:
- depuis le 1er janvier 1997, les assurances complémentaires dépendent d’une nouvelle législation;
- dans ce cadre, les caisses maladie (ou les assureurs privés) décident elles-mêmes du délai de résiliation, généralement entre un et cinq ans.
Assura a donc profité de cette nouvelle échéance pour proposer de nouvelles assurances complémentaires en automne 1996 à tous ses assurés. Elle l’a fait «par défaut», mais dans les règles et dans les délais. Comprenez que si les assurés, après avoir pris connaissance du courrier leur proposant cette nouvelle assurance, ne signifiaient pas leur refus jusqu’au 31 décembre 1996, ils donnaient leur consentement tacite pour un nouveau contrat. Et du moment qu’ils entraient dans un nouveau rapport contractuel, ils étaient à nouveau frappés d’un nouveau délai initial de résiliation de cinq ans. Comme le contrat de M. Ruedin est entré en vigueur le 1er janvier 1997, il ne peut donc démissionner avant 2002...
«Faut-il craindre un éventuel piège à chaque fois que l’on effectue un paiement?» demande notre lecteur, car il ne se souvient pas de la correspondance le liant à nouveau pour cinq ans, «qui faisait sans doute partie des multiples publicités qu’Assura nous fait parvenir avec ses factures et que je ne prends plus la peine de lire...»
Eh bien oui! L’accord par défaut est tout à fait légal du moment qu’il est fait dans les règles. Or, Assura a envoyé dans les délais un avenant fournissant les explications nécessaires, et a aussi mentionné la nouvelle assurance sur le premier bulletin de versement employé par notre lecteur pour régler son dû. Nous avons examiné cette documentation: elle a été faite dans les règles de l’art. Mais disons qu’il s’agit d’un art très contemporain, c’est-à-dire suffisamment complexe pour n’intéresser que les initiés! Quoi qu’en disent les caisses maladie, qui évoquent volontiers les frais qu’engendrent d’autres façons de faire, seul un contrat dûment signé est un contrat incontestable sur le fond, puisqu’il peut en être autrement sur la forme.
Christian Chevrolet
MAIS ENCORE...
Le dur prix de l’âge
Mieux vaut être jeune et en bonne santé que vieux et malade. L’adage a rarement été autant d’actualité. Trois lecteurs nous ont déjà fait part de leur étonnement: après l’augmentation de leur assurance complémentaire, leur caisse maladie a refusé leur démission, sous prétexte qu’il ne s’agissait que de l’adaptation de la prime à leur âge. Il y avait donc peut-être augmentation en francs réels, mais pas dans les faits!
Est-ce légal? Une fois encore, tout dépend des conditions générales (toujours les fameuses petites lettres du contrat). De fait, la majorité des caisses maladie ont adopté le système où la prime est en effet adaptée à l’âge effectif de l’assuré, généralement par saut de cinq ans. Du moment que cette façon de faire est clairement mentionnée dans les conditions générales, il semble, effectivement, qu’on ne puisse considérer cette adaptation comme une augmentation, et donc demander la résiliation du contrat avant son échéance.
Mais attention, selon Kurt Schneiter, responsable de l’information auprès de l’Office fédéral des assurances privées, il doit aussi figurer, dans ces mêmes conditions générales, un tableau énumérant le montant des primes pour les années (ou les lustres) à venir, ou du moins l’augmentation à attendre en pour cent. Or, il semble que tel ne soit pas le cas dans de très nombreux contrats...